WINGS | BTS

1.4

«Je ne fais qu'endurer,
Car c'est tout ce que je peux faire.
Je veux m'accrocher,
Je veux continuer de rêver.
Mais l'heure est venue,
De partir.»

Jin se trouve assis devant son assiette vide sur une table peu remplie dans une grande salle à manger dont la seule source de lumière émane d'entre les rideaux tirés. Il est seul, comme tout les jours depuis un bon moment. Et ne fait que supporter sa solitude dans ses nombreuses nuits d'insomnie, où la peur prend le dessus, où ses dents claquent et des sueurs froides lui monte à la tête comme une odeur de soufre. La solitude lui dépose des mots terrifiants au creux de l'oreille quand il se tourne et contrôle son esprit pour le faire partir en vrille.

C'est alors qu'il aperçoit son meilleur ami de lycée, Namjoon. Il ne l'a pas aidé quand il en avait besoin. Namjoon souffrait et il n'a rien fait. Il suppose que c'est donc le karma qui a causé sa chute du navire en direction de sa vie parfaite.

Et quand il se relève pour reprendre ses esprits, il se retrouve perdu. Comme si il ne vivait plus dans sa maison mais dans celle de quelqu'un d'autre, il parcoure les longs couloirs et se rend compte qu'il n'arpentait que les sien et se trouve ridicule. Il retourne donc se coucher et tente désespérément de trouver le sommeil afin de n'avoir ne serait-ce qu'une nuit complète de sommeil sans hallucinations, sans gêne, sans perturbation, sans cauchemars. Mais ce n'était tout bonnement pas possible pour lui. Depuis des jours, des mois, des années qu'il vivait seul à la recherche de son bonheur.

Il avait fait fuir sa copine qui ne supportait plus de le voir se lever chaque nuit et se parler à lui-même comme si il s'adressait à une vraie personne au fond de la chambre, dans l'obscurité du coin derrière la porte ouverte. C'était beaucoup effrayant pour elle. Mais en réalité il ne se rendait même pas compte qu'elle était là et qu'il se trouvait dans leur chambre. Il se revoyait chaque soirs dans la rue, en train d'interpeller Namjoon sous sa capuche, le voir partir et s'insulter lui-même de ne pas avoir agis sur le coup de la colère, de l'incompréhension et à cause de son jeune âge. Ils n'étaient encore que des gamins et ne se rendaient pas compte que la vie était précieuse et que les amitiés se faisaient de plus en plus rares. Qu'on se devait de protéger les siens. Il ne savait pas à quel point son ami était psychologiquement bouleversé et n'avait apprit que quelques semaines plus tard que sa mère l'avait jeté à la porte, sous la pluie, sans nourriture et avec à peine de l'argent pour tenir un mois. Au début, il s'était rangé du côté de la vieille femme. Il pensait à force que son ami avait bel et bien fait exprès de déclarer si tard sa phobie.

Mais depuis, plus aucune nouvelle de lui n'était parvenu, mis à part quelques fois quand il parlait encore à Jungkook. C'était d'ailleurs le seul à se soucier réellement de Namjoon, à l'avoir cru entièrement et à l'avoir défendu auprès de sa propre mère. Jin avait comprit au fil des années, en grandissant et en mûrissant qu'il avait fait une erreur. Mais c'est certainement trop tard, il ne sait même pas si Namjoon est encore en vie et si c'est le cas, il ne sait pas si il a retrouvé une vie normale ou encore si il se souvient de lui. Jin s'était fait à l'idée qu'il était mort, depuis longtemps. Mais il ne se passe pas une seule journée sans que son ami ne vienne s'immiscer dans ses pensées, et que la culpabilité ne s'installe. Si toute cette histoire est censée être close depuis des années, pourquoi souffre t-il encore et se sent-il impuissant ?

Pourtant, malgré ses regrets, il ne pouvait s'empêcher de rêver. Entre deux insomnies et quelques tasses de café, il pensait à sa vie rêvée. Il s'était fixé comme objectif de voler comme il l'a toujours fait dans ses rêves. Pour lui, voler permettait de tout oublier, de découvrir de nouveaux horizons impossible à déceler en terre ferme. C'est aussi pour lui un moyen de s'échapper quelques secondes de sa vie et de profiter d'une bouffée d'air pur, comme en foret. Il le savait, il le voulait. Il volera. Un jour, il déploiera ses grandes ailes d'ange déchus et laissera ses problèmes et ses anxiétés au sol pour s'envoler dans les airs afin de ne penser qu'à une chose : être libéré.