CHAPITRE 12 - ISAAC

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    Parfois on juge les gens trop vite, pensant tout savoir sur tout le monde. Lorsque l'on creuse, on se rend compte que notre jugement était infondé. On a tous un point de rupture plus ou moins compréhensible, un talon d'Achille, quelque chose qui nous est faible mais surtout propre. Cela peut être anodin comme une phobie, ou bien la perte d'un proche. Cela peut être le comportement de notre entourage ou le manque cruel d'attention. Tout peut jouer sur notre comportement, et tout mal être vient d'une erreur dans la matrice. Une chose qui n'aurai jamais dû se produire, quelque chose inattendu, imprévu.

    Pour moi, c'est le déclenchement du cancer de ma maman. La personne qui m'a toujours chéri, qui s'est toujours occupée de moi et de mes frères et sœurs. Et oui j'aurai pu profiter tellement plus de mes études si l'argent n'était pas un problème quotidien. Notre monde est un monde où l'argent est roi, c'est la seule monnaie d'échange, celle qui indique votre niveau d'étude, celle qui permet de sélectionner si une personne peut vivre ou mourir. Tout ce qui compte c'est l'argent. Et putain ce que c'est dommage.

    Quoiqu'il arrive, le cancer de ma mère a vraiment été un choc pour moi, plus que le reste de ma famille. En première année, j'etais déjà loin de la maison. J'avais l'impression de l'avoir abandonné. De lui être redevable. Alors je me suis mis à bossé comme un acharné pour aider ma famille et ne pas abandonner mes frères et sœurs que j'aime tant.

    — Oui je vois tout à fait. Tu n'as pas besoin de te dévaloriser par rapport à ça.
    — Je le fais avant que des mecs le fassent dans mon dos. Au moins, j'en ai conscience.
    — Ceux qui font ça sont seulement des connards, Lev.
    —- Tu vas me dire que toi et tes potes n'ont jamais critiqué une femme pour ses choix ?
    — Jamais, Maverick fait peut être des blagues à la con et perverses, mais il n'a jamais critiqué une seule femme pour ce qu'elle fait de son corps et son âme. Il se dispute toujours avec le coach et ses remarques sexistes d'ailleurs.
    — Mh, acquiesce-t-elle septique.

    Je me rapproche de Lev et pose mes mains sur ses hanches afin de la serrer contre moi, puis passe une main sur sa joue.

    — Tu crois ce que tu veux, mais tu n'as pas besoin de te rabaisser par rapport à tes choix précédents. On a parfois besoin de se chercher pour obtenir la meilleure version de nous même, et ça passe par des regrets. Mais il ne faut pas que ces regrets se basent sur l'opinion des autres, uniquement la tienne.

    Elle hoche la tête et je la relâche. Ses yeux d'un vert émeraude me scrutent et Lev me sourit tendrement avant de passer un bras sous le miens et de continuer de marcher vers notre destination finale. Je commence à comprendre comment elle fonctionne, essayant d'éviter un maximum la conversation.

    Que s'est-il passé pour que tu sois si détruite ?

    Son regard est fuyant alors qu'elle me parle de la pluie et du beau temps, je l'écoute tout de même attentivement. À mon tour ensuite de lui parler de mon cours, une fois terminé nous arrivons presque à la bibliothèque.

    — Tu ne veux pas être hockeyeur professionnel ?
    — Si, j'espère tellement que la NHL me repérera parce que je n'ai absolument aucune idée dans quel secteur en lettres m'orienter. Ça ne me passionne pas comme toi tu l'es par tes cours. Le hockey, c'est ça qui me fait vibrer.
    — Il n'y a pas de raison pour que tu ne sois pas répérer, t'es un joueur hors pair.
    — Tu ne m'as jamais regardé, je la taquine.
    — Je vais avoir toute l'occasion de te reluquer ce week-end !

    Nous rentrons à la bibliothèque et nous bossons nos cours à côté. Parfois elle a des questions et moi aussi, alors que nos cours n'ont aucune similitude. Je crois que nous soûlons les personnes autour de nous car elles nous regardent bizarrement, mais Lev n'y prête même pas attention. Je me rends compte qu'à force de la côtoyer, la chute sera terrible.
Tellement terrible.

PHŒNIX Where stories live. Discover now