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Et Améthyste croit Charles et ses promesses. Elle a confiance en lui, assez pour rester dans ses bras sans avoir conscience du temps défilant sous ses yeux embués de larmes. Elle se sent en sécurité, un peu aimée, un peu moins désabusée par le vide saisissant sa poitrine.
- On décalle ? murmure-t-il au creux de son oreille.
Ame acquiesce d'un petit mouvement de la tête, se laissant entraîner par le monégasque. Elle le laisse lier ses doigts aux siens pour traverser le tumulte de l'intérieur de la soirée. Elle l'observe saluer quelques uns de leurs amis, il ne s'excuse pas se contentant de garder Améthyste près de lui, sans aucune honte, malgré que la nature de leur relation soit inconnue.
Ambre sait.
Viviane sait.
Ludovic sait.
Ils n'ont jamais rien dit, comme la majorité de leurs amis sur la principauté, ne posant aucune question au pilote de la Scuderia, ni à Améthyste et son air morose.
Charles l'emmène sur la plage plongée dans l'obscurité, seuls quelques navires brillent au loin, les seuls témoins de leur amour instable.
Ils ne disent rien, confrontés à des souvenirs lointains. Elle tire une autre cigarette de sa poche tout en fixant l'écume se formant sur l'interface entre la mer méditerranéenne et le sable, l'eau se retire un peu plus, laissant des traînées blanchâtres sur son passage.
Contrairement à la métisse, les yeux de Charles fixent imprudemment la jeune femme à ses côtés. Rien que la manière dont elle tient cette clope entre son pouce et son index le rend dingue. Il ne se retient pas de la détailler, aimant observer son visage, il passe une main dans ses cheveux tressées tandis qu'elle expire une taffe de cigarette.
- Parfois, je sais plus si mes souvenirs sont vrais, murmure-t-elle d'une voix tremblante. Ça s'efface un peu, ça devient flou comme si je sortais d'une douche et que le miroir était recouvert de buée et ça m'énerve. J'ai l'impression que tout sort de mon imagination et que rien ne s'est passé...
Elle s'arrête pour se tourner vers lui, l'observant de ses yeux noisettes. Améthyste est tellement banale et si bancale que ça en devient paradoxal.
- Et dans toute cette réalité, j'ai des images qui se rajoutent et je ne sais pas dire si elles sont des souvenirs ou non, murmure-t-elle.
- Si seulement les mauvais souvenirs s'effaçaient, rajoute Charles.
Et Améthyste sait qu'il a compris ce qu'elle ressent quand elle rajoute doucement :
- Si mon père se pointe un jour, je suis même pas sûre de le reconnaître. Son visage se déforme au fur et à mesure, je crois que je commence à oublier à quoi il ressemblait.
- J'oublie le son de la voix du mien, avoue Charles avec un pincement au cœur. Et si ça fait longtemps que j'ai pas vu une photographie, j'ai du mal à me remémorer son visage.
- C'est normal alors ? s'enquiert-elle de demander.
Charles hoche la tête en passant un bras autour de ses épaules pour l'attirer contre lui. Ame se laisser aller et pose sa tête dans le creux de son cou, la chaleur de ses bras réchauffent immédiatement son corps tremblant.
Elle expire une nouvelle bouffée d'air néfaste, en prenant bien soin que Charles n'inhale aucune particule de nicotine. Elle se fait du mal depuis des années avec toute cette toxicité.
- J'espère qu'il reviendra jamais, dit-elle soudainement. Ambre imagine qu'il est parfait, ça lui briserait le cœur.
- Ça reste son père même si elle ne s'en souvient pas et je pense que c'est tout autant dur de ne pas s'en souvenir.
Améthyste hausse les épaules, dubitative. Elle aimerait oublier et être comme sa sœur, ne rien connaître de ses origines, ça lui éviterait de trop réfléchir.
- Elle est plus avec Léo, ajoute-t-elle.
- Je sais.
- Comment ?
- Viviane l'a dit à ma mère, répond Charles en embrassant son front.
Il n'a pas employé le mot, il ne l'emploi jamais quand cela concerne ses parents adoptifs et Améthyste lui est reconnaissant pour ça. En quatorze ans, elle n'est toujours pas prête à utiliser.
Elle ne le sera sans doute jamais.
A la place, elle laisse ses lèvres glisser sur celles du brun dans un soupir de soulagement. Charles sait que c'est une de ses manières de le remercier d'être à ses côtés. Il répond à son baiser sous la plage ensoleillée, en tentant d'oublier, lui aussi, que tout n'est qu'éphémère et qu'il se réveillera avec ce goût amer sur les lèvres.
Celui de la nicotine et d'Améthyste.
Il se perd encore dans ses yeux noisettes. Elle est tellement jolie même si il sait que ça ne durera qu'une nuit. Si il pouvait, il retournerait le sablier des millions de fois pour que les grains ne s'arrêtent jamais de tomber et qu'elle puisse continuer de le regarder comme elle le fait.
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