SMS Détresse

Première conversation normale ➖01

06 14 XX XX XX :
PQ
Dentifrice
!! COCA !! (NE PAS OUBLIER)
Pizzas
Frites au four
Fricandelles
2/3 Plats préparés
Sandwichs triangle
Filet américain
Pain
Glaces fusée
Carambars au nougat

Moi :
Quelle alimentation...
Tu dois être obèse.

06 14 XX XX XX :
OMG ! 😨 Ce numéro est utilisé ?!

Moi :
Faut croire.

06 14 XX XX XX :
Ça fait bientôt un an que je vous envoie mes courses et vous ne m'aviez jamais répondu !Donc je croyais que ce numéro n'était pas attribué...😅

Moi :
Tu ne peux pas utiliser « Notes »,
comme tout le monde ?

06 14 XX XX XX :
Je devrais, oui ! 😅 Mais je n'arrive pas à me défaire de cette mauvaise habitude ! 🥲

Moi :
Visiblement, tu en as d'autres,
des mauvaises habitudes.
A commencer par ton alimentation.
Je n'imagine même pas ton taux de cholestérol.

06 14 XX XX XX :
J'en suis bien conscient, mais je n'ai pas le temps de me préparer à manger ! 😣 Alors j'opte pour des choses qui vont vite ! Mais j'essaierai d'y remédier quand je pourrai ! Sur ce, je suis désolé de vous avoir importuné avec mes nombreuses listes de courses et vous souhaite une bonne journée ! 😊😊😊

Qui aurait cru que ma première conversation normale serait celle-ci ? Avec un parfait inconnu qui m'a pris pour son bloc-notes pendant que j'étais dans le coma ?
J'ai reçu de nombreux messages de ma famille et de mes amis, censés me faire sourire à mon réveil, mais leurs mots ne font que me rappeler ce qui m'est arrivé. Je peux facilement imaginer le ton de leur voix, plein de compassion et de tristesse, et le regard désolé qu'ils posent sur moi.
Mais je ne veux pas de cette empathie,
je suis en colère.
J'en veux au monde entier pour cette vie de merde qui empire chaque année.

« Lenny ? Est-ce que tu peux nous raconter ce qu'il s'est passé, le 14 février 2022 ?
— Je n'ai pas envie...Foutez-moi la paix. »

Les flics rappliquent toujours après les drames, quand c'est trop tard. Je n'ai aucune envie de leur parler, ne sachant pas s'ils sont de mon côté ou de celui de ce sale con.

« Comment c'est possible que vous vous pointiez avant ma mère ? Appelez-la.
Les deux policiers se regardent, visiblement surpris par ma demande.
— Ça ne va pas être possible.
— Hein ? Je suis mineur. Vous savez très bien que vous n'avez pas le droit de m'interroger sans la présence de mes parents, donc faîtes venir ma mère.
Une lueur change dans leur regard.
Une lueur que je ne connais que trop bien.
— Vous êtes sourds ou quoi ?
— Je suis désolé de te l'apprendre mais...Ta mère et ta sœur ont été agressées par un cambrioleur et...Ta mère n'a pas survécu à ses blessures.
Je pouffe d'un rire jaune, en les fixant, mais leur silence me fait soudainement réaliser ce que je viens d'entendre, et j'explose.
— Ma mère est morte ?! cris-je en arrachant mon cathéter.
Le plus dodu alerte le personnel soignant, pendant que l'autre tente de me contenir :
— Lenny ! Je suis désolé !
— Je m'en bats les couilles que vous soyez désolés ! Où est-ce que vous étiez, hein ?! À quoi vous servez ?! Je veux la voir ! »
Je hurle à m'en déchirer la voix, et me débats de toutes mes forces, incapable de réfréner ma rage, quand une l'infirmière parvient à me faire une injection. Le médecin qui l'accompagne gronde les policiers :
« Vous auriez pu attendre quelques jours ! Il n'est même pas réveillé depuis deux heures !
— Oui, c'était trop tôt, soupire le plus grand, mais nous avons absolument besoin de son témoignage pour identifier ses agresseurs au plus vite. Ils pourraient être mêlés à d'autres cas similaires.
Leurs voix me paraissent lointaines, leurs contours s'estompent peu à peu et ma vision se floute, en même temps que mes paupières s'alourdissent, mais je bredouille faiblement :