Coup de gueule

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Nom: Harriez
Prénom: Noah
Classe: 1B

Évaluation de philosophie
SUJET B: DÉMONTRER QUE LA SOCIÉTÉ MET NATURELLEMENT DE CÔTÉ LES MINORITÉS

T̸o̸u̸t̸ d̸'a̸b̸o̸r̸d̸, l̸a̸ s̸o̸c̸i̸é̸t̸é̸ d̸i̸s̸c̸r̸i̸m̸i̸n̸e̸ l̸e̸s̸ m̸i̸n̸o̸r̸i̸t̸é̸s̸ e̸n̸

Pfiouuuu...
J'étais bien parti pourtant. Belle mise en page, belle écriture, beau connecteur logique.

Je sais.
Noah ! Tu es un élève si brillant, pourquoi n'as-tu pas fait ton contrôle tranquillement comme tous les autres, pourquoi être parti si loin, pourquoi cet hors-sujet à ton examen ?

Déjà, sachez deux choses : De un, ce n'est pas un « hors-sujet », comme vous allez vous amuser à me le dire...
C'est un coup de gueule. Un bon gros coup de gueule avec les gros mots, la vulgarité et l'insolence qui vont avec. Et j'espère qu'il vous restera en travers de la gorge, Mme. Germain.
De deux, j'en ai marre que la philosophie se résume encore et toujours à expliquer l'avis et le point de vue de brillants Hommes (avec un grand « H », l'oublier serait un blasphème total, attention !), et jamais à aiguiser notre pensée. Je suis dans un esprit si étriqué. Nous sommes dans des esprits si étriqués, dans l'incapacité d'être lucides, d'être autonomes. Vivre en société mon cul, comme si elle nous renforçait !

Vous voulez mon avis, Mme. Germain ? Évidement que non.
Mais ce coup de gueule nique ma copie et ma moyenne pour une bonne raison, qui est de vous afficher ce que je pense.
Et ce que je pense, c'est que la société nous affaiblit. Attention, parce que je vous vois venir, je ne dis pas que vivre en communauté est un mal, je dis que vivre en société est un obstacle.
Et c'est là que vous entrez en jeu, que votre leçon de philosophie qui m'a fait apprendre par cœur un grand nombre de définitions stupides n'est finalement pas si inutile que ça !

Je vais vous démontrer par a + b, même si l'on n'est pas en maths, que la communauté et la société sont deux choses totalement différentes. La société est l'ensemble des personnes entre lesquelles existent des rapports durables et organisés (avec des institutions, etc.), c'est le milieu humain par rapport aux individus. La communauté est un groupe social dont les membres vivent ensemble, ou ont des biens, des intérêts communs.
Voilà la différence. La société est organisée.
Chacun y a sa place, puisque chacun y a des rapports directs ou non avec les autres individus.
Mais en fait, elle l'est mal.

Organisée.

La société est mal organisée. Et c'est pour ça que beaucoup d'individus n'y ont en fait par leur place.

La communauté elle, c'est juste le groupe. L'ensemble des personnes, le tout.
Un tout pas encore dirigé par des règles de vie insensées. Un tout pas encore organisé, pas encore amené à l'état de société.

Alors vous m'aviez demandé pourquoi est-ce que la société mettait de côté les minorités ? Tout simplement parce que les minorités sont celles à qui l'on a pas su trouver une place. Ceux à qui on ferme la porte parce qu'il n'y a pas assez de pièces.
Ils sont moins, alors ils ne savent comment faire pour, comme ils aiment le dire « niquer le système ».
Parce qu'après tout, qui a déjà réellement réussi à le « niquer » ce bon vieux connard de système ? C'est lui qui nous nique.

Tous.

Autant les majorités, autant les minorités...
Tous je vous dis.

On a plus la possibilité de le réinitialiser, le système, mais il est défaillant.
C'est comme une prise électrique défectueuse à laquelle on continue de brancher toutes sortes d'appareils. Elle s'use encore plus. Elle devient dangereuse.

Dangereuse pour ceux qu'elle alimente, et surtout pour elle-même.

Alors je vous ai pas fait trois beaux paragraphes construits avec des connecteurs logiques, madame.
J'ai pas suivi point par point la fiche méthode que vous avez projeter au tableau l'autre jour, celle dont, si on arrive à en saisir le sens, on pourra tirer un 20/20. J'ai pas mentionné tous ces philosophes de l'antiquité et leurs citations qui remettent en question mais pas en ordre. Je ne m'attends pas à ce que vous me donniez une mauvaise note. Un 0 m'irai parfaitement.
Un petit 0 suivi d'un commentaire du style « hors-sujet ».

Ah ça oui, je vous le dis, je l'attends, mon « hors-sujet ».
Parce qu'en plus je suis totalement dans le sujet. Dans mon sujet.

En faisant n'importe quoi, j'ai quand même réussi à un peu le niquer, non, notre putain de système ?

... J'espère.

Bon, j'ai menti, je ne veux pas une mauvaise note, à vrai dire.
Je n'en veux pas du tout.
Ma parole, mes pensées, ma vision du monde, ma manière de m'exprimer...
Personne n'a à noter cela. Tout ce que je viens d'écrire, c'est pas à évaluer...

Oh, vous le ferez quand même, aucun doute.
Peu importe.

Je l'ai fait, mon coup de gueule.
C'est tout ce qui compte.



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Tu ne l'auras pas, ton « hors-sujet », Noah. Bien sûr, c'est tout ce que tu mérites, mais plutôt que te donner ce que tu devrais obtenir, je vais te faire une belle leçon de morale :
Ton coup de gueule, comme tu dis, ce n'est pas de l'audace. Ce n'est rien qu'une petite rébellion de lycéen qui pense faire un geste significatif. Tu veux quelque chose d'audacieux, Noah ?

Voilà :

20/20

Là, je l'ai véritablement niqué, ton système.
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