Chapitre 6

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\\ TW : alcoolisme //

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- John... Qu'est-ce que tu fais...? On passe à table...

Je descends les escaliers. Mon père ouvre la bouche en "O" en me voyant. Trois mois que je n'ai pas porté de maquillage, trois mois qu'il est habitué à me voir aussi roux que l'était maman.

Il me détaille de la tête aux pieds. Remarquant mes bottes, il me demande d'une voix un peu tremblante :

- Tu sors ?

- Effectivement.

Il me sert dans ses bras. Je sens son souffle chaud sur le haut de mon crâne.

- Tu as de nouveau teint tes cheveux...?

- Il faut croire, réponds-je.

- Ce... Ce n'est pas moche.

Il se décolle un peu. Son haleine est encore chargée d'alcool.

- Papa... Tu as bu quoi ? l'interrogé-je en levant les yeux vers lui.

Ses iris vertes fuient les miennes.

- Trois fois rien, deux ou trois verres, rien d'autres.

- Papa...

Mon père pousse un soupir tremblant.

- Une petite bouteille de Whisky, rien qu'une.

- C'est déjà énorme ! m'exclamé-je.

- Tu ne devais pas sortir, toi ? me lâche-t-il d'un ton sec.

- Je venais te demander ton autori...

- Vas-y, me coupe-t-il. Ça nous fera du bien à tous les deux, aussi bien à toi qu'à moi.

- Promets-moi de pas trop boire.

- On verra...

Mes yeux s'emplissent de larmes.

- Papa... Promets-le moi. Je veux pas te retrouver ivre mort en rentrant.

Je sens à nouveau ses yeux fuir les miens. Ses mains s'approchent soudain de mes joues pour essuyer les larmes qui les dévalent.

- Où vas-tu ? me demande-t-il pour changer de sujet.

- Chez Eddy.

- Ses parents sont là, j'espère ?

- Oui, mens-je. Ils sont là.

Papa soupire à nouveau.

- Ok... Tu y restes toute la nuit ?

- Oui.

Mon cœur se serre. Avant la mort de maman, les discussions que j'avais avec mon père, bien que rares, étaient amusantes, et si peu formelles... Maintenant, quand nous parlons, ce n'est que pour prononcer des paroles essentielles. Plus de communication, rien.

- Tu as des affaires pour demain ?

Je lui montre le sac de sport négligemment balancé sur mon épaule.

-Oui. Et demain, on a pas cours. Sortie scolaire pour la classe en-dessous de la nôtre.

- D'accord... Alors, à demain...

- Oui.

Je lui tends mon téléphone et, après que ce dernier ait été déverrouillé, je sors de la maison. L'air frais de janvier me caresse le visage, et je retiens un frisson. Les températures du début de soirée m'ont manquées, même si elles ne sont pas les plus agréables possibles. C'est fou comme de si petites choses, auxquelles nous ne prêtions aucune sorte d'attention auparavant, peuvent nous procurer un plaisir indéfinissable quand on les retrouve après un certain temps.

Comme les lèvres d'Eddy.

Sentant mes joues rougir, et voulant faire passer cette gêne atroce, j'enfonce mes écouteurs dans mes oreilles et lance ma musique. Le froid me gelant les doigts, je m'empresse de ranger mon téléphone et de plonger mes mains dans mes poches. Je chantonne tout bas, sans pour autant le vouloir, les paroles à la si douce signification de Why don't you get a Job¹. Je ne songe alors plus qu'à la musique, mes jambes me menant d'elles-mêmes vers chez Eddy.

*

- Eddy... Éteins cette putain de musique. On en a marre de ton groupe... Ça, c'est de la vraie musique.

Aiden se lève et va retirer le disque qui tournait, avant d'en mettre un nouveau. Chez Eddy, c'est notre grande habitude : avant d'écouter une musique qu'Aiden a composé et de l'essayer, nous passons des disques. Aucun de nous, à part moi en fait, n'apprécie la musique qui sort d'autre chose que d'un tourne disque.

Eddy se lève, folle de rage, et coupe pour de bon la musique.

- Moi, j'en ai ras-le-bol de Nirvana !

- Pourtant, t'as trois CD d'eux dans ta bibliothèque...

Je souris en voyant Eddy devenir rouge de colère.

Cette fois, c'est Morgan qui se lève, et glisse un nouveau disque.

- Voilà, moi, j'ai quasiment jamais mon mot à dire quand il s'agit de la musique, alors pour une fois, je vais la choisir !

Personne n'ose plus rien dire. C'est vrai que Morgan n'a pas souvent le choix.

Adele croise les bras.

- Moi aussi, j'aimerais choisir un jour...

- Demain, ça te convient ? demandé-je.

Adele hausse les épaules.

- Très bien.

Nous sourions. Aiden me tend son carnet de brouillon, et l'ouvre à la bonne page.

- On a pas osé la mettre en voix, m'explique Eddy. Il nous fallait notre Billie Joe Armstrong...

- Notre Michael Jackson, rajoute Morgan.

- Notre Dexter Holland, me sourit Aiden, avant de se lever.

Il va ouvrir son ordinateur, et ouvre les bras dans un geste théâtral.

- Chers amis, je vous annonce avec certitude que le Problems' Club est cette fois-ci définitivement de retour !

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1. Why don't you get a Job : chanson de The Offspring, 1998. Ou pour faire encore plus simple, la chanson en média.

Problems' ClubWhere stories live. Discover now