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Peut-être allaient-ils vraiment passer là le reste de leur vie...

A mesure que les jours s'écoulaient, il devint clair qu'aucun d'eux ne changerait d'avis. Hinata ne coucherait pas avec un homme qui l'avait offensée, et Naruto ne reviendrait pas sur sa décision. Parfois, il l'emmenait en excursion. Cette terre qui semblait si nue et inhospitalière, expliquait-il, regorgeait de cadeaux pour qui savait où regarder. Il lui montra ses bornes, des canyons qui se déplaçaient d'une vingtaine de centimètres dans la durée d'une vie, et la loi simple et éternelle du soleil, qui brillait du matin au soir, indiquant la direction aux voyageurs. Il existait aussi des oasis, distantes entre elles d'un jour entier de marche. Il l'emmena un jour en 4x4 dans l'une d'elles pour pique-niquer.

— La preuve que la terre est fertile ! dit-il en s'étirant de tout son long sur le sol, les yeux levés vers le ciel. Il suffit de savoir comment la traiter. Une réplique lui vint sur le bout de la langue, mais Hinta décida de la garder pour elle. Elle attendait son heure : le retour du Naruto qu'elle aimait. Son seul exutoire était Lucy. Elles bavardaient tandis qu'elle la coiffait ou l'habillait ; cependant, elle était toujours dissimulée sous une abaya noire, et Hinta aurait aimé voir son visage. Un jour, elle évoqua le sujet.

— Je ne la porte pas chez moi. Là, je peux être moi-même ; ici, je travaille...

Lorsque Lucy lui faisait la conversation, c'était du travail ? Cette idée déplaisait à Hinta. Natsu servait Naruto et, parfois, à l'heure de sa sieste, pendant que son époux arpentait le désert, elle les entendait rire tous les deux. Natsu traitait Lucy comme si elle était un bijou précieux. Elle aurait tant voulu avoir ce genre de relation avec Naruto ! Quand il revint, ce jour-là, mal rasé, en djellaba noire, elle lui fit part de ses réflexions.

— Bien sûr qu'il est gentil avec elle. Pourquoi pas ? C'est une bonne épouse, une femme agréable.

— Eh bien, on ne peut pas dire que tu sois très agréable, ni très communicatif, avec moi...

— Tant que notre mariage ne sera pas consommé, tu ne seras pas ma femme. Quand tu seras décidée, tu verras combien je peux être gentil avec mon épouse.

Le temps passait, et bien qu'il leur arrivât de bavarder et même parfois de rire ensemble, ils campaient obstinément sur leurs positions. Et plus ils parlaient, plus Hinta apprenait de choses sur ses traditions et Naruto sur les siennes, plus leur relation lui semblait impossible.

— Pauvre Menma ! Assise sur les coussins, elle dégustait des figues, qu'elle adorait. Les envies dues à sa grossesse avaient débuté en même temps que les nausées matinales, et ces fruits gorgés de sucre étaient le seul aliment qu'elle supportait. D'ailleurs, la tête lui tournait un peu tandis que Naruto lui expliquait ce que l'on attendait de sa famille.

— Pourquoi le plains-tu ? demanda-t-il.

— Obligé d'être roi !

— Il est très honoré de devoir servir le peuple. Il n'y a pas de plus grand honneur.

— Alors, pauvre Yuki..., commenta-t-elle, sachant qu'elle le mettait en colère, mais refusant de se taire. Je comprends qu'ils ne veuillent pas d'enfants. Ce serait horrible pour eux et pour lui. Elle frissonna à cette idée.

— Comment oses-tu ? s'exclama-t-il. Comment peux-tu te permettre de critiquer nos coutumes ? Leur bébé naîtrait pour être roi.

— C'est bien ce qui serait horrible, à mon sens. Tu m'as caché ton identité, mais...

— Je ne t'ai pas caché mon identité !

— Disons... tu as omis de préciser que tu étais prince, et je suis juste heureuse que ton nom ne soit pas Menma. Je n'imagine rien de pire. Au moins, toi, tu es libre ; tu peux poursuivre ta carrière. Au fait, pourquoi ne pratiques-tu plus ? ajouta-t-elle, les sourcils froncés.

— Ce n'est pas un métier pour moi.

— Mais ça l'a été ?

— Un temps. Puis j'ai compris que je pouvais faire mieux pour mon peuple.

— Tu es chirurgien, ça ne te manque pas ?

— Ça suffit !

— J'essayais seulement...

— Cesse ! Quand ton mari t'ordonne de te taire, surtout si c'est un prince, tu ne discutes pas.

— C'est là que tu te trompes ! Je te l'ai répété cent fois : je respecterai tes coutumes en public, mais chez moi, c'est-à-dire dans cette tente pour l'instant, c'est mon mari qui doit m'accorder confiance et respect, et bavarder avec moi. Elle eut un faible sourire pour ajouter : — Nous n'en sortirons pas, on dirait...

Pour ne pas choquer leurs serviteurs, elle dormait dans le lit de Naruto, bien qu'elle n'ait aucune intention de se donner à lui. La barrière qu'il insistait pour mettre entre leurs corps lui fermait le chemin de son cœur. Parfois, elle avait un bref aperçu de l'homme dont elle était tombée amoureuse. Certains matins, elle se retrouvait blottie contre lui, entre ses bras qui l'entouraient, se demandant comment elle était arrivée là. Allongée à côté de lui, une nuit, l'écoutant respirer, la chaleur de sa peau irradiant la sienne, elle s'étonna : comment était-ce possible ? Malgré ses viles accusations et son manque de confiance, en dépit de tout ce qui les opposait, au beau milieu du désert, dans l'obscurité avec lui, elle se sentait aimée et en sécurité.

* * *

Naruto était aussi surpris qu'elle. Toujours vigilant, il savait qu'elle était éveillée. A quoi pensait-elle? A sa famille, qui devait lui manquer? Elle était sans doute effrayée et désorientée. Il l'attira un peu plus près. Son corps chaud et détendu était si facile à déplacer ! Ce bébé était-il de lui ? Il posa une main sur son ventre pour percevoir le petit être à l'intérieur et la retira presque aussitôt. Pas question de se laisser aller à l'émotion, car s'il s'agissait de son enfant, son destin était lié au sien, et dans le cas contraire... Il ouvrit les yeux, fixant l'obscurité. Sa nuque était à quelques pouces de sa bouche. Il avait tant envie d'enfouir le visage dans ses cheveux, d'embrasser cette peau si douce ! Le bas de son dos touchait son abdomen. Passant un bras autour de sa taille, il sentit son désir s'éveiller. Ses doigts le démangeaient de lui caresser les seins... Et si le bébé était vraiment le sien ? Il n'avait jamais fait de sentiment, c'était dans sa nature. Le jour de son entretien avec son père, son esprit calculateur avait rapidement trouvé une solution. Pour le bien de son pays, il porterait avec Menma le poids du mensonge et du secret et les emporterait dans sa tombe. Après le test, lorsqu'il serait établi que l'enfant n'était pas de lui, le ventre de Yuki se mettrait à gonfler, et le peuple applaudirait. Hinta avait fourni la solution. Inutile de s'encombrer d'un sentiment aussi stupide que le souci de ce qu'elle éprouverait. Il n'avait pas à s'en préoccuper. Il suffisait que tous les jours elle l'amuse, à bavarder toute seule quand il refusait de lui répondre. Il s'était bien promis un temps de gommer les différences qui existaient entre eux, mais désormais, il ne s'en sentait plus le courage. Comment lui dire qu'elle devrait renoncer au métier qu'elle adorait ? Que non contente d'être princesse, elle serait peut-être reine un jour, perdant ainsi ce qui lui restait de liberté ? Elle remua un peu, et là, dans le noir, pour la première fois de sa vie, Naruto se sentit indifférent au sort du peuple de Konoha. C'était elle qui importait. Il n'avait nulle envie de savoir si l'enfant qu'elle portait était un garçon ou une fille, il voulait juste être à elle, et qu'elle soit à lui. Ses mains lui caressèrent la poitrine, glissèrent sur son ventre pour descendre plus bas, ses cuisses frémirent sous ses doigts, et son souffle devint léger et rapide. Ce soir, il lui ferait l'amour et, demain, il lui dirait tout. Si elle n'était pas d'accord, si elle s'estimait incapable d'accepter ce sort, ils trouveraient une issue. Elle sentait divinement bon et il la savait prête à l'accueillir. Comme il serait facile de s'abîmer en elle, de partager et de croire...

* * *

Ils n'avaient pas échangé un mot, ni même un baiser, et pourtant, jamais Hinata n'avait été aussi proche de lui. Elle savait qu'il était réveillé et qu'il la désirait. Peut-être aussi qu'il pensait à elle, et l'aimait un peu. Ecartant les jambes, elle sentit son désir, et se pressa contre lui, avide.

— Fais-moi l'amour, Naruto...

— Votre Altesse ! Pardonnez cette intrusion..., dit Natsu en sanglotant.

Naruto jura violemment en arabe. Comment son serviteur osait-il le déranger dans sa chambre ?

— Pardon, Votre Altesse, poursuivit Natsu. Lucy a une hémorragie ! Elle se meurt...

Destins ReliésWhere stories live. Discover now