Chapitre 12 - Douche retardataire

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— C'est infatigable ces individus. Pire que les gosses, souffla-t-elle dans un soupir.

— Merde ! répliqua en même temps Claire. J'ai oublié mon sac à la douche. Mais comment j'ai pu... Ne bouge pas. Je reviens !

Soudainement abandonnée à elle-même, Luce devint silencieuse.

Malgré les années qui passaient, être seule, sans canne, ni chien guide, l'effrayait toujours. Les souvenirs de l'époque où elle avait pu regarder le monde qui l'entourait remontaient à chaque fois à cet instant. Parfois, il lui arrivait de dire qu'elle aurait préféré naître aveugle. Car elle avait l'impression qu'on lui avait fait goûter au paradis pour le lui retirer peu de temps après. La cassure des deux mondes était tellement difficile à vivre. Certes, c'était un discours qu'elle balançait tout le temps. Mais après tout, c'était ce qu'elle ressentait vraiment.

— Et prends ça ! se marra le fêlé à la gueule cassée.

Luce entendit un bruit, celui de l'eau s'écrasant sur le sol. Elle comprit alors. Ses voisins d'emplacement s'amusaient à gaspiller ce que des pauvres enfants n'avaient pas dans de nombreux pays. Ce constat la mit aussitôt hors d'elle. Comment les gens pouvaient être aussi égoïstes ?

— Vous n'avez vraiment que ça à...

La phrase de la jeune femme n'eut pas de suite, car un torrent d'eau s'abattit sur elle. Fraîche, elle lui fit échapper un cri de surprise. La claque froide qu'elle s'était prise n'avait pas vraiment été agréable.

— Merde ! paniqua une voix qu'elle reconnut aussitôt. Je suis désolé, continua le fêlé.

Elle sentit alors une nouvelle senteur l'entourer, différente du parfum qu'il portait lors de leur première rencontre.

— Tiens donc, après le parfum de luxe, on passe à l'eau de toilettes premier prix de supermarché ? cracha-t-elle sur un ton moqueur.

Puis se rendant compte qu'il n'y avait aucune réaction de la part de son interlocuteur, elle fronça les sourcils. Enfin, quelques secondes plus tard, elle sentit quelque chose se poser sur ses épaules. Léger, ça portait le parfum de mauvais goût de son agresseur.

— Mais qu'est-ce que vous faites ? râla-t-elle en repoussant ce qui semblait être une chemise. Retirez cette chose de sur moi !

— Votre robe, répondit en contrepartie le jeune homme.

— Quoi ma robe ? rouspéta Luce.

Ensuite, son visage passa par plusieurs expressions. De l'incompréhension, on vit la gêne apparaître et enfin la force.

— Et vous allez dire que vous n'avez jamais vu de seins ? se moqua-t-elle.

Malgré tout, Ange remarqua que les doigts de la jeune femme se refermèrent sur la chemise manches courtes qu'il lui avait refilée. Et bientôt, la vue de sa poitrine ronde disparut derrière les motifs hawaïens de son vêtement.

— Donc j'en conclus que le merci n'arrivera pas ? nota-t-il tandis que la brune reculait.

— Je ne vois pas pourquoi j'aurais à vous remercier ! Si le monde n'était pas peuplé d'individus de votre genre, qui ne peuvent pas s'empêcher de voir la femme comme un morceau de viande, je n'aurais pas à me cacher !

— Des individus de mon genre ? répéta Ange.

La main de Fabrice qui se posa sur son épaule nue lui fit comprendre que ce n'était pas la peine de rentrer dans le jeu de son adversaire.

— Elle ne manque pas de toupet, siffla le blond entre ses dents.

Pourtant, malgré la colère qui semblait bouillonner en lui, Fab remarqua que les yeux de son ami ne pouvaient se détacher de la silhouette de la jeune femme qui s'éloignait désormais en direction de sa tente.

— Je peux pas me la blairer ! continua-t-il.

— Ange, la prochaine fois, si tu veux vraiment être crédible, évite d'avoir des étoiles dans les yeux en le disant.

— J'ai pas...

— Mais bien sûr.

— C'est vrai ! s'emporta-t-il tandis qu'Angèle les rejoignait, totale ignorante de la scène qui venait de se passer quelques secondes plus tôt.

— Ange ? s'étonna-t-elle. Qu'est-ce que tu fais torse-nu ? Je croyais qu'après ce matin, t'avais dit que tu ne te découvrirais plus ?

C'était exact. Lorsque le jeune homme avait réalisé qu'il s'était pris un méchant coup de soleil, il avait déclaré qu'il ne comptait plus bronzer (ou brûler plutôt) et que par conséquent, il ne se déshabillerait plus.

Après un simple coup d'œil en direction de la tente de celle à la robe blanche, il remarqua que cette dernière tendait l'oreille.

— Il faut vraiment que tu mettes de la Biafine, enchaîna Angèle.

— Je sais, soupira-t-il.

Le simple fait d'avoir retiré sa chemise lui avait donné l'impression de s'être arraché la peau. Cependant, en voyant un sourire satisfait s'installer sur le visage de son indienne provocatrice, il ne put s'empêcher d'ajouter :

— Dis-moi Angèle, j'aurais besoin d'une masseuse. Tu ne saurais pas où je pourrais en trouver une, par hasard ?

Il était rare qu'il s'essaie à ce genre de petit jeu en dehors des temps de défis. Mais cette femme, elle lui faisait faire n'importe quoi ! La preuve, Ange n'avait même pas regardé Angèle lorsqu'il avait posé la question, seule la mine de celle qui avait un sale caractère avait retenu son attention. Et justement, celle-ci venait de passer de la satisfaction à... était-ce de l'agacement ou bien...

Ou bien rien du tout, car Fabrice qui venait de lui donner une tape dans le dos, le fit hurler de douleur.

— Il était temps que tu te reconnectes. Tu étais sur le point de baver, se moqua ce dernier avant de prendre le chemin des sanitaires.


On dirait que Luce et Ange commencent à rentrer dans un petit jeu de provocation

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On dirait que Luce et Ange commencent à rentrer dans un petit jeu de provocation... Est-ce que cela veut dire que les choses ont changé ?

Baisers salés (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant