À la villa rose du milliardaire, la détective visionnait le journal local. Pour le moment, on ne parlait pas de son enquête. Rayan apporta un jeu de cartes :
— Une petite partie de cartes, Nora ? Ça stimulerait tes neurones, invite le milliardaire en prenant place sur la table du salon.
— Bien sûr. Mais depuis quand les jeux de cartes stimuleraient les neurones ?
— Les jeux de stratégie pour joueurs confirmés mettent à l'épreuve les neurones dont le cerveau. Les parties de cartes demandent de prendre en compte plusieurs paramètres différents et d'anticiper leur évolution avec plusieurs tours d'avance, disait Rayan en mélangeant les jeux de cartes.
— On va jouer à quoi ?
— Connais-tu le jeu du FLIP, Nora ?
— Non. C'est quoi les règles ?
— Le FLIP est un jeu de cartes qui exige de la concentration, de la rapidité et de l'observation. Ça se joue à deux joueurs. L'objectif est de se débarrasser de ses cartes le plus vite possible en réalisant des suites de cartes. À mon compte à rebours, on retourne en même temps toutes les cartes en terminant par celle du milieu. On essaye d'en poser le plus vite possible. Elles doivent superposer ses cartes, peu importe qui a commencé le jeu. On joue tous les deux en même temps, il n'y a pas de tour.
— Et pourquoi vous posez quatre cartes ? C'est comme le jeu du Solitaire ?
— Oui sauf qu'en Solitaire, on joue à tout de rôle. Et l'ordre des cartes doivent être croissante. Dans le FLIP, chacun des cartes sont inférieur et supérieur. Et la partie se déroule face à face. Si les cartes du milieu sont identiques, le premier joueur, en criant le mot « FLIP », obligera l'adversaire à prendre toutes les cartes du milieu. Ensuite, chacun de nous posera sa nouvelle carte au centre de la table pour commander la suite de notre partie. Il arrive des cas où aucune des cartes posées ne nous permettront pas d'y jouer. Dans cette situation, les cartes seront remises par les joueurs en même temps sous le paquet à leur place. Chaque paquets de cartes doivent rester posés sur la table. Les joueurs utiliseront, pour les plus habiles, qu'une seule main pour manier les cartes, explique le propriétaire de la villa en mélangeant les cartes.
— Une seule main ?!
— Une seule main.
— Waouh, ça m'a tout l'air d'un défi de taille. Et comment on gagne la partie ?
— Le gagnant est celui qui n'a plus de cartes. As-tu compris les règles, Nora ?
— Moyen.
— Ne t'inquiète pas. Je serai ton jedaye. Je serai tout bon conseil pour toi. La pratique t'aidera pour mieux déchiffer ce jeu. Et je suis sûr que mon enseignement en matière de cartes t'aidera à démasquer ton criminel, Nora, rassure le PDG en lui mettant son paquet de cartes.
— Y a intérêt, Rayan. J'attends que tu fasses de moi une joueuse de cartes redoutable en cas où si le voleur passera à l'attaque au casino, insiste la détective d'une voix déterminée.
— Soit alors. Que le jeu commence, ma belle Nora.
Depuis quand Rayan appelait son chef détective ainsi ? Tout simplement parce que ce petit bout de femme est tout simplement un ange aux yeux PDG. Sa rencontre avec la détective dès le premier regard lui chauffait son cœur. Parfois la vie permettait de rencontrer des gens formidables. Puis, il suffisait d'échanger quelques mots pour comprendre qu'elles ne sont pas comme les autres et qu'elles seront indispensables au yeux de la personne. Et c'est ce que désirait le milliardaire plus que n'importe quelle personne sur Terre. Nora était beaucoup trop concentrée à comprendre les rouages du nouveau jeu de cartes qu'était le FLIP.
— Pose ta première carte caché face à la mienne, répète l'homme d'affaires en posant sa carte à dos sur la table de sa pile.
— Ok, acquiesce la détective.
Nora mettait sa première carte à dos. Elle ne se rappelait plus ce qui faut faire ensuite. Elle observa Rayan puis lui demande :
— Qu'est-ce que je fais, ensuite ?
— Maintenant, prends trois cartes. Je ne dois pas les voir. Et vice et versa, explique le businessman en effectuant le geste.
Nora répéta le geste de son nouveau professeur : elle prit ses trois cartes et les cacha. C'est pas évident pour un débutant de se lancer dans une partie endiablée. Elle paniqua :
— Et maintenant ?
— Laisse moi faire.
Le PDG tournait les deux premières cartes. C'était un As de trèfle noir et un As de cœur rouge. Il parla d'une voix plein de sagesse :
— Il y a trois consignes à respecter.
— Lesquelles ?
— Comme je te l'avais dit, ça fonctionne un peu comme le Solitaire. Déjà dans la quantité. Mais on peut poser également une carte de la même couleur ainsi que de la même forme, explicite l'expert en la matière.
— Ok. Et si il me reste une carte entre mes mains ? Quémande la détective.
— Tu en piocheras deux. Et ça s'enchainera. C'est une question de rapidité.
— D'accord. Je suis prête à t'affronter, cria Nora, motivée.
Le jeu se fonctionnait à une seule main. La détective séduisait le milliardaire par sa rapidité et sa dextérité de manier les cartes. La partie s'enchaînait tel un TGV à grande vitesse. Elle posa sa dernière carte qui était le joker sur le roi de carreau.
— Bravo, Mademoiselle Kaddour. Tu as gagné. Tu m'impressionnes.
— Merci.
— C'est un véritable coup de joker que vous m'avez montré, complimente le PDG.
— Un coup de joker ? Déchiffre Nora, d'un air énigmatique.
La détective n'a jamais entendu cette expression dans la langue de Molière. Le PDG expliqua son expression tirée de sa propre invention :
— J'ai innové ce jeu de mot quand je gagne une partie ou un joueur gagne au casino. Ça veut dire un coup de maître. C'est une revisite de l'expression "un coup de poker".
— J'adore, répondit la jeune femme.
Nora baillait. La nuit à la banque l'avait épuisée. Elle regretta. Une pointe d'amertume envahissait son esprit :
— Dommage que le criminel ne soit pas pris dans les mailles du filet. On l'avait presque.
— On ne peut pas tout réussir du premier coup, Mademoiselle Kaddour.
— Tu as raison. Espérons qu'il n'y ait pas de mauvaises nouvelles, croit la jeune femme.
— Espérons le également, accorde Rayan en rangeant son paquet de cartes.
— Où vais-je dormir ? Demande Nora en éteignant la télévision.
— C'est la porte blanche au deuxième étage juste en face de ma chambre. Ce sera ta chambre à partir d'aujourd'hui, précise le milliardaire.
— D'accord. Merci pour les conseils que tu me donnes. C'est bénéfique et enrichissant pour mon enquête. Monsieur Henry et Madame Duroy ont raison. Tu me seras très précieux dans cette nouvelle aventure et pour ma vie professionnelle. J'ignore encore ce que ton savoir me réservera. Et j'espère que ce sera que des bonnes choses avec toi.
— Ce sera une de tes meilleures investigations que tu n'auras jamais faite. Tu as ma parole, Nora, promet l'homme d'affaires.
— Je te crois. Bonne nuit, Rayan. À demain, murmure la jeune femme en montant les escaliers.
— Bonne nuit, ma Nora, susurre le bel homme d'une voix de velours.
La fille de monsieur Kaddour s'en allait. L'homme d'affaires soupira. Cette femme était tout simplement géniale. L'amour s'introduisait bien souvent sous le voile de la friendzone. Ah ! L'amitié était l'union de deux personnes liées par un amour et un respect égal et réciproque. Tel est le destin de Rayan et Nora, la vie était comme une partie de cartes. Si on veut la gagner, il faut arriver à se creuser la tête. Le secret est de dénicher la bonne stratégie pour toucher l'âme d'une belle demoiselle. Et le milliardaire avait encore beaucoup de cartes sous sa manche pour conquérir le cœur de la belle détective.