Chapitre 19 - Regardez la bête que je suis !

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— Si t'as du jus d'orange.

— Euh... pas vraiment. Mais on peut aller en chercher à la petite boutique du camping.

La jeune femme rigola puis hocha la tête.

— Laisse-moi juste me faire présentable, souffla-t-elle avant de repartir en direction de la tente.

Seulement Ange ne la laissa pas partir. La main posée sur son épaule, il lui répondit :

— Tu es toujours bien Angèle.

Un rire glacial se fit entendre et la jeune femme remarqua avec surprise que la fameuse Luce venait de sortir de son antre. Une casserole à la main, elle semblait de mauvaise humeur. Mais même si cela ne faisait pas longtemps que la brune était là, elle avait remarqué que la malvoyante tirait tout le temps la tronche.

— Alors on y va, souffla-t-elle à l'attention d'Ange.

Tous deux passèrent à côté de celle au caractère de chien. Aussitôt, Angèle ne put s'empêcher de détailler Luce. Cette femme avait beau être antipathique, elle avait vraiment été gâtée par la nature. Seulement sa théorie se confirma lorsqu'elle vit les jolies lèvres de la brune se pincer à la venue d'Ange.

Luce était belle, bien que détestable. Luce lui plaisait. Mais Luce n'avait rien ressenti lorsqu'elle l'avait touchée dans la voiture. Parce que Luce n'était pas intéressée par les femmes. Bien au contraire, c'était Ange qui lui plaisait. Tous les efforts qu'avait fait Angèle pour la rendre jalouse avaient été vains.

Tout en ravalant sa déception, la jeune femme continua sa route. Il faudrait bien qu'elle dise à son sauveur que celle qu'il pensait gay était hétéro. Oui, elle le ferait. Une fois qu'elle aurait digéré son échec.

***

Si Angèle, Ange et Fabrice avaient passé l'après-midi ensemble, à rire et s'éclabousser dans les vagues, ils étaient désormais tous à table, au petit restaurant du camping. Alors que les deux amis avaient souhaité sortir en ville, Claire, qui avait plus ou moins kidnappé Fab durant sa marche pour les sanitaires, avait dit qu'elle souhaitait dîner avec eux.

Voilà donc pourquoi ils se retrouvaient tous les cinq à table.

— Quelqu'un veut du sel ?

La question d'Ange passa inaperçue car Claire était bien trop occupée à fixer Fabrice pour l'avoir entendue. Tout comme Angèle, qui avait repéré un couple lesbien et les admirait secrètement. Seule Luce avait apparemment les oreilles débouchées. Mais ce ne fut pas pour autant qu'elle répondit au blond.

— Super, soupira Ange.

Luce qui commençait à s'impatienter car contrairement aux autres, son plat n'était toujours pas arrivé, changea de position et toucha malencontreusement la jambe de celui qui se trouvait en face d'elle. Et alors qu'elle s'apprêtait à s'excuser, bien que cela l'écorchait, le jeune homme fut plus rapide qu'elle.

Le coup de pied, qu'elle jugea volontaire, l'agaça :

— Ouah, que c'est puéril ! cracha-t-elle.

Claire sortit enfin de son observation silencieuse pour regarder son amie. Fabrice et Angèle firent de même.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? s'étonna la châtaine.

— Ce qu'il se passe ? Il se passe que monsieur est si gamin qu'il donne des coups de pied sous la table.

— Je n'ai pas donné de... J'ai pas fait exprès.

— Mais bien sûr !

Le soupir de Claire fit comprendre à Luce que celle-ci en avait vraiment marre de cette guerre.

— Luce, s'il te plaît.

— Quoi ? C'est cet écervelé qui me provoque et c'est moi qui trinque ?

Parce qu'elle avait monté le ton, la famille de la table d'à côté les regarda.

— Luce, enfin ! s'indigna Claire en accordant un regard désolé à Ange qui visiblement, avait du mal à ne pas répliquer.

— Euh, on va peut-être se calmer, lança Fab peu désireux de se rendre en spectacle.

— Je te trouve plutôt odieuse !

La voix d'Angèle interrompit le discours silencieux que se passait en boucle Luce dans sa tête.

— Pardon ?

— Depuis que je suis là, tu n'arrêtes pas de faire des réflexions à Ange. Mais à ce que je sache, il ne t'a rien fait !

— Il ne m'a rien fait ? Ah, c'est la meilleure ça !

La main de Claire se posa sur le poignet de son amie pour lui faire comprendre qu'il fallait qu'elle se calme.

— S'il vous plaît, supplia Fabrice, gêné par tous les regards qui se posaient désormais sur eux.

— Je ne crois pas que j'ai à retenir quoi que ce soit sortant de la bouche d'une salope !

Claire se cacha le visage, honteuse.

— Retire ce que tu viens de dire.

La voix d'Ange n'avait plus rien de sympathique désormais.

— Je ne vois pas pourquoi je retirerai quelque chose que je pense.

— Évidemment, parce que madame est aveugle, elle pense que ça explique tout. Les remarques blessantes, je veux bien subir. Mais je t'interdis de parler d'Angèle ainsi !

— Oui, je suis aveugle, et alors ? Hein ? Regardez-moi bien, parce que je suis l'aveugle sur la plage. Celle qui tombe dans le premier trou venu. Celle qui reste au milieu de la piste cyclable car elle ne sait pas où aller. Celle qui reste sur le sable même quand on lui dit de se pousser ! Regardez-moi bien ! Oui, mesdames et messieurs, regardez la bête que je suis !

— Oh mon Dieu ! couina Claire en glissant sur sa chaise.

Luce venait de se lever et avait renversé son verre dans son élan.

— C'est pas ce que j'ai voulu dire.

— C'est pourtant ce que les gens pensent, rétorqua Luce. J'ai beau ne plus voir, je ne suis pas bête. Je sens les regards sur moi. Et aux dernières nouvelles, je suis peut-être aveugle, mais j'ai encore des oreilles ! hurla-t-elle en se tournant vers un groupe d'adolescentes.

Les critiqueuses d'une demi-heure plus tôt ne semblaient plus savoir où se mettre.

— Sur ce, je vous souhaite d'apprécier votre repas. Personnellement, ça m'a coupé l'appétit.

Empotée, la brune poussa sa chaise puis après avoir récupéré sa canne, commença à quitter le petit commerce, non sans hurler sur toutes les personnes se trouvant sur son chemin de déguerpir.

— Excusez-là. Elle n'est pas... Elle a eu une journée difficile, souffla Claire avant d'abandonner ses amis de dîner et son repas par la même occasion.


Luce pète  vraiment un  câble

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Luce pète vraiment un câble. Le trop plein ? Sûrement. Nous approchons petit à petit d'un moment très important pour l'histoire. Je suis si excitée à l'idée de vous offrir the chapitre...

Baisers salés (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant