Chapitre 12

691 113 3
                                    

Avec un gémissement horrifié, Drago posa finalement une main sur la joue glacée de Harry et murmura son prénom d'une voix éraillée, essayant de repousser la panique qui cherchait à s'infiltrer en lui.

Oubliant le froid et l'humidité, Drago se pencha vers lui, essayant de sentir la respiration du jeune homme. N'importe quel signe pouvait indiquer qu'il était en vie... et qu'il ne se tenait pas au-dessus d'un cadavre.

Il eut l'impression de rester des heures en équilibre, penché dans cette position inconfortable à guetter le moindre souffle, le moindre mouvement. Il n'osait plus respirer et son cœur battait dans sa cage thoracique avec force, comme s'il essayait de jaillir de sa poitrine.

Finalement, il eut la sensation d'une faible expiration, à peine perceptible. Il refusa d'envisager qu'il puisse être trompé par ses sens, préférant décider que Harry était encore vivant et qu'il irait bien.

Il l'avait trouvé à temps. Il pouvait le sauver.

C'était ce qu'il se répétait en boucle alors qu'il déboutonnait fébrilement la cape qui le couvrait de ses doigts gourds, puis qu'il l'ôtait. Il hésita un bref instant et il redressa Harry avec douceur pour lui ôter rapidement le sweat trempé qu'il portait et l'enrouler dans le vêtement épais et chaud.

Il préféra ignorer ce qu'il avait vu brièvement du torse de Harry, prouvant qu'il avait maigri bien plus que ne le laissaient voir ses vêtements. Ce n'était plus le jeune homme en pleine santé qu'il avait quitté six mois plus tôt. Il n'avait plus que la peau sur les os, oubliant probablement de manger si personne n'était là pour le lui rappeler.

Cette fois, Drago ne put repousser la vague de culpabilité qui le submergea. Il se traita d'idiot, regrettant d'avoir été si têtu. Il y avait probablement une autre façon de procéder, que de les détruire tous les deux ? Il aurait dû le surveiller, faire quelque chose. N'importe quoi.

Cependant, il repoussa toutes ces pensées puisque la seule chose qui importait était de secourir Harry. Il aurait le temps ensuite de culpabiliser pour le reste de sa vie...

Drago ne put pas lâcher Harry. Il le gardait contre lui, frissonnant contre la peau glacée et espérant lui transmettre le peu de chaleur corporelle qu'il gardait encore.

Il l'appela, essayant d'attirer son attention, espérant qu'il n'était pas trop tard... et il réprima à peine un sanglot en n'obtenant pas la moindre réaction.

Il frotta doucement le dos de Harry en le maintenant fermement contre lui, ignorant à quel point il avait froid. L'humidité transperçait jusqu'à ses os, mais il n'osait pas le lâcher, comme s'il risquait de disparaître une fois de plus juste sous ses yeux.

Un bref gémissement étouffé de Harry lui permit de revenir au moment présent et Drago repoussa la panique qui le faisait presque haleter, s'obligeant à réfléchir logiquement et à ignorer les battements anarchiques de son cœur.

Il raffermit sa prise sur le corps de Harry et tira sa baguette de sa manche, puis il jeta un sort de chaleur autour d'eux. Il se détendit légèrement et il se redressa, tirant le corps de Harry contre lui.

D'un autre sort, il le fit léviter pour le transporter, sans lâcher sa main. Il se pencha vers le corps inerte, hésitant un bref instant avant de déposer un léger baiser sur les lèvres bleues et glacées.

— Accroche-toi, Potter.

Il eut l'impression que ses mots avaient fait réagir Harry, juste un bref mouvement oculaire, et il s'accrocha à cette idée. Harry irait bien. Il irait le traquer jusque dans son esprit de Gryffondor borné s'il le fallait, mais il s'assurerait qu'il survive à cette journée.

À petits pas hésitants, sans lâcher Harry bien que la magie soit assez puissante pour le faire léviter sans aide humaine, Drago se dirigea vers la petite maison toute proche.

Il entendait encore par intermittence les cris des amis de Harry l'appelant, mais il ne voulait pas les prévenir. Pas encore. Pour l'instant, Harry était encore à lui, et à lui seul.

Plutôt que d'explorer la maison pour trouver une chambre, il déposa Harry aussi près de la cheminée qu'il l'osait en espérant que Ron n'ait pas demandé à sa famille de débarquer.

Ignorant ses propres frissons et ses doigts qui le brûlaient d'avoir été exposés au froid glacial puis de revenir à la chaleur, Drago lança un accio pour attirer à lui autant de couvertures que possible et il enroula le jeune homme dedans, essayant de le réchauffer doucement.

Drago entendit la porte s'ouvrir et se refermer dans son dos, mais il l'ignora, continuant d'essayer de réveiller Harry, marmonnant à son intention sans même s'en rendre compte.

Il le houspillait pour qu'il se réveille, il se reprochait son départ et il lui en voulait de ne jamais avoir pris la peine de venir le chercher. Il déversait enfin tout ce qu'il avait sur le cœur, tout ce qu'il avait gardé en lui sans jamais en parler.

Hermione s'approcha avec une épaisse couverture supplémentaire, mais elle ne lui fit pas la moindre remarque. Elle déposa juste le plaid sur Harry sans un mot, avant de s'éloigner pour aller en chercher un second, tout aussi épais et chaud, qu'elle drapa sur les épaules de Drago.

Cette sollicitude toucha Drago et il leva des yeux pleins de larmes vers elle.

— C'est de ma faute...

Les larmes aux yeux elle aussi, Hermione secoua la tête en signe de dénégation, mais ce fut Ron qui prit la parole, quelque part derrière lui.

— Pas vraiment, Malefoy. Harry a un certain nombre de problèmes et il est trop borné pour le reconnaître.

Drago déglutit, mal à l'aise.

— Il allait mieux. Quand... on était ensemble. Il allait beaucoup mieux. Il avait plein de projets, il n'avait plus ces horribles cauchemars...

Hermione soupira et lui adressa un sourire tremblant.

— Harry a toujours été doué pour cacher ce qui n'allait pas. Ta présence l'a aidé, Drago, mais ce n'était pas assez pour qu'il soit totalement guéri. Loin de là. Ça aurait fini par arriver, un jour ou l'autre.

Drago fronça les sourcils et passa la main dans les cheveux de Harry, notant avec soulagement que ses lèvres étaient déjà moins bleues et que ses joues reprenaient doucement des couleurs. Après un quelques secondes, il reprit, d'un ton plus sec qu'il ne le voulait.

— Guéri de quoi ?

Cœurs brisésWhere stories live. Discover now