3. Panne d'inspiration et apparition de Léon

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Le prof finit par jeter son dévolu sur Félix :

— VOUS ! cria-t-il en le désignant du doigt. Descendez !

— O.K. ! dit Félix qui se précipita en bas de l'amphi après avoir lancé un clin d'œil à Mélodie.

Palombo (car tel était son nom) prit un air renfrogné et lui jeta en remuant ses petits doigts boudinés :

— Jeune homme, vous êtes la parfaite illustration de la banalité. Allure pseudo-sportive, coiffure qui se croit originale, visage passe-partout. Vos chances de percer dans le milieu du spectacle avoisinent zéro.

— Je vais vous faire changer d'avis, dit Félix qui, à la stupeur générale, se mit à marcher sur les mains.

Une élégante pirouette et il se remit sur ses pieds. Puis il fit quelques pas de danse autour de son prof qui n'en menait pas large, s'empara d'une de ses mains et le fit vriller de façon gracieuse.

Essoufflé, suant mais ravi, Palombo était hilare et le renvoya à sa place :

— O.K., je vous concède que vous avez le flow. Allez-vous-en.

— T'as un de ces culots ! lui dit Mélodie admirative une fois qu'il se fut rassis à côté d'elle.

— Faut juste faire preuve de psychologie, lui expliqua Félix en souriant de toutes ses dents. Ce prof est un frustré, ça se voit. Il mourrait plutôt que de l'avouer, mais il s'est senti flatté et rajeuni que je danse avec lui.

— Je suis tracassée, poursuivit Mélodie une fois une fois que le cours eut pris fin et qu'ils se furent engagés dans un petit chemin qui s'enfonçait dans le parc. Bianca, Amy et Cynthia m'ont mise au défi de les rejoindre demain à Manhattan Beach et de nager avec elles.

— Je te le déconseille, dit Félix. Je ne voudrais pas qu'elles t'entraînent dans un endroit dangereux. Je connais ces filles. Elles sont new-yorkaises, comme moi. Elles connaissent l'endroit comme leur poche. Entraîne-les plutôt sur ton terrain.

— C'est-à-dire ?

— La piscine !

— Pas sûr qu'elles acceptent...

Les cours ne reprenaient que l'après-midi et ils discutèrent encore longuement. Mélodie était enchantée par la bienveillance que lui manifestait ce garçon jovial.

— Je dois y aller, lui dit-elle.

— J'espère que tu ne tarderas pas à me foncer dessus tête baissée. Si c'est la condition à remplir pour engager la conversation avec toi...

Madison était penchée sur des partitions, des écouteurs sur les oreilles, et elle ne leva pas le nez quand Mélodie fit irruption dans la chambre.

Notre héroïne s'empara de son carnet et tenta de trouver les notes d'une nouvelle chanson, mais elle ne parvenait à rien de bon. Au lieu de consigner sur le papier la note qui lui était venue en tête, elle l'enfourcha et monta dans les nuages au milieu desquels elle se mit à slalomer, entourée d'hirondelles qui lui adressaient des encouragements. Mais la note n'était qu'une bulle de savon irisée et elle ne tarda pas à éclater. Mélodie se sentit tomber, tomber et se retrouva en état de choc devant son carnet.

— Je ne sais pas ce que t'es en train d'écrire mais tu fais peur à voir, lui lança Madison en rajustant ses immenses lunettes et en posant ses écouteurs sur son bureau.

Elle cherchait à ne pas le laisser transparaître mais elle était de toute évidence inquiète pour sa colocataire.

— Je vais souffler dehors, lui dit Mélodie.

Peut-être cela réveillerait-il son inspiration si elle se rendait dans la salle du club My music, my dream. Elle fit un détour par les toilettes du dortoir où Cynthia était occupée à se remettre du gloss.

Mélodie prit peur. Dans la glace, elle voyait un visage terreux, des yeux ternes, des traits défaits.

Ce n'est pas ainsi que je vais séduire Félix, se dit-elle...

— Alors, la petite cruche, lui lança Cynthia, t'essaie de te refaire une laideur ?

— Tu trouves pas un peu paradoxal de rien avoir dans la tête et d'avoir peur du vide ? lui demanda Mélodie que le culot de Félix avait enhardie.

— Comment ça j'ai peur du vide ? s'indigna Cynthia. Dans tes rêves ! Pour preuve, j'ai pas peur de toi !

— Prouve-le moi en me rejoignant demain à la piscine avec tes deux copines, lui jeta Mélodie avant de s'éclipser en claquant la porte.

Puis elle se dirigea vers la salle. Où, malheureusement, se trouvaient Bianca et Amy.

— On veut pas de toi ici, dit Bianca. Commence déjà par ressembler à quelque chose, après on discutera.

— Je ressemble à quelque chose.

Bianca éclata de rire.

— Ça y est ! Je viens de mettre le doigt sur ce qui ne va pas chez toi ! Ta voix ! Elle est moche, elle manque de substance ! À l'image de sa propriétaire ! Je n'ose imaginer les sales résultats que tu vas obtenir en chant !

Amy ricana en se remettant une mèche rousse derrière l'oreille.

C'est alors que Léon, le garçon déplaisant qui ressemblaità Adrien Agreste et dont Mélodie avait fait la rencontre le jour où elle avait pris le ballon de Félix sur la tête, fit irruption dans la salle. Se pouvait-il qu'il fût lui aussi étudiant à l'école Summer ?

— Salut Bianca, dit-il en embrassant langoureusement la jolie blonde. Mon prof de compta n'est pas là aujourd'hui et je me suis dit que je pourrais passer te voir. Je savais que je te trouverais là.

— T'as eu entièrement raison ! roucoula Bianca.

Mon prof de compta ? pensa Mélodie. Il doit donc être en école de commerce.

— Tiens ! dit Léon en remarquant Mélodie. La pétasse à lunettes !

Mélodie fut saisie d'horreur par la grossièreté du personnage.

— Félix m'a parlé de toi, ajouta-t-il. Te fais pas trop d'idées, il fait semblant de te draguer. Jamais il te touchera, t'es trop moche...


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