Chapitre 4

642 117 29
                                    


Chapitre 4.

En rentrant, elle eut la surprise de découvrir son père en grande discussion avec un homme dans le salon.

— Ah, Perséphone, tu es enfin rentrée. Approche, j'ai à te présenter quelqu'un.

Prenant le soin de défroisser sa robe et de passer une main dans sa chevelure pour s'assurer d'être présentable malgré le fait qu'elle venait de galoper à toute vitesse pour rentrer, elle s'avança dans le salon pour se figer aussitôt.

Cet homme. Ces yeux bleus et envoûtants, mais surtout cette chevalière ornée d'une lune qu'elle pourrait identifier parmi des centaines d'autres. Elle le reconnaissait : c'était l'inconnu avec lequel elle avait valsé l'autre soir. Que faisait-il ici ?

— Voici Marcus, lui présenta son père, il est venu nous rendre visite. Il loge chez un ami pour quelques jours.

La blonde resta bouche-bée. Alors qu'elle était immobile, Marcus s'avança et, comme l'autre soir, lui baisa la main. Elle ressenti, une fois encore, cet étrange magnétisme qui l'unissait à cet homme dont elle ignorait tout.

— Je suis ravi que vous deveniez ma femme.

Elle fut incapable de retenir plus longtemps les questions qui s'agitaient dans son esprit. Elle releva le menton pour regarder son fiancé droit dans les yeux, ce qu'une lady bien élevée ne devait généralement pas faire. Une sorte de révolte brillait au fond de ses prunelles vertes.

Vous ! fit-elle sur un ton accusateur. Pourquoi m'avoir caché qui vous étiez l'autre soir ?

Il avait, après tout, refusé de lui donner son prénom, alors qu'il devait pourtant très bien savoir qui elle était.

— Je ne voulais pas d'a priori entre nous, milady, je craignais que vous me teniez rancœur et que connaître mon identité gâchât votre soirée. Je tenais à rencontrer ma future femme avant d'officialiser les fiançailles.

Et voilà qui était chose faite. Marcus lâcha sa main qu'il tenait encore. C'était comme si la peau de Perséphone brûlait à l'endroit où il l'avait touchée.

— Êtes-vous satisfait de ce que vous y avez vu ? l'interrogea-t-elle à nouveau après avoir déglutit.

— Voyons, Perséphone, lui dit alors son père, un peu de respect pour les invités ! Nous t'avons mieux élevée que ça !

Marcus se tourna vers son père et sourit.

— Ce n'est rien, Monsieur Wood.

Quelque chose dans son regard semblait dire « je les aime fougueuses ». Il se pencha pour que ses lèvres soient au plus près de l'oreille de Perséphone et répondit dans un murmure :

Très.

Puis, il se recula et prit son manteau et son chapeau haute-forme laissés sur le canapé.

— Nous nous reverrons donc à l'Église dans un mois pour le mariage. D'ici là, j'essaierai de passer, tant que je suis encore dans le coin, aussi souvent que possible pour que nous ayons l'occasion d'apprendre à nous connaître un peu plus avant le grand jour, toujours sous la supervision de votre père ou de votre gouvernante, bien entendu.

Ayant enfilé son manteau, il les salua une dernière fois et quitta le manoir. Perséphone resta muette.

— Alors, comment l'as-tu trouvé ? l'interrogea son père. Je trouve qu'il s'agit d'un jeune homme très élégant. C'est un exploit d'avoir si bien réussi en affaires à un si jeune âge.

Perséphone se retint de lui répéter toutes les choses que Lawrence lui avait raconté au sujet de Marcus. Allait-elle épouser un escroc ou... pire, un assassin ? Il la fascinait autant qu'il l'effrayait.

— Il est... charmant, s'efforça-t-elle de dire.

Il fallait dire que Marcus Blackstone était un bel homme. Ses yeux étaient d'un bleu glaçant, ses cheveux sombres et sa peau blanche comme la neige. Il était très grand et son visage était harmonieux, mais sévère et fermé. Et même si elle n'avait parlé avec lui que quelques instants, elle était forcée d'admettre qu'il s'exprimait avec un grand charisme, chaque parole qu'il prononçait semblait avoir été soupesée et réfléchie.

— Je suis persuadé qu'il sera un bon parti pour toi. Je ne pouvais pas rêver d'un meilleur gendre.

Et si cela pouvait régler les dettes de son père... Perséphone l'épouserait.

— J'en suis certaine, père, vous voulez le mieux pour moi. Je me sens un peu fatiguée, alors si cela ne vous dérange pas, je vais aller m'allonger.

Elle sentait qu'elle allait craquer si elle restait plus longtemps. La blonde tremblait légèrement.

Après avoir pris son congé, elle grimpa rapidement l'escalier du manoir en tenant ses jupes pour s'enfermer dans sa chambre. D'un seul coup, la tension redescendit et elle s'attribua un moment pour être triste, triste parce qu'elle devait épouser un homme qu'elle ne connaissait pas, triste parce que sa mère était morte et triste parce que son père était criblé de dettes. Or, elle se considérait si chanceuse de vivre la vie qu'elle avait alors qu'elle aurait pu encore être à l'orphelinat qu'elle ne s'autorisait pas à vivre de telles émotions en public. Mais seule dans sa chambre, elle s'effondra sur son lit et pleura, la tête nichée dans son oreiller pour éviter que quiconque entende quoique ce soit de ses plaintes.

Quand elle fut calmée, elle enfila sa tenue de nuit qui se composait d'une robe blanche en lin très ample serrée aux poignets et disposant d'un léger décolleté. C'était plus confortable pour dormir que les robes du jour et le corset, mais restait élégant pour que la lady soit présentable lorsqu'elle dormait avec son mari.

Comme ses yeux étaient encore un peu rouges, elle demanda à la gouvernante de lui apporter une bassine d'eau pour s'asperger le visage. Une fois rafraichit, elle s'allongea pour dormir, tentant de penser à autre chose que son mariage prochain. 

 

Oops! This image does not follow our content guidelines. To continue publishing, please remove it or upload a different image.
L'Esprit du printempsWhere stories live. Discover now