64 - Feu qui souffre

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- Merci Elevin, je me souviens des livres de droit que tu me prêtais quand nous étions à la faculté. Cet engouement que je sentais chez toi, cette vie intellectuelle qui semblait te remplir, cela m'a donné envie à moi, petite secrétaire, de savoir ce que ça faisait. Et c'est drôle tu vois mais, dans ces livres tu avais souligné des phrases, mis des annotations dans les marges. Alors moi quand je les ai lus c'est comme si quelqu'un m'expliquait le livre. Et peu à peu je me suis sentie moins bête. C'est vrai que j'aurais pu te contacter après que tu aies quitté la faculté, mais tout est allé si vite. Si vite.

Elle semble prise de vertige. Ses yeux se fixent au fond de la pièce. En fait je crois qu'elle est épuisée.

- Tu veux qu'on en parle demain ? Dors ici, tu as besoin de récupérer.

- Non, il faut que je t'explique pourquoi je suis venue au milieu de la nuit.

Elle boit son thé et picore une madeleine, je me dis que ça va lui donner des forces.

- Ce n'est pas facile, je ne sais pas trop par où commencer. Voilà. Tu te souviens peut-être de Rory, il venait parfois dans mon bureau.

- Bah tu parles si je m'en rappelle ! Evidemment, il était pote avec Renata, cette garce, elle avait piqué mon message dans la poupée japonaise ! Mais excuse-moi, vas-y, continue.

- Oui, j'admets qu'à l'époque, il n'avait pas forcément de bonnes fréquentations. Mais voilà, on se voyait de temps à autres, il avait toujours une parole pour moi, et tu sais, nous les secrétaires, c'est comme si on n'existait pas. La plupart des gens ne nous voient même pas. Rory n'était pas comme ça. Alor forcément un jour il s'est passé ce qui devait se passer.

Je suis médusée. Marlène si prude et si pudique, est juste en train de m'annoncer qu'elle s'est fait un des plus beaux mecs de la fac. Enfin, pour moi c'était un salaud qui allait abuser d'elle, mais ça bien sûr je ne vais pas lui dire. En tout cas, pas tout de suite ! Je la laisse finir de m'expliquer. En me racontant elle semble revivre de belles heures, car son expression de tristesse laisse parfois luire des rides de sourire au coin de ses yeux presque éteints.

- Alors voilà, j'ai donné ma démission à la doyenne. Elle aussi m'a beaucoup encouragée et donné des conseils pour réussir. J'ai suivi Rory à New York, il avait un appartement splendide, avec des meubles en marqueterie, des tableaux comme on en voit dans les musées, une vue imprenable sur la ville ! J'étais sidérée, Elevin, je vivais un conte de fées ! Et Rory m'aimait, tu sais, oui il m'aimait vraiment.

- Je n'en doute pas Marlène, ce devait être magnifique.

J'évite de trop tomber dans le merveilleux de son histoire, parce que si elle est chez moi avec des blessures au visage et une valise, c'est que le "conte de fées" a s'est transformé en histoire de socrcières.

- Je me suis donc installée chez lui tout en préparant le concours du barreau de New York. C'était dur, très dur, et je devais aussi améliorer mon anglais. J'ai échoué deux fois, mais la troisième a été la bonne ! Oh, j'aurais tellement voulu que tu voies la remise de diplômes, ça, les Américains savent faire !

- Tu devais être très heureuse, je me mets à ta place ! 

- Après le concours Rory a sollicité son réseau pour que je commence comme avocate collaboratrice dans un cabinet d'affaires, chez Swiss et Wesson. Un très beau cabinet Elevin, si tu avais vu leur tour ! C'était encore un autre contre de fées !

Je n'en reviens pas quand même. Je me traîne à préparer le barreau de Paris et elle débarque en me disant qu'elle est avocate à New York. Je n'en reviens pas, et en même temps je l'admire, car du fait de sa position de secrétaire, elle a dû faire appel à plus de ressources intérieures que moi. Elle me bluffe totalement.

Monsieur le ProfesseurOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz