- Vous gagnez en popularité rapidement.

- Ai-je tant changé en quelques jours que je suis désormais digne d'intérêt ?

- Oh non, je vous ai simplement fait remarquer parce que Regnaudin vous a magnifiée.

- Je devrais donc vous remercier ?

- Remerciez plutôt Regnaudin.

- Je lui ai demandé de s'éloigner de moi quelques temps...

- Il ne savait comment attirer votre attention. Vous êtes jeune, belle, noble et en âge de vous marier tandis qu'il d'origine modeste. Sa seule possession de valeur est son art. De plus, toute la Cour sait que vous n'êtes, contrairement à vos amies, pas du genre à vous intéresser aux hommes.

- Il sait très bien qu'il ne se passera jamais rien entre nous deux.

- Vous préférez les hommes nobles, d'expérience, tels que moi ?

Il rit en demandant cela, vidant son verre au fond de sa gorge. Je l'observais un instant. Il était bien plus beau que Thomas, c'était un fait. Ils étaient tous les deux complètement différents. Cette fois-ci ce n'était pas comme lors de la danse, je n'étais plus si mal à l'aise aux côtés du vicomte. J'appréciais même sa compagnie. D'un autre côté, mes sentiments à l'égard de Thomas étaient dans le flou en ce moment...

- Vous avez réussi à « attirer mon attention » sans exposer mon corps nu à la Cour entière.

- Vous êtes bien difficile, et bien trop belle et délicate pour lui dans tous les cas.

- Croyez-vous que les hommes de votre genre sont à la hauteur de ma délicatesse ?

- Nous verrons bien, qui sait ?

Un silence s'installa entre nous. Ce n'était pas un silence pesant et dérangeant, nous avions tous les deux les yeux perdus dans le jardin. Le soleil était à son point le plus haut, il rayonnait sur nous et j'aurais dû porter un masque si j'avais été une courtisane modèle, pour éviter toute couleur sur ma peau.

- En quoi comptez-vous vous déguiser pour le bal ?, me demanda-t-il toujours les yeux dans le vide.

- C'est un secret !, lui répondis-je enjouée.

- Vous êtes adorable..., déclara-t-il dans un rire étouffé.

J'appréciais assez la conversation du vicomte. Malgré qu'on le dise goujat, il était drôle et charmant. J'avais l'impression qu'il ne me jugeait pas ou qu'il n'essayait même pas de me séduire. J'étais plutôt à l'aise également parce que nous étions à l'abri des regards. Dans ce type de moment, se révèlent le plus souvent les vrais visages.

- Comment me considérez-vous ?, lui demandai-je soudain en me tournant vers lui.

- Je ne sais... une amie, j'imagine. Et vous ?

- Un ami étrange, drôle mais étrange.

- Le beau est toujours étrange.

Il avait définitivement toujours le dernier mot. En même temps il n'avait pas à douter de sa beauté, la longueur de la liste de ses conquêtes n'en était qu'une preuve parmi tant d'autres.

- Aimeriez-vous ce soir m'accompagner dans une sortie nocturne ?

- Où donc ?

- Sur une petite hauteur de Versailles, vous verrez la beauté du château dans son intégralité. On ne connaît meilleure vue.

- Je ne sais... ce ne serait pas convenable.

Constance...Where stories live. Discover now