Baisers salés (Terminée)

Chapitre 23 - La déclaration

— Écoute...

— Oh oh, mais c'est que monsieur sort le ton des grandes confidences ! nota la brune dans un demi-sourire satisfait.

— La ferme Luce.

Le hoquet de surprise de la concernée le fit culpabiliser. Il n'avait pas voulu la bousculer ainsi, mais elle ne lui donnait pas le choix. C'était déjà bien assez difficile de l'approcher, alors si elle transformait chacune de ses paroles en choses insignifiantes uniquement destinées à être tournées au ridicule, alors il n'était pas prêt d'y arriver.

— Je ne suis pas là pour longtemps et je n'aime pas perdre mon temps alors voilà, tu me plais Luce. Depuis le départ. Depuis que je te suis rentré dedans sur cette plage.

La jeune femme ne supporta pas l'effet que cela lui fit. C'était comme si on venait de la pousser sous une douche froide. Était-ce parce qu'elle ne partageait pas les sentiments d'Ange ? Ou était-ce plutôt car Luce n'accordait plus le droit aux gens de l'aimer et ce, depuis de longues années ? Ne disait-on pas qu'il fallait s'aimer soi-même pour pouvoir être aimé ?

— Mais tu effaces chaque pas que je m'efforce de faire vers toi, continua Ange. Tu maintiens tout le temps la même distance entre nous. Alors j'ai décidé de ne plus rien espérer de ta part.

Cette fois-ci, ce fut un couteau qu'elle reçut en pleine poitrine. De toute évidence, il s'agissait plus de la situation numéro deux que de la première.

— Parce qu'à cause de ton caractère de cochon, on a perdu pratiquement une semaine durant laquelle on aurait pu sortir et s'éclater, si tu avais bien voulu de moi.

Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose. Quoi ? Elle ne savait pas. N'importe quoi aurait pu faire l'affaire. Sauf que le jeune homme continua :

— Et oui, j'ai bêtement cru avec Fabrice que tu étais en couple avec Claire. Mais ton amie a rectifié le tire hier soir et Fab m'a fait la transmission à mon retour. Donc ne me sors pas l'excuse débile du couple lesbien.

Elle n'y avait même pas songé. Certes, Luce avait déjà utilisé cette excuse pour trois hommes depuis son accident et Claire s'était fait un malin plaisir à se jouer de la situation énoncée, notamment en volant un baiser à son amie, lors de la deuxième énonciation du mensonge. Mais en ce moment, cela ne lui avait même pas effleuré l'esprit.

— Alors voilà, maintenant que c'est dit, et que je me sens libéré, sache que je ne m'intéresserai plus à toi. J'ai gâché ma première semaine de vacances, je ne compte pas continuer à perdre mon temps avec une femme qui interdit à quiconque de l'aimer parce qu'elle se déteste elle-même et refuse d'accepter ce qu'est devenue sa vie.

Désormais, c'était de la colère que Luce ressentait. Comment ce mec, qui ne connaissait rien d'elle, osait parler en son nom ?

— Attends, tu veux dire que tu m'as amenée ici pour me dire que je te plaisais mais que tu allais passer à autre chose et que je pouvais aller me faire foutre ? Et puis t'es qui d'abord pour parler de ma cécité ? Tu ne sais pas par quoi je suis passée ! Tu ne sais absolument rien de moi et tu crois mieux savoir que moi ce qui me conviendrait ?

Ce n'était pas ainsi qu'Ange aurait résumé la situation, mais il dut reconnaître que Luce n'avait pas tout à fait tort. Et c'était d'ailleurs pour cette raison qu'il voulait tirer un trait sur cette histoire. La situation d'Angèle avait failli le faire sombrer dans ses souvenirs et désormais qu'elle avait coupé les ponts avec Paul et ses ondes négatives, certes elle se retrouvait sans famille, sans rien, mais sa vie n'était plus en danger.

Alors maintenant, il était temps qu'il pense à lui et profite de la dernière semaine de vacances qu'il lui restait pour s'éclater. Il avait de nombreux défis qui l'attendaient.

— Tout à fait ! confirma-t-il alors en se levant du muret sur lequel il s'était assis.

Voir le visage contrarié de la jeune femme l'attrista autant que ça le ravit. Il avait enfin causé autre chose que de la colère ou de l'agacement chez la brune. Ange espérait qu'elle allait s'en mordre les doigts.

— Bye Luce.

— Bye ? répéta-t-elle. T'es sérieux là ?

L'absence de réponse du jeune homme lui confirma qu'en effet, Ange avait été plus que sérieux.

— T'es... Oh mais quel connard ! s'emporta-t-elle.

Le couple qui passait à côté d'elle la regarda étrangement et pour une fois, bien trop dévorée par la colère, Luce ne se rendit même pas compte de leur présence. Car tout ce qu'elle était capable de faire en ce moment ou de dire plutôt, c'était que cet Ange était un salopard de première et qu'elle le détestait.

Alors, est-ce que vous vous étiez attendu à ça ? Ange qui se déclare mais pour partir et oublier Luce ? Surprenant, n'est-ce pas ?