☆ 𝒞𝒽𝒶𝓅. 10 : Sans rancœur ni regret

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𝑿𝑽𝑰𝒆 𝒔𝒊𝒆̀𝒄𝒍𝒆
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Les jardins du château n'avaient jamais cessé d'être entretenus depuis que la famille Bakugo était montée sur le trône de France, des décennies plus tôt. Soigneusement rafraîchis chaque semaine par une armée de jardiniers compétents, ils resplendissaient en permanence de mille couleurs et senteurs florales, diffusées par des plantes que l'on ne pouvait admirer nulle part ailleurs.

Ce matin-là, Katsuki décida de s'y promener sitôt éveillé. Il ne s'embarrassa d'aucune fioriture vestimentaire ni ne prit la peine de se coiffer convenablement, avant de rejoindre cet endroit merveilleux où les soucis du quotidien semblaient s'évaporer comme par magie.

En le parcourant sous le soleil de l'aube, il ne put s'empêcher de penser à Masaru : son père disait en effet qu'il n'y avait pas plus bel art que celui des fleurs. C'était lui qui avait initié ces aménagements des parterres, n'hésitant pas à faire appel aux meilleurs floriculteurs de sa cour. Grâce à leur savoir, le palais disposait d'allées paradisiaques au creux desquelles bon nombre d'histoires d'amour avaient – sans aucun doute – éclos...

« Katsuki? »

La voix féminine qui osait interrompre sa réflexion l'arrêta net. Ses poings se serrèrent quasi d'eux-mêmes, motivés par la colère sourde qui commençait déjà à s'étendre dans sa poitrine.

« Que voulez-vous, mère? » gronda-t-il sans pour autant se tourner vers sa génitrice.

« Simplement vous parler. » annonça-t-elle en le contournant afin de le confronter. « Je vous assure que mes intentions ne sont pas mauvaises. »

« Étonnant. Vous ne souhaitez pas que nous nous querellions aujourd'hui ; quel honneur! »

« Ne soyez pas si piquant! Je m'efforce de faire un pas vers vous, au cas où ce ne serait pas suffisamment clair. »

Mitsuki était, comme à l'accoutumée, habillée d'une de ses robes noires endeuillées. La chevelure cendrée qu'elle avait léguée à son fils était coiffée en un chignon sévère, duquel s'échappaient quelques mèches rebelles. Son regard carmin – également l'un de ses héritages – brillait quant à lui d'une sincérité telle qu'il ne put décemment l'ignorer.

« ... Je vous écoute. »

Les mots lui écorchèrent méchamment la langue. Il n'avait aucune envie de dialoguer avec elle, surtout en cet instant... Sa douleur s'étant quelque peu apaisée au contact des végétaux, il craignait qu'une énième dispute ne la ravive.

« J'aimerais d'abord vous remercier. » débuta Mitsuki en rejoignant un banc situé un peu plus loin.

« Je vous demande pardon? » s'étonna sa progéniture en suivant le mouvement sans s'en rendre compte.

Ils s'installèrent et, bercés par la douce brise traversant les arbrisseaux, ils sentirent leurs cœurs s'ouvrir.

« J'ai conscience du sacrifice immense auquel vous avez consenti en revenant parmi nous. » s'expliqua la Reine en scrutant le Prince sans faillir. « Nous en avons longuement discuté, Tsunagu, Eijiro et moi. »

« Vous, discuter avec mon écuyer? »

« Il est... possible, que je me sois remise en question à ce sujet. Notamment grâce à vous. »

Katsuki en resta bouche bée.

« Vous savez, j'ai vu votre évolution ces derniers mois. » poursuivit-elle. « Vous ressemblez de plus en plus à votre père. Lui aussi aimait se mêler au peuple, en apprendre davantage sur lui et, parfois, lui prêter main-forte en personne. C'est cette grandeur d'âme qui a fait de lui un si bon souverain. »

Elle soupira longuement puis baissa la tête, la gorge serrée par sa mémoire.

« N'en voulez pas à votre ami. Il m'a raconté quelques-unes de vos confessions, notamment celles en rapport avec votre... groupe? Vous avez aidé ces gens du futur à votre façon, les avez laissés entrouvrir les portes de votre vrai tempérament. Vous avez appris, peut-être sans vous en apercevoir, à ne plus considérer les autres comme vos inférieurs. »

« Où voulez-vous en venir? » l'interrogea enfin le plus jeune.

« Quand votre père est mort, j'ai choisi de vous inculquer des règles strictes. Je refusais que vous adoptiez son comportement, que vous suiviez ses traces. C'est sans doute la décision la plus égoïste de toute mon existence... Je la regrette amèrement désormais. »

« Pourquoi l'avoir prise, dans ce cas? »

« Masaru s'inquiétait si peu de lui-même... Il passait tant de temps à s'occuper des soucis d'autrui qu'il en a négligé sa propre vie... et sa famille. Je craignais que vous ne vous oubliiez en choisissant cette voie. »

« Et pourtant, vous–... »

« Oui. Je vous ai rabâché sans relâche vos devoirs royaux, votre supériorité, escomptant qu'ils vous détourneraient d'éventuelles relations... Je voulais que vous restiez à mes côtés, Katsuki. J'étais terrifiée à l'idée de vous perdre. »

Les deux paires de rubis se croisèrent à nouveau.

« J'ai été d'une bêtise ahurissante. J'étais tellement malheureuse et désespérée à cause de ma solitude que j'ai fini par vous enfermer dans une bulle toxique... Juste pour vous garder près de moi. »

« Mère, je–... »

« Je suis sincèrement désolée de vous avoir ainsi étouffé de mes peurs. Vous avez sacrifié un lien très précieux par ma faute. »

Alors, les larmes aux yeux, la femme la plus puissante du pays se rapprocha de son enfant et le prit dans ses bras. Elle le serra doucement, secouée de légers sanglots qu'elle ne chercha pas à lui cacher.

« Je veux que vous soyez heureux... Que vous puissiez devenir un artiste et vivre de vos passions... Je ne souhaite rien de plus que réparer mes erreurs. »

Elle s'éloigna de quelques centimètres et, sans hésiter, posa son front contre le sien.

« Tsunagu est certain qu'un dernier voyage temporel est possible. » chuchota-t-elle. « Rejoignez votre aimé, mon fils. »

« Je ne peux pas abandonner le trône... » rétorqua celui-ci sur le même ton.

« Vous le pouvez. Je trouverai un nouvel héritier. »

« Non, je ne vous laisserai pas endosser mes responsabilités. »

« C'est donc pour cela que vous êtes revenu? »

« Évidemment. Aussi incroyable que cela puisse paraître, je... »

Le jeune homme prit une grande inspiration, rougissant.

« Je vous aime, maman. Vous m'insupportez en tant que régente, mais l'affection que vous me portez malgré mon caractère ne m'a jamais fait défaut. »

Il posa ensuite ses paumes tremblantes sur ses épaules. Il savait qu'il ne pourrait plus lui en vouloir, pas alors qu'il s'était lui-même mal comporté envers tant d'individus au cours de son existence...

« Vous avez beau être la Reine Mère, vous avez agi telle une... humaine brisée par la perte de son époux. Je vous pardonne, sans rancœur ni regret. »


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Prince des Temps || 𝐵𝑎𝑘𝑢𝐷𝑒𝑘𝑢Where stories live. Discover now