Chapitre XI : ... pour moi

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- Sinon, je peux te les rendre. En échange d'une pierre qui appartenait jadis à ton père. Nous savons tous les deux que tu sais de laquelle je parle. J'ai déjà envoyé ta mère te prévenir que je la voulais. Tu n'as rien fais. Je t'ai, disons... Vois cela comme une motivation supplémentaire. Ou une punition pour m'avoir ignoré.

Il me remettait la faute sur le dos, comme si je ne me sentais pas déjà assez coupable, assez responsable. Je le haïssais à un point indescriptible ! Et je souffrais tellement. J'avais l'impression que mes entrailles se déchiraient, s'ouvraient sous le coup de mon chagrin, tentant d'évacuer ainsi tant de peine mais ne parvenant qu'à la diffuser plus encore.

Le pire c'est qu'il avait raison.

Ce fut comme une pierre tombant dans mon estomac.

La pierre des mers. Je l'avais oublié. J'avais laissé tomber les recherches et on me la remémorait de la pire des manières. Le sans-visage m'avertissait, comme s'il savait que je négligeais mes recherches. Ou bien le Tout-Puissant avait décidé que les sans-visages devaient la récupérer et me le faisait comprendre. Qu'est-ce que je racontais ? Comment pourrait-Il être de leur côté à ses monstres ?

- Ne t'en fais pas pour ta famille, je m'en occuperais bien, précisa-t-il avec un sourire inquiétant. Je suis sûr que ta mère et ta sœur feront des sans-visages redoutables, quand je les aurais dressées. Tu sais ce qu'il te reste à faire ?

Je ne le savais que trop bien. Cette fois je ne pourrais plus négliger mes recherches, je ne pourrais même pas avoir des scrupules à leur donner la pierre. Tout m'y poussait.

Et qu'allait-il faire à ma mère, qui venait tout juste de sortir de la folie ? Elle devrait avoir le droit de vivre une vie heureuse, amusante. Et à ma sœur ? C'était presque une enfant encore ? Et elle était tellement joyeuse, douce et gentille. Elle ne méritait pas cela ! Je le méritais bien plus qu'elle, moi qui ne créais que des problèmes.

- Eh bien, à bientôt !

Il disparut sur ces mots.

On fixa tous longuement l'image. Cela ne pouvait être tout. Je voulais voir ma sœur. Je voulais en savoir plus, qu'on me donne une indication.

Les adultes m'interrogèrent sur le sens de tous cela. Je ne dis pas grand-chose.

Ma cadette avait disparu, elle aussi kidnappée. Aux mains de ces terroristes mon impertinente de sœur ne pouvait que souffrir. Certes, elle, elle aurait une maman. Elle en aurait bien plus besoin que moi sans doute. Mais j'aurais tout donné pour prendre sa place, pour ne pas avoir à faire face à la culpabilité et la solitude.

- Vous allez retrouver ma sœur ? interrogeais-je.

- On va essayer. Mais les Alpes, c'est immenses mon garçon ! m'expliqua la directrice. Allez dormir un peu ! Demain on va tous rentrer.

Je ne dis rien.

Peu m'importait que les autres élèves nous en veuillent d'avoir raccourcis leurs vacances ou que l'on soit gentil avec moi. Camille avait disparu. Elle m'avait à son tour laissée. Je n'avais pas pu la retenir. Et sans moi, rien de tout cela ne serait arrivé.

Je ne dormis pas vraiment. Quoi que j'eus l'impression d'être dans un demi-sommeil depuis sa disparition. Et ce, jusqu'à ce que je visse mon oncle.

Mais tout d'abord, la dure réalité devait venir à mon esprit. Ce n'était pas un mauvais rêve.

De toute manière comment cela aurait-il pu ? Jamais mon esprit, aussi tordu soit-il, n'aurait pu inventer quelque chose d'aussi horrible. Même dans les moments les plus exaspérants de ma sœur, je n'avais jamais souhaité qu'elle parte. Pas même en vacances ou en séjour long duré chez une tante sortie de nulle part. Et puis, j'avais si peu dormi cette nuit que je n'avais pas pu rêver.

La pierre des mersWhere stories live. Discover now