Chapitre 2 - Sentir le monde qui nous entoure

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Malgré le boucan que ses voisins de camping avaient fait durant la nuit, Luce avait décidé de se lever aux aurores.

Pendant que les enfants rechargeaient leur batterie pour être en forme sur la plage l'après-midi, la jeune femme avait débuté sa journée en buvant un grand verre d'eau qu'elle avait peiné à trouver dans la tente. Elle avait eu peur d'en renverser sur son amie qui dormait à ses côtés, mais par chance, elle avait été adroite.

Une fois désaltérée, elle avait attrapé son gilet, celui qui était si délicat qu'il lui donnait l'impression d'être vêtue de plûmes, l'avait enfilé et s'était bataillée avec la fermeture éclair de son abri qui lui avait donné du fil à retordre.

Désormais assise à la table de camping que Claire avait installée deux jours plus tôt, elle inspira fortement et savoura avec délectation la chaleur des premiers rayons de soleil qui glissèrent sur son visage. L'odeur de pin chatouilla ses narines, avant que celle de l'urine ne vienne recouvrir cette senteur sauvage et apaisante.

Un léger coup de vent marin vint caresser sa figure. Doux, il lui arracha un sourire. Un oiseau chanta à quelques mètres d'elle et ses lèvres s'étirèrent une nouvelle fois. C'était une sittelle torchepot si ses oreilles ne se trompaient pas. Deux ans auparavant Luce avait étudié leurs chants. Même si certains d'entre eux lui paraissaient lointains, d'autres avaient marqué à jamais sa mémoire auditive.

Ses épaules se relâchèrent et son corps se détendit. Le soleil réchauffa ses mains, chatouillant agréablement ces dernières. La jeune femme aimait les matinées. Elle aimait se sentir en harmonie avec la nature, avant que celle-ci ne soit agressée et masquée par les Hommes.

— Oh, tu es déjà levée !

Les paroles de son amie la firent sursauter, mettant fin au calme intérieur qui venait tout juste de la gagner. C'était quelque chose qu'elle détestait : que quelqu'un rompe un moment tel que celui-ci. La cassure était toujours terrible.

— Tu aurais pu te signaler, je ne t'ai pas entendue arriver ! lâcha-t-elle dans un léger ton de reproche.

— Excuse-moi Luce, je n'y ai pas pensé.

La concernée leva la main pour lui faire comprendre qu'elle oubliait cet instant de frayeur rapide dès l'instant qu'elle entendit la sincérité dans sa voix. Avec les années, la jeune femme avait appris à reconnaître les différentes intonations et surtout les intensions dans chaque mot prononcé. Si cela paraissait difficile aux yeux de certains, Luce avait acquis cette capacité avec facilité.

— Je crois que je me sens triste pour toutes les personnes qui n'ont pas connu les délices du lever du jour. Écouter les secrets que la nature a à nous confier est probablement une des plus belles choses que la vie puisse nous offrir ! Certes, elle ne nous régale peut-être plus des yeux comme avant mais auditivement, elle a gardé toute sa beauté.

À l'entente du soupir de bien-être de son amie, Claire sourit mais comme toujours, Luce ne put voir celui-ci. Cette dernière devina malgré tout l'état d'âme de la jeune femme grâce à son savoir sur la phonation. Chaque fois qu'elle souriait, ses lèvres qui étaient étirées, changeaient le son de sa voix mais aussi son articulation. C'était un phénomène qui n'échappait à personne. C'était un phénomène qui lui permettait de décrypter les véritables émotions des gens, celles que l'on cherchait à cacher, pour se protéger des démons, nos semblables.

— Nous allons aller nous doucher puis on pourra aller faire un tour au marché, si ça te tente.

La jeune femme tourna la tête vers son amie et lui offrit un de ses plus beaux sourires. Sa fossette solitaire se creusa sur sa joue gauche. Ses cheveux, bruns, longs, fins, détachés et légèrement emmêlés vinrent recouvrir son joli visage après un nouveau coup de vent.

Baisers salés (Terminée)Where stories live. Discover now