Chapitre 2 (réécrit)

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24 juillet 1942

Une nouvelle fois, je n'ai pas le cœur à fêter mon anniversaire. Il y a une semaine, le 16 juillet à Paris des policiers et des gendarmes français ont commis un acte répugnant et abject : une rafle, une arrestation massive de Juifs. Jusqu'à présent elles étaient organisées par les Allemands, c'est ce que mon père m'avait expliqué, mais cette fois ce sont des citoyens français qui collaborent avec l'ennemi qui sont à leur tour passé à l'action.

Mon père dit que la réalité de la guerre est bien souvent tronquée dans les journaux : il a donc recherché des informations via ses propres canaux et il a pu me dire que plus de 10 000 Juifs ont été arrêtés : des hommes, des femmes mais aussi des enfants qui ont dû rester plusieurs jours enfermés dans le Vélodrome d'Hiver de Paris sans nourriture.

Naturellement, certains ont tenté de s'enfuir mais ils ont été fusillés immédiatement. D'autres ne supportant pas cet emprisonnement, se sont suicidés.

C'est affreux. Je ne comprends pas comment il est possible d'être aussi barbare : ces policiers doivent certainement avoir une famille, des enfants. Comment peuvent-ils traiter d'autres êtres humains comme des animaux ? Et surtout, comment peuvent-ils collaborer et soutenir les Allemands ?

C'est injuste. Lorsque je fais part de mes réflexions à mon père, il me répond que je suis trop jeune pour comprendre.

Hier soir, je lui ai demandé s'il savait où étaient ensuite envoyés tous ces gens victimes des rafles. Avec toutes les arrestations qui ont eu lieu depuis le début de la guerre, je me demande franchement s'il y a encore de la place dans les prisons françaises et allemandes.

Mon père n'avait pas répondu immédiatement à ma question : il m'avait amené près de lui, m'avait pris les mains et m'avait regardé d'un air grave.

Te rappelle tu notre conversation au printemps dernier, au sujet d'Esther et de sa famille ? Selon les rumeurs actuelles, les Boches de se sont pas contentés de créer des camps en Pologne et en Allemagne. Il y en a aussi en France.

J'avais dévisagé mon père horrifiée et la phrase qu'il avait prononcée lors de cette fameuse discussion il y a quatre mois m'était brusquement revenue en mémoire.

Je ne pense pas qu'ils reviendront Anna. Ils ne vont pas en prison.

Tous ces gens ne reverront jamais leur famille, leur amis, leur maison. Tous ces gens vont mourir.


20 août 1942

Nous avons appris par la radio que les Alliés ont tenté de débarquer à Dieppe hier mais cela n'a pas marché et une nouvelle fois je suis déçue tant j'aspire à retrouver enfin ma liberté

Cette tentative de débarquement a coûté la vie à plus de 3000 soldats français, américains, canadiens et britanniques.

Naturellement les Allemands sont très fiers de ce carnage et ils s'en vantent.

Ce matin, j'ai accompagné ma mère à la Kommandantur car elle devait signer un papier relatif aux vivres que nous sommes obligés de fournir et les soldats allemands n'ont pas arrêté de nous narguer. Il y en a même un qui n'a pas cessé de nous reluquer ma mère et moi. Sur le chemin du retour, je ne cesse de dire à ma mère que je déteste la guerre et les Allemands.

Ce soir, je profite de la présence de mon père pour évoquer avec lui l'échec du débarquement de Dieppe : il est convaincu qu'il s'agissait d'un test et que les Alliés tenteront encore de débarquer en France.

Les larmes d'Auschwitz {Tome 1 et 2 publiés  chez Poussière de Lune Édition }Where stories live. Discover now