Chapitre 7

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Bouillonnant de rage, Ben restait en retrait, discutant avec lui-même. Ses premières impressions étaient réelles. Ils n'allaient pas s'entendre. Elle discutait avec Johanna et Hermann, et subitement, Ben se rappela la mission. C'est donc avec peu d'envie qu'il marcha vers les trois personnes et afficha un sourire béat.

Aliénor dit.

— Voilà qu'Armin revient enfin ! Laissons-les entre hommes, accompagnez-moi au buffet Johanna. Propose Aliénor avec un sourire aimable.

La rousse accepta volontiers, laissant Ben et Hermann seuls pour prendre le bras de la burne. Un silence, contraire à leurs anciennes discussions, surplombait l'ambiance. Hermann fut le premier à parler.

— Que ma femme ne soit jamais au courant de tout ça. Déclare-t-il sans lui adresser un regard. Il semblait préférer la foule de gens.

Ben fit un simple « oui », et attendit la suite.

— Dites à Luna de revenir au dîner, dans deux jours. Je vous fournirai les invitations pour le 25 aout.

— Très bien, merci Van Der Lind. Hermann se retourna vers Ben et sourit.

— Vous n'êtes pas français.

Ben fit non de la tête. L'allemand rit et remarqua.

— Vous avez un parfait accent allemand. Mais j'imagine que vous êtes Américain. Sur certaines prononciations, qu'un expert pourrait vous démasquer.

— Et vous venez de le faire ? Demanda Ben en souriant.

— Exactement ! Ris Hermann.

Ben lui aussi accompagna son rire.

— Vous êtes bien le seul allemand que j'apprécie légèrement. Enfin, l'un des seuls. ... La soirée fut finie, Aliénor attendit la voiture, Ben à sa droite.

— Quoi ? S'énerve-t-elle alors qu'il la fixait s'impatienter de la venue de Vivi.

Il ne répondit que par un silence glaçant. Aliénor fixa le sol, reprenant un calme olympien. Il avait peut-être tort, mais devait avoir ses raisons. Elle ne savait pas ce qu'il avait vécu lui. Elle ouvrit la bouche, comme pour prononcer des excuses. Mais se ravisa. " Pourquoi lui donnerais-je des excuses ? Ce n'est qu'un soldat que je vois brièvement." Après cette conclusion dans sa tête, elle grimpa dans la voiture, là où Vivi venait juste de se garer. Ben à ses talons.

— Alors ?

— C'est ok. Affirma Aliénor en fixant le paysage.

Le trajet fut d'un silence mortifiant. Ben regardait simplement le paysage défiler par la fenêtre. Tout en réfléchissant aux possibles répliques qu'il aurait pu balancer lors de leurs disputes.

" Pourquoi les meilleurs arguments viennent que trop tard ? Je ne peux pas lui balancer ça là, maintenant."

Il jeta un bref coup d'œil à la jeune fille dont le visage était collé contre la vitre, elle papillonnait des paupières, s'endormant sur place. Ben fut pris au dépourvu. Il la trouvait jolie, mais cette attirance, il voulut l'enterrer très loin sous ses pieds. Une fois arrivé à l'annexe, il n'attendit pas la résistante et partie sur le champ rejoindre sa chambre, là où Will l'attendait comme un psychologue. Il s'enferma dans la chambre, retirant ses vêtements sous le regard de Stiles et Will.

— Alors Don Juan ? Tu l'as foudroyé ?

— Pardon ? Demande Ben choqué.

— Vu ton visage non. Assure-t-il déçu. Je voulais que tu te dépucèles avec elle bordel !

— Avec un dessin, tu parviens à te faire tout un film, c'est dingue. Je la hais du plus profond de mon âme, et a ton plus grand chagrin, elle ne goutera jamais à mes joyaux.

Will éclata de rire et dit.

— Vu ce que j'ai vu, crois-moi le jour où elle les verra...

— Je la hais ! Conclue Ben en enlevant son habit.

— Oh, c'est comme ça que toutes les meilleures histoires d'amour commencent ! Vous vous détestiez, mais vous finirez par vous aimer malgré vos différents. Rêve Will.

Ben sauta dans son lit et dit en prenant la couverture et son carnet.

— Elle m'a pris les couilles, et m'a menacé de les tordre si je ne faisais pas ce qu'elle m'avait demandé. — Wow. Plutôt féroce.

— Tu m'étonnes. Elle parle sans savoir. Elle ne sait rien de ce qu'on vit et aurait aimé vivre comme nous. Stiles s'interposa, le contredisant.

— Mais Ben, tu ne sais même pas ce qu'elle a vécu et le cheminement qu'elle a eu pour être résistante. Si ça se trouve, elle a vécu pire que nous sans que tu le saches.

Ben soupira, énervé. Il regarda le plafond et voulut expliquer.

— Mais qu'est-ce qu'elle aurait pu vivre de si horrible pour prétendre tout ça.

— Eh bien. À toi de le découvrir frérot. Soudainement, une idée frappa son esprit. Il sourit légèrement, et dit en regardant Will du coin de l'œil. — Elle m'a demandé mon prénom. Je lui ai demandé en voulant savoir le sien en retour. Mais elle a dit qu'il n'y aurait que deux occasions pour que je le sache.

— Lesquelles ?

— Qu'elle m'aime ou qu'elle s'apprête à mourir. Étant donné que je ne veux pas aller jusque-là... Will mit sa main sur sa bouche, choqué.

— Tu veux la faire tomber amoureuse de toi ?! Ingénieux, mais cruel.

— N'abuse pas, elle s'en remettra. Répliqua Ben

Stiles pesta.

— Ça vous fait rire ? Très drôle de jouer avec les sentiments de quelqu'un. Vous êtes plus des gamins.

— Rien n'est gagné Stiles. Si ça se trouve, elle ne l'aimera jamais. Regarde, il ne reste qu'une semaine avant qu'on explose cette caserne d'après Smith.

— Donc, si j'ai bien compris. Tu vas charmer une fille simplement pour savoir son passé et son prénom ? Mais tu es timbré ?

Will souffla également, mettant un coup de pied sur le jeune homme à lunette qui contredisait tout.

— Arrête Stiles. Prends-le comme une blague, rien d'autre. Et Ben ne tombe pas amoureux hein ! Ben rit. — Jamais. Et puis, Will à raison, ce n'est qu'une blague non ?

...

" 19 juillet 1944,

Moi et Luna sommes allés dans ce bal boche. Car d'après elle le fait que je parle allemand l'aiderait. Elle m'insupporte. Elle ne sait pas ce qu'elle dit. Elle prétend savoir, mais ne sais rien. Qu'est-ce qui pourrait être pire que nous ? Certes, je me suis engagé, mais je savais ce que ça donnerait. Elle non. Et ç'a le don de m'irriter. J'ai des sentiments contradictoires. D'un côté, je la trouve horriblement belle. Et d'un autre, j'ai envie de lui faire ravaler sa fierté et de l'enfouir bien profondément dans le sol. Mais elle a vécu quelque chose, je le sais et ma curiosité me perdra. Ma morale s'arrête. Je vais essayer de cacher mes sentiments meurtriers à son égard et en savoir un peu plus sur elle. Ici, à part mon vieux carnet, je n'ai rien. Ne serait-ce que les dessins. L'amour d'une fille serait-il suffisant ? Car je sais, comme je sais que je mourrai, elle m'aimera.

Plus qu'à espérer que nos sentiments ne deviennent pas réciproques.

Car s'ils le deviennent,

La Lune pleura.

L'homme qui a fait pleurer la LuneWhere stories live. Discover now