SMS Détresse

Foutues vitres ➖14

     Ma plaie à la cuisse s'est refermée en quelques jours, heureusement. Je ne me scarifierai plus jamais, parce que ça ne m'a apporté aucune forme de soulagement. Au contraire, je me suis senti encore plus désespéré, et la douleur physique s'est ajoutée à ma charge mentale.
J'ai vite remis la lame à sa place et j'ai du attendre de retourner au lycée pour demander un pensement à l'infirmière, afin de ne pas éveiller les soupçons au Foyer, et, à la place de la scarification, je me suis mis à fumer, avec Kalvin.
C'est dégueulasse, mais ça détend.
On escalade la façade qui mène au toit, et on parle, les yeux vers l'horizon.

     Il me demande des conseils pour renforcer sa relation avec Skylar, et je lui réponds machinalement, comme si ça ne me touchait pas. Alors mon cœur se serre à chaque fois qu'il s'assoit à côté de lui, en cours.
Je lui ai laissé ma place, parce qu'il me l'a demandé, et le rouquin n'a pas objecté, alors pourquoi aurais-je refusé ?
Je les regarde bavarder, et mon sentiment de solitude croît chaque jour.

    « Lenny ! On est là ! s'écrie Eve, en agitant la main. Je pose mon plateau à sa table et salue les trois gars qui l'accompagnent.
— C'est meilleur qu'hier !
— On peut difficilement faire pire, en même temps. »
La belle asiatique glousse en salant sa purée.
Je jette un œil vers la table de Kalvin, qu'il partage avec Skylar, Nolan et Hakim.

Ils forment un beau groupe, tous les quatre.
Ils sont allés au collège ensemble et passent leur temps à se remémorer leurs bons moments.
C'est d'ailleurs pour ça que je ne mange plus avec eux. Je me sens de trop, comme une pièce-rattachée qui tente de se greffer à un ensemble déjà complet.

     Cette décision m'a permis de me rapprocher d'Ève, qui m'a immédiatement intégré à son groupe.
Même si elle a l'air hautaine et un peu trop sûre d'elle, c'est une fille gentille qui s'arme, comme elle peut, contre les mecs qui lui tournent constamment autour. Elle apprécie leur compagnie, qui est plus saine que celle des autres filles, mais ne manque jamais de se faire respecter quand ils dépassent les bornes. C'est une fille bien, et je comprends pourquoi Marwa et Imane véhiculent des rumeurs sur elle. Malheureusement pour ces garces, leur jalousie la rend encore plus belle.

    « Eh ! T'es dans la Lune, là ! s'exclame Ève en agitant la main devant moi. Tu crois que tu peux convaincre le directeur de ton Foyer ou pas ?
— Le convaincre de quoi ?
— Mais t'as vraiment rien écouté ? T'es chiant ! Je disais que ce serait cool que je puisse sensibiliser les enfants pendant la fête d'Old-Town ! Tu sais...Pour l'association de ma sœur ?
— Comment t'es au courant ?
— Kalvin me paye l'entrée, pour se faire pardonner d'avoir volé mes affaires de sport !
— Oh, je vois. Alors, on peut acheter ton pardon avec cinq euros ? C'est bon à savoir.
Elle me tape amicalement l'épaule, en s'offusquant faussement, me faisant pouffer du nez.
— Alors ? Tu vas lui en parler ou pas ? me sourit-elle, la main sur ma cuisse.
— Tu n'as pas besoin de me tripoter pour obtenir mon aide.
— Ça n'a pas l'air de te déranger tant que ça ! Comme quand je t'ai palpé les poches de derrière !
Je saisis sa cuisse, sous sa mini-jupe, la faisant sursauter, puis rétorque, taquin :
    Et toi, ça ne te dérange pas ?
Ses yeux noirs s'ouvrent en grand puis elle détourne le regard, sans pour autant repousser ma main.
— T'es toute rouge ! glousse Gabriel, un morceau de pain dans la bouche. T'as enfin craqué pour un gars, ça y est ?
— La ferme ! crache Ève, les joues roses. Occupe-toi de ta pétasse avant de t'intéresser à mes affaires ! »
Le rire communicatif de Rachid nous rend hilares, comme les tables voisines.

TUT TUT

06 14 XX XX XX :
Ça fait 4 jours que tu ne réponds plus à mes messages...🙁