Chapitre 21 - LA TRAVERSEE

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Les deux soleils apparaissaient à peine, et inondaient l'horizon matinal d'une lumière rosée, lorsque, sur les quais de la rivière ORINIA, prés des remparts de la ville, le cortège royal embarqua sur les navires.

Il y avait cinq longs bateaux de bois du nord, à la longue proue pointue relevée vers le ciel.

La reine en armure couleur argent, sa garde et San O embarquèrent sur celui de tête alors que les sages et leur escorte prirent place dans le second. Les trois autres navires accueillirent plusieurs dizaines de soldats.

Bientôt, toutes voiles dehors, la flotte royale appareilla lentement sous les ovations de la foule. Les dontariens étaient descendus en masse pour assister au départ de la reine, la clé lumière et leur cortège. Il est vrai qu'ils emportaient tout l'espoir des peuples de lumière, vers l'île des fées. Cette île, située à l'extrême sud du cap d'ALGANIR était la dernière contrée connue avant l'insondable océan. Peu de gens sur THO connaissaient son existence, et encore moins ce qu'elle représentait. C'est pourquoi ce départ et la rumeur de son étrange destination achevaient de lui donner un côté magique aux yeux de la plus-part des spectateurs.

Les heures passèrent et les voyageurs du fleuve purent voir s'éloigner les tours de la capitale ainsi que le petit massif montagneux de la porte de DONTARA.

Après le passage aux abords de la cité humaine, le fleuve ORINIA serpentait sur quelques dizaines de métalicres. Il traversait une campagne verte et richement cultivée avant de se diviser en plusieurs bras et d'étaler son delta à travers le marais des brumes.

A ce stade de leur parcours, le paysage offrait une vision infinie de landes désolées, humides et inondées, où s'élevaient ça et là les silhouettes inquiétantes d'arbres morts aux branches crochues et menaçantes.

Le vent s'était levé et s'engouffrait dans les larges voiles du mat unique de chaque navire. Les coques semblaient désormais glisser sur le marécage. Elles fendaient l'épaisse couche d'herbes hautes qui s'élevaient au dessus des eaux saumâtres. Une épaisse brume était tombée et les passagers de chaque bateau ne pouvaient voir ni devanciers ni suivants.

C'est dans cette ambiance silencieuse et glauque que Nellis, quittant l'arrière du bateau où était rassemblée la garde des sages, traversa les rangs de ces derniers pour se diriger vers l'avant, où Kess, assis à l'écart du groupe de vieillard, semblait se faire tout petit.

- Alors, seigneur sage, vous sentez vous à l'aise parmi vos nouveaux compagnons de route ? fit-elle à voix basse, en s'accoudant au bastingage, prés du nain.

Ce dernier soupira :

- C'est difficile à dire. Pour l'instant aucun ne m'a adressé la parole. Il semble qu'ils soient trop absorbés par les évènements à venir, pour se douter de quoi que se soit à mon sujet.

Kess releva les yeux vers Nellis. Elle scrutait, sous son casque de métal rouge, le paysage désolé qui défilait sur le coté du bateau.

- Et toi, te sens-tu l'âme d'un garde du conseil ?

- Ces gardes n'ont rien à voir avec les minables soldats auxquels nous avons eu affaire. Ce sont tous des hommes sérieux et droits. Ils ne parlent que rarement. On dirait des pantins. Des pantins qui se foutent de savoir si je suis une fille ou une traîtresse.

Nellis se tût. Alken le veilleur approchait, heurtant à chaque pas le pont du navire avec son sceptre de cristal.

- Mon brave Kenlau, je crois savoir qu'en tant qu'habitant des terres du nord, ton peuple et toi n'avez guère l'occasion d'admirer pareils paysages. Je crois même que peu de nains se sont aventurés dans les parages.

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