Chrysalid - 3

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Le Châtiment

Lorsque je repris connaissance, j'étais attaché par des sangles de cuir à la même planche que ma proie, en face d'elle, dans la même Chapelle. Nous étions séparés par à peine dix mètres remplis d'une assemblée de fanatiques.

Un prêtre se trouvait juste devant moi. Il m'étudiait, avec un sourire aliéné sur le visage. Ce n'était pas tant de la haine qu'il éprouvait, au gré de sa folie, plutôt de la satisfaction. Pour quelle raison exactement, je l'ignorais. Je ne le connaissais même pas.

J'avais encore des éclairs aveuglants qui me vrillaient le cerveau, remplissant de manière chaotique mon environnement d'un déferlement de lumière. Entre les flashs, je voyais qu'ils avaient interrompu la torture de la Nymphe pour commencer à la dépouiller des extraits de diamants qui parsemaient sa peau blanche et lisse.

Ils travaillaient prudemment, avec concentration. Cette tâche allait leur prendre des heures. Je voyais dans les yeux de la Nymphe combien elle souffrait. Seul sa vitalité intrinsèque la raccrochait à la vie.

Refusant cette fin, je tentai de rompre mes sangles, de m'échapper, pour achever le job commencé. Mais ma force semblait m'avoir quittée. Je compris qu'ils m'avaient drogué, afin que je ne cause plus d'ennuis.

Le prêtre qui me faisait face fut rejoint par une autre, une prêtresse, au regard tout aussi illuminé. Elle tenait un scalpel dans les mains.

- Des flashs, c'est ça, hein... me dit-elle. T'es pas le premier... Sois sans crainte, on va te soigner.

Elle approcha le scalpel de mon crâne, en m'étudiant avec curiosité. Je compris qu'ils allaient m'opérer, me charcuter en réalité, mais pour eux, c'était de la curiosité médicale.

Tu n'es pas le premier, avait-elle dit. C'est vrai que j'avais commis l'erreur de parler de mes flashs aux prêtres, une fois, même si ensuite j'avais obstinément refusé qu'ils m'emmènent dans leur Chapelle, soi-disant pour me guérir. De fait, ils savaient pour moi, et d'autres survivants avaient eu la mauvaise idée de demander de l'aide. Si ces imprudents n'étaient pas aussi robustes et utiles que moi à la société, sûrement qu'ils étaient devenus les hôtes éphémères des démiurges.

Pour ma part, je n'avais aucun doute sur le sort qu'il leur était advenu.

- C'est neuronal, me dit la "chirurgienne" en montrant un gros livre ancien, au titre incompréhensible, écorné, déposé sur une tablette roulante qu'elle emportait avec elle. T'inquiète pas, on va te soigner.

Je ne savais pas lire, j'ignorais ce qui était écrit. A vrai dire, j'ignorais même si la prêtresse elle-même savait lire. Peu de gens savaient faire ça, ce n'était pas utile.

- Évidemment, il aurait fallu un IRM ! s'exclama-t-elle encore avec une joie palpable dans les yeux. Mais le nôtre ne marche pas !

Elle désignait en ricanant nerveusement une sorte de vieil appareil électrique, rectangulaire, de petite taille, pourvu d'une paroi vitrée.

Puis brusquement, elle cessa de rire. Les scalpels se rapprochèrent de mon visage. Je sentis la lame fine effleurer mon crâne.

Avant de pénétrer à l'intérieur.

C'est alors que le CRI se fit entendre.

Ce cri là, ce n'était pas un cri comme les autres... Non, oh non. Peu de survivants le connaissaient, mais moi oui. A ce moment, quelque part, je crois que je bénis ce qui me restait de Dieux. Je n'allais pas finir charcuté par des démiurges, merci. Nous allions juste tous périr de la main vengeresse de celui qui arrivait.

Voyages oniriques : nouvelles de Science-fictionWhere stories live. Discover now