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Bonne lecture !

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Naruto ouvre les yeux sur son plafond taché.

Il fait nuit, exactement comme quand il est rentré des cours et qu'il s'est écroulé dans son lit. Il a tout juste eu le temps de retirer ses chaussures sans même se baisser avant de fermer les yeux et de s'endormir.

(Il fait ça souvent, en ce moment. Quand il dort, le temps passe plus vite. Il n'a rien d'autre à faire, de toute façon.)

Mais en observant en silence son plafond, Naruto sait que ce n'est pas encore le matin. Il n'y a pas de bruits dans le couloir devant la porte de son appartement, et il peut entendre des voix et des rires dans la rue juste en dessous. Le matin, la lumière de la nuit est plus douce. Le matin, ses voisins s'activent et la rue est silencieuse.

Il jette un coup d'œil à son réveil (qu'il a demandé à la voisine deux semaines plus tôt : c'est la dernière fois qu'il l'a vu) et les aiguilles lui apprennent qu'il n'est pas encore vingt-trois heures.

Naruto ferme les yeux.

Il attend le moment où son corps se détend et où son esprit semble basculer vers des images et des rêves (des sons, des couleurs, des choses agréables en général : ce que ça ferait d'apporter un sandwich fait maison à une sortie scolaire ou encore de pouvoir quémander quelques minutes en plus le matin) mais ça ne vient pas.

Pas du tout.

Ses yeux s'ouvrent à nouveau, et il soupire en se redressant.

Cette fois, il prend le temps de se laver au lavabo, de retirer ses vêtements pour enfiler un pyjama digne de ce nom. Il se brosse les cheveux puis les dents, et boit une gourde d'eau entière qu'il extirpe du frigo. Il avale une brique de lait, aussi.

(Il n'a pas vraiment la force de faire bouillir de l'eau et de manger. Ouvrir la bouche et mâcher, c'est épuisant, certains jours.)

À la place, il se contente de retourner vers son lit et de soulever la couette pour se réinstaller. Son regard glisse vers sa fenêtre, qui se trouve juste en face, et pendant un instant Naruto se fige.

Il y a de la musique, dehors. Des voix, des cris et des rires. Il entend tout ça, et lâche doucement sa couverture pour s'avancer à quatre pattes vers la vitre : elle est froide quand il y pose sa main. Sa respiration s'accélère un peu.

Des lanternes. Des petites bougies, à l'intérieur de toiles hermétiques qui s'envolent avec la chaleur. Des enfants qui les lâchent depuis les épaules de leurs parents. Des spectateurs.

Il y a une fête à Konaha, Naruto ne la connaît pas bien car il n'écoute pas vraiment en cours et personne n'a essayé de lui expliquer de vive voix. Il sait qu'elle est là car ce genre de choses se produit tous les ans à la même date.

Naruto a essayé de descendre dans la rue, une année. Il s'est approché d'un couple, et a demandé s'il pouvait en lancer une. Ils se sont éloignés avec des mines peinées. (Alors il est remonté, s'est enroulé dans sa couette, et a un peu pleuré. À présent, il préfère regarder tout ça de sa fenêtre.)

Cette fois, il a complètement perdu la notion du temps. Un coup d'œil sur le calendrier posé sur son bureau lui apprend qu'il n'a pas coché les jours depuis un bon moment. Il ne sait même pas quel cahier ramener en cours. Ne vient pas que quand il entend la maîtresse dire « bon week-end ».

Naruto soupire, un sourire un peu fatigué sur les lèvres. Il se sent un peu mieux, tout à coup : prendre une position plus confortable, attraper une couverture à mettre sur ses épaules, ouvrir la fenêtre, s'appuyer contre le chambranle et observer les centaines de lanternes dans la rue. Elles montent doucement.

Et vont rejoindre celles qui viennent des autres rues du village.

C'est joli à voir, c'est agréable à regarder.

Pendant un moment, il ne pense plus vraiment à la voisine qui ne vient plus très souvent, au Hokage qui lui a dit « plus tard, Naruto, d'accord ? » la dernière fois qu'ils se sont croisés, à Ishiraku qui a pris une semaine de congé, à sa poubelle pleine de ramens instantanés et à ce garçon dans la classe qui a arrêté de lui parler car ses parents n'étaient pas très contents.

Il ne pense plus à ce qu'il ressent en se regardant dans la glace, sans comprendre ce qu'il voit tous en lui.

Il observe, les paupières à demi-closes, les joues froides, et l'esprit plein de petites lumières dans le ciel sombre.

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Nos vies décolorées || NarutoWhere stories live. Discover now