chapitre quatorze

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Améthyste s'allume une nouvelle cigarette face à la tombe. Il n'y a qu'une vulgaire croix en pierre plantée au milieu de cette petite parcelle de graviers blancs , délimitée par du bois paysager. Des mauvaises herbes ont poussé au milieu des graviers et Charles se penche pour en arracher plusieurs touffes d'une poignée de main, déblayant la parcelle.

- C'est même pas une vraie tombe, il n'y a même pas de pierre, c'est juste de la terre, souffle-t-elle les yeux rivés sur les écriteaux. Je suis venue qu'une fois avant aujourd'hui, une fois putain...

Charles acquiesce, il était venu avec elle mais il n'avait pas passé l'entrée du cimetière, la laissant seule comme Améthyste l'avait demandé. C'était il y a six ans désormais et depuis les fleurs ont fanées et il a été obligé de les jeter sous les yeux noisettes de la métisse.

- J'crois pas que c'était un accident, Charles. J'crois qu'elle a voulu se foutre en l'air avec nous comme si elle avait le droit de décider de notre sort, murmure-t-elle.

Elle déglutit difficilement en proie à des souvenirs lointains. Ceux d'une nuit glaciale de décembre où elle aurait aimé ne jamais quitter cette voiture, rester coincee dans l'enchevêtrement de ferrailles de l'habitacle.

C'est pour ça qu'elle ne regarde jamais les courses.

C'est pour ça qu'elle ne prend pas l'autoroute.

Charles sait tout ça, il a fait les liens tout seul avec les choses qu'elle ne fait jamais à cause d'une enfance tourmentée, agrémentée de changements. Il ne sait pas ce que ça fait d'être ballottée d'une famille d'accueil à une autre, il ne peut que seulement l'imaginer.

La délivrance d'être arrivée à bon port, loin de la négligence, sur la principauté et ses abords rocheux.

Améthyste écrase sa cigarette sous sa semelle mauve ornementée de fleurs. Elle aurait dû en ramener pour les poser sur cette tombe, pour tenter d'avoir un peu plus de respect. Ça aurait pu être la sienne et celle de sa sœur. Leur miraculeuse hécatombe.

- Il a demandé une reprise de contact au Centre jeunesse de la Côte d'Azur, murmure-t-elle. Il s'est pointé comme ça.

- Comment ça se fait ?

- Normalement, le centre communique les demandes de contact et on doit avoir le choix, celui d'accepter, celui d'accepter avec conditions ou refuser d'entrer en contact, reprend Améthyste d'une voix éraillée. C'est Ambre.

Charles fronce les sourcils n'étant pas sûre de tout comprendre. Il constate que les doigts de la métisse tremble fébrilement quand elle cherche à allumer une autre clope Elle s'agace rapidement et le pilote est obligé de poser ses mains sur les siennes, pour l'aider à maintenir la flamme du briquet sur l'extrémité de la cigarette.

- Elle a déposé un accord le jour de ses dix-huit ans, un accord positif pour communiquer notre adresse en cas de reprise de contact venant de lui.

Ame aspire une autre bouffée d'air néfaste et son regard meurtri croise celui du monégasque. Il n'y a plus aucune émotions dans ses prunelles noisettes, seules les larmes dévalant ses joues quand elle murmure d'une voix affaiblie :

- Elle ne m'a rien dit.

Améthyste savait. Elle savait que sa sœur souhaitait retrouver son père mais elle ne s'imaginait pas que cette dernière avait fait les démarches sans son accord.

- Il a cru que je fêtais mes vingt-deux ans cette année et que Ambre venait d'avoir la majorité, souffle-t-elle. Il devait attendre notre majorité à toutes les deux, et il s'est trompé de deux ans. Il se souvient même pas de notre année de naissance.

Améthyste pleure désormais, sa poitrine se soulève douloureusement et elle se blottit dans les bras du pilote. Ame ressent une profond amertume pour sa petite sœur. Elle a toujours cru qu'elles étaient deux à se comprendre suffisamment, qu'elles se respectaient assez pour se dire la vérité.

Améthyste a laissé tomber le temps des mensonges depuis longtemps, depuis qu'elle est passée devant bien trop de psychologues pour réussir à les compter sur les doigts des deux mains. La métisse a toujours dit qu'elle ne souhaitait jamais revoir leur géniteur même dans ses pires cauchemars.

C'était la vérité, celle que Ambre n'a pas écouté en signant des papiers, celle qu'elle a écarté d'un geste de main et c'est celle qui pousse Améthyste à déclarer :

- Je ne lui pardonnerai jamais.

Et Charles déglutit difficilement sous le poids d'un secret, qu'il espère bien garder.

Et Charles déglutit difficilement sous le poids d'un secret, qu'il espère bien garder

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NÉGLIGENCE » Charles Leclerc ✓Where stories live. Discover now