La Gardienne des Légendes ✷ T...

By NeoQueenSerenity28

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Elle n'est pas comme les autres. À la différence de toutes les créatures vivantes sur sa planète, Seira n'a p... More

☾ Avant-propos...
PROLOGUE
CHAPITRE 1 - Illusion
CHAPITRE 2 - Vérité
CHAPITRE 3 - L'Honorus
CHAPITRE 4 - Xemehys
CHAPITRE 5 - Renaissance
CHAPITRE 6 - Rapidiorem
CHAPITRE 7 - Pratique désastreuse
CHAPITRE 8 - Soleil Nocturne
CHAPITRE 9, PARTIE 1 - La Seizième
CHAPITRE 9, PARTIE 2 - La Seizième
CHAPITRE 11 - Survivre
CHAPITRE 12 - Armés de patience
CHAPITRE 13 - L'Heure de vérité
CHAPITRE 14 - Face à face
CHAPITRE 15 - Si tu savais
CHAPITRE 16 - Rester dans l'ombre
CHAPITRE 17 - Le temps n'est pas à perdre
CHAPITRE 18 - Maintenant ou jamais
CHAPITRE 19, PARTIE 1 - La vérité dans le mensonge
CHAPITRE 19, PARTIE 2 - La vérité dans le mensonge
CHAPITRE 20 - Le vrai courage
CHAPITRE 21 - Vivre ou mourir ?
CHAPITRE 22 - Lueur d'espoir
CHAPITRE 23 - La souffrance d'aimer
CHAPITRE 24 - Le Guerrier de l'Aube
CHAPITRE 25 - Délivrance
CHAPITRE 26 - Amiliation
CHAPITRE 27 - Solaris
CHAPITRE 28 - L'Eclipse
CHAPITRE 29 - Réminiscence
CHAPITRE 30, PARTIE 1 - Ad vitam æternam
CHAPITRE 30, PARTIE 2 - Ad vitam æternam
CHAPITRE 31 - Octotemporas
CHAPITRE 32 - Héritage
CHAPITRE 33, PARTIE 1 - Vainqueurs et vaincus
CHAPITRE 33, PARTIE 2 - Vainqueurs et vaincus
Remerciements
À quand la suite ?

CHAPITRE 10 - Reprendre où tout s'est arrêté

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By NeoQueenSerenity28

Point de vue de Seira

L'homme, le plus calmement du monde, s'avança vers nous, empruntant le pont. La poussière résultant de la destruction de la porte se souleva à son passage, traînée par sa cape couleur encre. Il donnait l'impression que le temps s'était arrêté. Son masque ne laissait rien voir de son visage, mais la quiétude glaciale dont il faisait preuve m'effraya davantage que s'il avait été déchaîné. Ma peau se para de chair de poule ; soudainement, je me mis à avoir froid, comme s'il avait aspiré tout le bonheur, toute la chaleur de la pièce.

La tension présente dans l'air prenait toute la place, nous empêchait de respirer, nous laissait pétrifiés. Les seuls qui paraissaient encore maîtriser leurs émotions étaient Meryl et Elyon. Isira ne parvenait plus à dissimuler son angoisse, la terreur débordant de ses prunelles comme un flot intarissable. Elle craignait pour nos vies, d'une intensité égale à celle qu'elle portait à celle de sa fille. Celle-ci, tendue comme un arc à deux centimètres de moi, ne quittait pas des yeux l'ennemi. Je lui pris la main, comme saisie d'un mauvais pressentiment. Elle sursauta à mon contact, puis accueillit l'étreinte en tremblant. Sa peur, qu'elle tentait pourtant de dissimuler sur ses traits, explosa dans ma poitrine, volcan en pleine éruption. Notre lien n'avait jamais été aussi solide, aussi présent.

Je ne parvins pas à comprendre au bout de combien de temps Archaos prit la parole. Tout ce dont j'étais sûre, c'est que ces premiers mots marquèrent le début de mon cauchemar, tout en me réveillant comme si l'on m'avait administré la plus puissante des claques.

— Tu sais ce que je cherche. Tu l'as compris récemment, d'ailleurs, formula-t-il d'une voix grave, s'adressant à Isira.

— Tu n'auras rien, frémit la concernée.

— Elle, en échange de la vie de ta fille et de tous ceux que tu protèges.

Je sentis ses deux yeux menaçants se poser sur moi, telles deux billes de malhonnêteté, onyx des enfers. Je m'efforçai de ne pas trembler, et relevai la tête. Devant moi, les ailes d'Elyon s'agitèrent ; ses plumes vibraient, frémissaient, se dressaient les unes sur les autres. Je mis une seconde avant de réaliser qu'il n'avait pas peur. Non, il bouillonnait de colère ! Le feu le consumait, animait chacune de ses cellules de Meridiem.  

— Comment te croire, après tout le mal que tu as fait ? Toutes les personnes que tu as tuées ? rugit la mère de mon amie.

Sa voix se brisa sur le dernier mot. Je me sentis faiblir quand je compris qu'elle pensait à mes parents. Xerys saisit mon trouble immédiatement et sa paume raffermit sa prise.

— Je ne te demande pas de me croire, mais d'obéir. Tu n'as pas le choix, Isira.

On pouvait sentir le sourire démoniaque dissimulé derrière son masque d'ici. Chacun des poils de ma nuque se dressa.

— Comment es-tu entré ? Comment nous as-tu trouvés ? s'enquit soudain Elyon, le regard dur et brisant l'échange.

Archaos parut interloqué une demi-seconde par l'intervention du guerrier ailé, tout comme moi : que ce dernier tutoie le plus grand criminel de notre Histoire me laissa foudroyée. Il n'avait peur de rien, pas même de lui ; mieux, il le dénigrait.

Le meurtrier de ma famille, habité d'une haine croissante, fouilla dans la poche de son large habit noir, puis en sortit un objet brillant. Lorsque je plissai les yeux pour augmenter la portée de ma vision, je distinguais un pendentif de diamant, au bout d'une fine chaîne en argent. Je le reconnus immédiatement, me repassant dans ma tête le souvenir qui m'était revenu plus tôt. L'artefact de ma mère.

— Il est très pratique. Je n'ai même pas eu à demander une autorisation pour entrer.

Sa voix avait pris une intonation mauvaise, presque satanique. Mes mains étaient moites, mes lèvres tremblaient.

— Quant à comment je vous ai trouvé... adresse-toi à Seira, Meridiem.

Son regard vil me heurta comme s'il m'avait bousculé. Je frémis, mais cette fois je ne sus si c'était de colère ou de peur ; la Gardienne des Légendes qui sommeillait en moi commençait tout doucement à se réveiller.

Elyon me dissimula un peu plus, ses ailes embrassant ma silhouette.

— C'est comme cela que tu t'appelles, n'est-ce pas ?

Je ne répliquai rien, sachant pertinemment qu'il connaissait déjà la réponse. Je relevai le menton. Il était hors de question que je me laisse impressionner par lui. J'abaissai l'aile d'Elyon qui me cachait de lui, et m'avançai. Même si je tremblais de la tête au pied, je me devais de lui faire face.

— Seira ! grogna Elyon, s'efforçant de rester calme.

Je l'ignorai, me concentrant sur celui qui avait tué mes parents.

Du coin de l'œil, je guettai Isira, muette depuis quelques instants. Elle n'avait pas perdu de temps : derrière son dos, le portail était presque établi. Encore une ou deux minutes, et il s'ouvrirait. Je me tendis, prête à bondir à l'intérieur. Mes poumons étaient obstrués par toute l'angoisse et la peur que je ressentais.

Archaos ne parut pas le remarquer, et continua d'étaler son orgueil, le pendentif de ma mère toujours balancé de droite à gauche dans le vide.

— Ta magie n'est pas très discrète, me dit-il, très sérieux. Elle a... une empreinte particulière. Très repérable... Et, en dix-huit ans, elle n'a pas changé.

Je serrai les poings. Mes ongles, pourtant coupés récemment, cisaillèrent ma peau.

Maintenant, seule me séparait de l'homme la paroi translucide de l'aegis. Je n'étais qu'à cinq mètres de lui, tout au plus. Et ça me rendait folle. Elyon fit un pas vers moi, et une aura rassurante me frôla comme une brise de courage. Je détendis mes épaules.

— Je n'ai pas tout mon temps, malheureusement, lâcha Archaos, son regard alternant entre Isira et moi. Je suis de bonne humeur, alors je vous le redemande : rends-toi, jeune fille, et je m'en vais.

Isira, la sueur coulant sur son front, prit la parole. Sa voix se répercuta dans chaque coin de l'édifice.

— Tu n'es sûrement pas seul, contrairement à ce que tu aimerais nous faire penser. Tu nous massacreras jusqu'au dernier, quoi que l'on dise.

— S'il y avait bien une chose que j'aimais chez Leia, c'est qu'elle savait se taire, répliqua l'homme froidement. N'essaye pas de me faire croire que tu ne tentes pas de gagner du temps, et encore moins que le cercle derrière toi n'est pas un portail.

Le visage de la Messagère se durcit. Le rythme cardiaque de ma Xemehys se calqua sur le mien, notre nervosité redoublant de plus belle. Respirer devint de plus en plus difficile, l'espoir s'effritait peu à peu, comme un tableau abîmé. Une plume d'Elyon me frôla la hanche, puis sa main se posa sur l'épaule de Xerys. Il pressentit avant tout le monde ce qui allait se passer : sans que nous ayons le temps de faire quoi que ce soit, une nuée noire et crépitante atteignit le dôme protecteur, qui sembla l'absorber.

S'alimenter de la magie de l'ennemi au lieu de simplement la rejeter. Intelligent.

Elyon n'esquissa pas un sourire, imperturbable. Mais Archaos, nullement décontenancé par la présence du bouclier, ne tarda pas à revenir à la charge. Une montagne de fumée charbonneuse s'éleva tout autour du temple, s'abattant sur le dôme avec fureur, telle une mer d'encre en pleine tempête. Derrière lui, six autres dragons noirs émergèrent d'au-delà du mur de l'Antichambre. Isira avait raison. Il n'allait pas tenir parole et il n'en avait jamais eu l'intention. Elyon ne fut même pas surpris ; il me dépassa, faisant barrière de son corps. La magie opérait déjà un feu d'artifice autour de ses doigts abîmés par toutes ses heures d'entraînement. Ma main se serra autour de mon arc, et je relevai le Profundeanus, brillant de mille feux. Il vivrait, n'aspirant qu'à une seule chose : passer à l'attaque. Mais moi, étais-je vraiment prête à tuer, ou même à blesser ?

— Le portail est prêt ! hurla Isira, peinant à se faire entendre. Allez-y !

Elle transpirait, les mèches de sa coiffure défaite collant à son visage. Ses mains tremblaient à cause de la pression qu'elle devait exercer sur sa magie afin de garder le sort actif. Xerys secoua la tête, les yeux rouges. Le chagrin qu'elle ressentait était si fort, qu'il se confondit avec le mien et me fit monter les larmes. J'entendais hurler son âme, et ça me tuait. Je voulus la prendre dans mes bras, la retenir, mais elle se dégagea et se posta à côté de la Grande Messagère, dégainant son épée.

— Je ne partirai pas sans toi !

— Il le faut pourtant, lui répondit tendrement sa mère, la gorge serrée.

Le ton doux qu'Isira avait employé jurait avec l'atmosphère cauchemardesque du moment.

Elyon, qui s'efforçait de consolider le bouclier en accusant assaut sur assaut, cria par dessus son épaule :

— Xerys, ton pouvoir n'est pas offensif, tu...

— Tais-toi ! le coupa Xerys, tremblante de colère.

Jamais je n'avais vu mon amie ainsi. La tristesse et la rage faussaient sa nature et lui faisaient perdre le contrôle d'elle-même.

Le visage d'Elyon se crispa, impuissant face à tant de désespoir. Puis, alors que celui-ci n'avait baissé sa garde qu'un centième de seconde, juste le temps d'un battement de cil, le bouclier se fissura. Mon corps agit avant que mon esprit ne l'ait ordonné : par pur réflexe, l'adrénaline débordant de mes veines, je courus auprès de l'ange noir et joignis ma magie à la sienne. À peine eut-il le temps de réaliser ma présence à ses côtés, que le dôme enfla, enfla, jusqu'à disparaître entièrement. Il explosa comme une bulle de savon, mais avec une déflagration mille fois plus forte qui manqua de nous faire tomber tous les deux. Elyon me rattrapa à temps, dans un mouvement d'une vivacité jamais vue. La panique prit possession de moi : encore une fois, sans que je ne puisse rien faire, ma magie m'avait glissée entre les doigts. Qu'est-ce que j'ai fait? Je m'attendis à ce que le jeune homme me hurle dessus, mais à la place, il se jeta devant moi, usant de ses ailes comme bouclier.

— Reste derrière moi.

J'obéis, tremblante, et tirai une première flèche, visant une Ombre. Ne réfléchis pas. Tire. Mon arc savait exactement comment faire : la pointe de cristal se planta de son épaule, et la créature poussa un hurlement guttural. Prenant confiance, je préparai une seconde flèche, prête à décocher une seconde fois. Mais, en ajustant mon point de tir, mes yeux rencontrèrent Meryl : cette dernière était occupée à régler son compte à une Ombre, combattant à une vitesse telle que je ne parvenais qu'à distinguer une forme floue. Un peu plus loin, la peur repoussée au fond d'elle, Xerys créait champ de force sur champ de force dans l'espoir de protéger sa mère. Puis, je le vis, dissimulé par la fumée : Archaos. Elyon le vit aussi, car il réussit à parer l'avalanche ténébreuse qui s'apprêtait à nous écraser comme de vulgaires insectes. L'effort se peignit sur le visage du Meridiem, et pourtant il n'était pas près de céder. Une colère sourde se mit à remuer mes entrailles. Comment faire pour l'aider ? Cependant, Archaos rompit brusquement le sort et, un battement de cil plus tard, il avait disparu. Impossible...

— Où est-il ? m'écriai-je, paniquée.

— Je ne sais pas, me répondit le Meridiem, à bout de souffle et scrutant chaque recoin de l'Antichambre, alerte.

— Je ne vais pas pouvoir tenir plus longtemps ! nous parvins depuis l'arrière la voix de la Grande Messagère. Meryl ! Fais-les passer !

Isira était exténuée : chacun de ses membres tremblait, la membrane de ses ailes tendue à l'extrême ; elle lâcherait avant une minute. Tout n'était maintenant qu'une question de secondes. À côté d'elle, le portail rayonnait de cette lumière violette, attendant patiemment ses voyageurs.

L'elfe ne put répondre, trop occupée ; deux Ombres s'acharnaient sur elle avec force, l'épuisant peu à peu. Une était étendue sur le sol, blessée au flanc. Il en manque. Où sont les trois autres? remarquai-je, les cherchant du regard.

Un son se mit à résonner dans toute la pièce, augmentant crescendo. C'était aigu ; strident. Je me bouchai précipitamment les oreilles, mon arc disparaissant dans ma tiare avant qu'il n'ait eu le temps de toucher le sol. Je crus que mon cerveau allait me sortir par les yeux. Qu'est-ce...?

Je ne pus réagir. Trois jets de flammes, provenant de la gueule des trois dragons noirs manquants, s'abattirent sur tout le sanctuaire. Le feu me lécha la peau, la fumée me brûla la gorge. J'avais conscience que mon réflexe devrait être de crier ; je n'y parvins pas. La chaleur qui aurait dû me carboniser ne m'atteignit même pas. Mais je n'eus pas le temps de m'attarder sur le phénomène, car deux mains m'attrapèrent la taille. Mes pieds désertèrent le sol d'un coup, puis le regagnèrent aussi vite qu'ils l'avaient quitté. Je n'eus même pas le temps de réaliser ce qui venait de se produire que j'étais debout, à côté du portail.

— Ne nous attend pas, passe-le ! m'intima le Meridiem, d'un ton qui n'autorisait aucune réplique.

Je secouai la tête. Pas sans Xerys, Meryl et Isira. Pas sans toi, voulus-je dire. Personne ne mourra aujourd'hui.

À cet instant, je ne sus que faire. J'étais pétrifiée, la peur m'obstruait les poumons, me brouillait la vue. Tout se déroulait trop vite sous mes yeux ; rien n'avait de sens. La situation était devenue catastrophique. Elyon allait ouvrir la bouche une seconde fois, espérant me faire réagir en me secouant par les épaules, quand un cri déchirant nous transperça les oreilles. Il provenait de Xerys.

On fit volte-face, redoutant ce que nous n'osions imaginer. Archaos était face à Isira, et menait face à face un combat des plus animés. Les sorts fusaient, la magie ne cessait d'aller et de revenir ; seulement, celle d'Archaos était bien plus aggressive, et Isira ne parvenait plus à la parer. Elle la subissait. Xerys était emprisonnée par les bras de Meryl et se démenait violemment, les larmes coulant maintenant à flots. L'elfe tentait de lui faire passer le portail tout en la protégeant des Ombres, mais les créatures étaient trop nombreuses. Une rafale souleva mes cheveux, et je vis Elyon les rattraper en un battement d'ailes. Ses mains se chargèrent d'une imposante sphère bleue, qu'il fit imploser dans les airs. La déflagration percuta de plein fouet les dragons, qui reculèrent, assommés. Un court moment de répit qui permit à Elyon de prendre Xerys dans ses bras, et Meryl de me tirer par le poignet. Une seconde après, on passa ensemble le portail. Sans que j'aie le temps de réaliser, le décor commençait déjà à se métamorphoser. Mon corps tanguait, et mes sens perturbés causèrent un violent mal de tête. Mais, avant qu'on ne disparaisse complètement, Isira se détourna. Elle planta son regard dans celui de sa fille, et lui murmura du bout des lèvres un message reconnaissable même sans un son pour le transmettre : je t'aime. Ses yeux dévièrent ensuite sur moi, puis sur Elyon et Meryl, et la Messagère hocha la tête. L'elfe et le Meridiem durent comprendre ce qu'elle voulait leur partager, car ils acquiescèrent en retour. Une seconde plus tard, la femme s'effondra, le regard vide, et l'on perdit de vue le paysage dévasté de l'Antichambre.

***

On réapparut dans une pièce ronde, qui offrait une possibilité de poursuite dans cinq couloirs différents. Et vu l'obscurité de l'endroit et la terre qui composait uniquement les murs, on était dans un ancien passage souterrain. Saphir, l'Amili de Xerys, était sagement assis dans une des galeries de gauche. Quand elle aperçut sa maîtresse, la louve noire se jeta sur elle. Xerys, inconsolable, tomba à genoux et étreignit sa Nocturnale en enfouissant son visage dans son épais pelage, le baignant de larmes. Ses longs cheveux blonds étaient recouverts de poussière et de sang, à l'instar de nos tenues.

Je me précipitai à ses côtés, et ce ne fut que quand ses bras m'enserrèrent le cou que je réalisai que moi aussi, je pleurais. Elle hurla son chagrin, noyant sa voix dans le tissu de ma robe, sa poitrine prise de sursauts violents et incessants. Je ne sus pas où je trouvais le courage, mais je l'obligeai à redresser la tête, et à me regarder dans les yeux. Ses prunelles tremblaient, peinaient à se concentrer sur un point, comme saisie de folie. Puis, s'immobilisèrent si subitement que mon cœur tressauta. Elles fixaient un endroit précis, derrière moi. Je me détournai.

Elyon était penché au-dessus de Meryl, allongée sur son flanc gauche. Le visage de l'elfe était devenu translucide et une mare de sang commençait à se créer en dessous d'elle. On se précipita à ses côtés, comme montées sur des ressorts. Quel enfer. Ce n'est pas vrai, c'est impossible...

— Juste avant qu'on ne passe le portail, une Ombre lui a lacéré le dos, expliqua Elyon, qui s'appliquait à combler de ses mains la plaie béante.

Le fait qu'il n'ait pu empêcher sa voix de trembler me saisit la gorge. Il avait mal, et bien plus que moi. Il ne pleurait pas, et pourtant son chagrin se transmettait dans ses yeux d'une manière encore plus redoutable que s'il l'avait fait.

Xerys me prit la main, retenant un cri. Elle la serra si fort qu'elle m'en coupa la circulation. Je n'osai imaginer ce qu'elle ressentait en cet instant ; sa mère venait de mourir sous ses yeux, et une femme qu'elle avait toujours aimée comme sa tante était sur le point de l'abandonner à son tour. Je me mordis la lèvre de toutes mes forces, tentant de ne pas craquer. Pour elle, pour être le roc dont elle avait besoin en ce moment précis.

Même si je n'avais connu Meryl et Isira que pour quelques jours, je les avais vraiment appréciées ; pire, elles faisaient partie des rares personnes que j'avais réellement aimées de toute ma vie.

— Partez sans moi, vite ! murmura l'elfe d'une voix haletante et désincarnée. Je ne m'en sortirai pas, je ne ferai que vous ralentir.

Xerys se jeta à son cou. Les mains de mon amie parcouraient le buste de l'elfe en tremblant, puis entreprirent de la défaire de son armure. Sanglotant, elle bégaya, aveugle d'un espoir fou :

— Non, Meryl, non... Laisse-moi essayer de te sauver.

L'elfe eut un sourire triste, et même si elle s'apprêtait à refuser, Xerys ne lui laissa pas le choix. Précipitamment, celle-ci ordonna à Elyon de reculer. Il obéit, bien qu'on pouvait voir dans ses yeux qu'il n'était pas convaincu. Une magie à la douce lumière verte s'échappa des paumes rouges de sang de Xerys, et vint s'enrouler autour de la poitrine de Meryl. Après une minute durant laquelle l'attente fut insupportable et surtout, où il ne se passa rien, Elyon posa une main sur l'épaule de mon amie.

— Xerys... Sa blessure est trop grave et tu es à bout de force. Je crois bien qu'il est trop tard...

Je caressai le dos de ma Xemehys, toute tremblante. Sa Nocturnale se blottit contre elle, poussant de petits jappements emplis de douleur. Xerys, même si on sentait qu'elle aurait aimé hurler son désaccord et essayer encore et encore, hocha la tête. Mieux que personne ici, elle savait que les chances de survie de Meryl étaient inexistantes.

Une minute passa, durant laquelle personne ne parla, respectant ce dernier moment si précieux.

— Xerys, murmura Meryl. Ça va aller, tout va bien. Chaque vie prend fin un jour ou l'autre et cela a été un honneur pour moi de passer la mienne en compagnie d'une jeune fille aussi merveilleuse que toi.

Ma Xemehys l'enlaça, les joues inondées de larmes. Elle parvint à acquiescer, incapable de prononcer un mot.

L'elfe tourna la tête vers Elyon, et je jurai que celui-ci avait les yeux rouges. Deux des femmes qui avaient fait partie intégrante de son enfance à la grotte disparaissaient aujourd'hui.

— Tu sais ce que tu as à faire, Elyon. Il est temps, croassa-t-elle.

La mâchoire du jeune guerrier se contracta, alors que les veines de ses tempes se mirent à battre violemment. Il finit par acquiescer, le regard sombre. Puis, les yeux de l'elfe s'arrêtèrent sur moi, et elle abaissa imperceptiblement la tête. Le respect que je lis dans ses prunelles me coupa le souffle, et je sentis les larmes recommencer à parcourir mes joues.

Puis, son crâne retomba mollement au sol, et elle récita, dans un dernier soupir :

— La victoire ne naît pas de la défaite, mais du combat véritable...

— ... le combat de courage, compléta Elyon.

L'elfe avait cessé de respirer ; ses paupières ne frémissaient plus. Une boule de magie violette s'échappa de sa poitrine, flottant lentement, puis s'envola dans le ciel. De la même manière qu'une étoile filante, sa magie avait rejoint le Noyau d'Amoris. Elle n'était plus. Je fermais les paupières inanimées de Meryl, pour rendre sa mort moins triste ; comme si elle s'endormait, rien de plus. Les épaules de Xerys s'affaissèrent, tandis que des perles translucides inondaient son beau visage. Elyon saisit la hache de la guerrière défunte, et la planta dans le sol pierreux.

— Repose en paix, Meryl, la quatrième, lâcha-t-il, la tête baissée et l'air absent.

✶⦁⦁✶

Je suis désolée ! Promis, il y a une surprise au suivant !

Comment vont vos petits coeurs ?

J'ai essayé de transmettre plein d'émotions dans ce chapitre, j'espère que vous les avez ressenties avec vos tripes...

Désolée pour ce retard ♥︎

Dites-moi pourquoi vous avez décidé de commencer à lire "la Gardienne des Légendes" ! V1 ou V2, qu'importe ;)

Biz,

Neo.

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