Trois

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Les voix des personnes assises dans mon wagon me réveillent. Quoi ? Nous sommes déjà arrivés ? J'ai dormi pendant tout le trajet, alors. Merde et Lucas ! Il doit s'inquiéter et j'avoue que l'idée de rester seule dans une gare tard dans la nuit ne me rassure pas vraiment, et je suis sans défenses... Je regarde mon téléphone. J'ai une dizaine de messages de Lucas. Il est trop mignon. Malgré le monde et le bruit à l'intérieur du train, je décide de l'appeler.
Il décroche presque directement.
Lucas : Ma puce ! Enfin tu m'appeles ! Je me suis inquiété je pensais que le train avait eu un problème ou qu'il t'étais arrivé quelque chose ! Tu vas bien ?
Moi : Oh je suis désolée Lulu ! Je me suis endormie et je viens seulement de me réveiller, je suis toujours dans le train et nous venons d'arriver ! Je vais bien, ça va.
Lucas : Nan mais c'est pas grave ! Je prends la voiture je viens te chercher maintenant. A tout-de-suite !
Je n'ai même pas le temps de répliquer qu'il me raccroche au nez. Incroyable ce gars. Il est trop protecteur avec moi. Son comportement me fait sourire et c'est de bonne humeur que je rassemble mes affaires et sort du train.
Il fait vraiment froid et la gare est déserte, pas étonnant vu l'heure tardive. Comme Lucas va bientôt arriver, je décide de m'installer au chaud dans le hall de la gare, sur un banc. Au moins ici, je suis un peu moins seule et le froid ne me pique pas les joues.
Deux minutes plus tard, mon téléphone vibre. C'est encore lui. Il est sur le parking. Je me lève. Je suis tellement impatiente. Je ne tiens plus en place.
Quand je vois un grand jeune homme, fraîchement rasé, les cheveux noirs en bataille entrer dans le hall, je le reconnais immédiatement. Il tourne la tête et me cherche. Il n'y a plus personne, je lâche donc ma lourde valise et me mets à courir vers lui. J'ai du mal à aller vite d'habitude, mais je fais tout pour le cacher. Lucas m'a enfin vue. Je me jette dans ses bras et il me serre fort. Très fort. Je reste quelques minutes emprisonnée au creux de lui. Je savoure ce moment. Cela faisait si longtemps qu'on ne m'avait pas enlacée comme ça et surtout, lui, il m'avait manqué. Quand il me relâche enfin de son étreinte, je vois son sourire. Il a changé depuis l'année dernière. Il n'a plus son look d'éternel adolescent rebelle. Ses traits se sont légèrement affinés. C'est maintenant un vrai homme.
Moi je suis toute petite à coté de lui. Brune, les yeux verts, pas très grande et les cheveux bouclés qui me tombent bien en dessous de la poitrine. Voilà à quoi je ressemble.
Enfin, il ouvre la discussion :
Lucas : "Tu as changé !"
Moi : "J'attendais un accueil plus chaleureux, dis-je pour le taquiner. Mais toi aussi tu as changé."
Dit-il cela car il a remarqué mon ventre ? Oh non, pas maintenant, je ne veux pas que cela gâche nos retrouvailles...
Lucas : "T'es encore plus jolie qu'avant, t'es une p'tite femme maintenant. Tu m'as manqué tu sais."
Moi : "Oh t'es trop mignon Lulu ! Toi aussi, t'es plus un ado attardé t'es un homme maintenant !"
Lucas : "Je dois le prendre comme un compliment ?"
Le large sourire que je lui adresse le lui confirme, il récupère ma valise quelques mètres plus loin et nous sortons de la gare. Je suis rassurée. Il n'a rien remarqué, je ne suis pas seule, et rien n'a changé entre lui et moi. Comme je tiens à lui...
Nous marchons dans la nuit jusqu'à sa voiture tout en discutant de choses et d'autres. Il charge mes affaires dans le coffre, comme si inconsciemment, il connaissait mon état. C'est très perturbant.
Nous montons et roulons à travers Lyon. Ma ville natale. Elle aussi, elle m'avait manqué. Je suis vraiment fatiguée du voyage, même si j'ai dormi. C'est forcément le bébé.
Cela me pèse de ne lui avoir toujours rien dit. Dès ce soir, il saura tout, je m'en fais la promesse.
Lorsque nous arrivons au pied de son immeuble, il prend mes affaires et se dirige vers l'ascenseur.
Moi : "Ça va tu sais je peux porter mes bagages !"
Lucas : "Bah tant que je suis là va"
Nous prenons donc cet ascenseur et entrons dans son appartement. Ça n'a absolument pas changé. Les murs blancs, le parquet ancien foncé, les tableaux accrochés partout. De la déco de mec quoi. J'esquisse un sourire. 
Lucas : "Qu'est-ce qui te fais sourire comme ça ?"
Moi : "Rien rien t'inquiètes pas"
Il me sert à boire tandis que je m'installe dans le canapé crème, face à la télé toujours allumée.
Nous entamons une discussion des plus banales, mais cela fait si longtemps que nous n'en avons pas eu une que cela n'a pas d'importance.
À vrai dire, je n'arrive pas à me lancer. Je ne sais pas comment lui dire ça. J'ai peur. Je sens les paumes de mes mains moites et j'ai de plus en plus chaud. Il faut que je le fasse. Maintenant.
Mais, soudainement, comme si il avait lu dans mes pensées, mon meilleur ami me lance :
Lucas : "Tu crois que je n'ai rien remarqué ?"
Mon coeur s'arrête. Une fraction de seconde, je deviens toute rouge. Je suis ridicule. C'est trop. Beaucoup trop.

Juste un peu d'espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant