Les Royaumes d'Eredjan 1 - La...

By marinecrivain

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Saillans et Elenith, Nord et Sud de l'Île d'Eredjan, deux royaumes qui s'affontrent depuis cinq siècles, deux... More

Avant tout
Partie 1
Partie 2
Partie 3
Partie 4
Partie 5
Partie 6
Partie 7
Partie 8
Partie 9
Partie 10
Partie 11
Partie 12
Partie 14
Partie 15
Partie 16
Partie 17
Partie 18
Partie 19
Partie 20
Partie 21
Partie 22
Partie 23
Partie 24
Partie 25
Partie 26
Partie 27
Partie 28
Partie 29
Partie 30
Partie 31
Partie 32
Partie 33
Partie 34
Partie 35
Partie 36

Partie 13

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By marinecrivain

Garance s'éveilla épuisée, percluse de courbatures et découragée. Elle en voulut au soleil de s'être levé pour lui infliger une nouvelle journée d'angoisse et d'humiliation. Elle entendit son geôlier grimper à l'échelle. Elle le sentit se figer au-dessus d'elle et s'efforça de garder les yeux fermés pour retarder la confrontation. Elle ignorait ce qui l'avait le plus surprise lors de cette nuit sans fin : la réaction presque mesurée de son geôlier, allant à l'encontre de tout ce qu'elle imaginait de lui ou bien la réaction de son propre corps gardant une empreinte troublée des événements nocturnes. Quoi qu'il en soit elle était toujours prisonnière, en route vers un avenir plus qu'incertain.

- Princesse, réveillez-vous, dit Eliam de Saillans d'une voix bourrue, avant de retourner rassembler leurs maigres effets.

La jeune femme se redressa pour s'asseoir sur le sol. Il lui tendit une gourde d'eau et un morceau de pain, mais elle les refusa. Son estomac noué se révulsa rien qu'à la vue des aliments.

Quelques minutes plus tard, ils étaient dehors, leur unique monture chargée des sacoches qu'Eliam avait tenté d'alléger. Alors qu'ils étaient au pied de l'étalon noir, Garance leva les yeux vers son geôlier, dont elle avait jusque là soigneusement évité le regard. Celui-ci affichait son éternel sourire narquois. Malgré l'énergie qui manquait à la jeune femme, elle lui aurait volontiers fait ravaler sa morgue. Puis elle se demanda ce qui pouvait bien le faire sourire, la route serait d'autant plus longue à deux sur une même monture. Il lui tendit la main, pour l'aider à grimper, la faiblesse de ses muscles ne lui permit pas de refuser. Il la hissa sur la selle comme si elle ne pesait pas plus lourd qu'une plume, puis il saisit les rênes et sauta sur la croupe du cheval, son mouvement fut rapide et leste. Elle se demandait où il trouvait l'énergie de se mouvoir avec une telle agilité, alors qu'il était blessé et que le manque de sommeil ne cessait de s'accumuler. Mais tandis qu'elle s'étonnait de sa surprenante vivacité, il saisit vigoureusement sa taille, et plaqua tout son corps contre celui de Garance.

La jeune femme faillit étouffer un juron, elle comprenait mieux son sourire suffisant. Elle tenta de se dégager en se tortillant maladroitement mais Eliam affirma sa prise. Sa large main posée, effrontément sur son ventre. De ses cuisses jusqu'à sa nuque, elle n'avait plus un centimètre de liberté. Elle sentit son souffle contre son cou, puis il murmura dans un sourire qu'elle devinait :

- Alors petite Princesse, on regrette d'avoir laisser partir sa jument.

La jeune femme s'abstint de répondre. Leur monture se mit en marche et ce fut pire. A chaque pas, les muscles d'acier du guerrier se mouvaient contre la peau sensible de son dos. Mais bientôt, le soleil se fit si brûlant que le contact avec son geôlier, ne fut que le dernier souci de la jeune femme. Il l'avait, à son grand étonnement, affublée d'une sorte de cheich qui lui recouvrait les cheveux et le visage, ne laissant que ses yeux découverts. Cela lui éviterait certainement de brûler, mais ça ne l'empêchait pas de suffoquer. Au point qu'elle bénissait la rude main qui la maintenait en selle.

Cette journée étonnamment chaude annonçait un automne puis un hiver imminent. Sous la chaleur écrasante, ses muscles ne parvenaient plus à maintenir la rigidité qu'elle leur avait imposé au contact du cavalier. Peu à peu son dos se laissa aller contre le torse d'acier d'Eliam de Saillans. Même si elle en était mortifiée, c'était si bon de s'abandonner, de cesser de lutter ne serait-ce que quelques minutes. Car elle allait se reprendre, mais dans un moment, dans un tout petit moment.

La fatigue entraînait indubitablement ses pensées vers une pente glissante. La peur, la tension, l'incertitude avait noué une boule d'angoisse au creux de son ventre. La violence de la nuit dernière avait été comme un déclic. En la poussant dans ses retranchements, Eliam l'avait forcée à envisager son avenir perdu. Aujourd'hui, elle ressentait presque du soulagement. Pourquoi avait-elle à chaque instant de son existence voulut s'opposer aux forces du destin ? Alors qu'il était si simple de se laisser emporter, d'annihiler toute volonté. La seule objection qu'avait la jeune femme du fond de son épuisement était l'attitude étrange d'Eliam de Saillans. Pourquoi était-il allé à l'encontre de ce qu'il était censé être ? Pourquoi rendait-il tout plus compliqué alors que ce cauchemar aurait pu cesser la veille au soir ?

- Nom de Dieu....

Le juron marmonné par une voix masculine très éloignée d'elle, força la jeune femme à ouvrir des paupières qui ne parvenaient plus à lutter contre l'engourdissement. Ne voyant que l'obscurité, elle se demanda quelle était cette force qui l'empêchait de rejoindre cette sensation cotonneuse d'abandon.

Eliam retint tant bien que mal le corps de la jeune femme, qui glissait de la selle. Il guida son cheval auprès du torrent qu'ils longeaient depuis quelques heures et l'arrêta à l'ombre d'un immense pin parasol. Lâchant les rênes, il hissa la princesse dans ses bras, s'apercevant qu'elle s'était évanouie. Puis passant ses deux jambes du même côté il se laissa glisser à terre. La jeune femme, était terriblement légère, son visage aux traits épuisés reposait sur la poitrine d'Eliam. Il en ressentit un trouble intense. Il la déposa délicatement sur la rive sablonneuse et lui ôta son cheich en soulevant précautionneusement sa tête. La jeune femme ne réagissait toujours pas. Eliam ne put s'empêcher de laisser ses doigts se perdre dans la longue chevelure brune. Sale, épuisée, inconsciente, cette femme avait la grâce d'une reine. Malgré la chaleur, son teint lumineux n'avait rien perdu de sa clarté. Il lui prit l'envie irrésistible de poser ses lèvres sur la douceur des siennes, de passer sa langue sur leur sécheresse. Il retira brusquement ses mains, brûlées de douceur.

Cette petite princesse arrogante le retranchait dans ses extrêmes, tantôt l'agaçant au point qu'il se retenait de l'assommer, tantôt éveillant un feu intense au creux de ses entrailles. Elle avait hanté ses quelques heures de sommeil de la nuit dernière. Son corps diabolique, son regard ensorcelant qui dans ses rêves se consumait de désir. Ses lèvres purpurines rougies par la violence de ses baisers. Il avait laissé ses mains parcourir chaque millimètre de ses courbes harmonieuses. Il avait rêvé chaque parcelle de sa peau frissonnant du plaisir qu'il lui donnait. Secouant la tête, pour chasser des images trop réelles, il s'éloigna de la jeune femme pour remplir la gourde dans l'eau fraîche du torrent. Puis, avec une délicatesse qu'il ne se connaissait pas il en versa sur les lèvres de la jeune femme. Elle frémit. Il trempa le cheich et appliqua le linge sur le visage et le cou de Garance. Ses paupières papillonnèrent. Il se délecta du spectacle de sa peau frissonnant sous la caresse humide. Il avait la sensation que sa vue s'était exacerbée, visualisant en détail le grain pur, infime de sa gorge. Son regard remonta doucement le long de son visage étudiant avec un soin infini les traits magnifiques qui le hantait. Quand soudain, il rencontra les yeux gris, magnétiques, fascinants. Il suspendit son geste, retenant le tissu humide à quelques centimètres des lèvres de la jeune femme. Une brûlure intense embrassa ses reins, lui arracha un long frisson. Garance d'Elenith le scrutait intensément, apeurée, égarée, intriguée. Il sentit les mains de la jeune femme se crisper dans le sable.

- Je ne vous ferai pas de mal, murmura-t-il d'une voix rendue rauque par un désir fulgurant.

Un long moment s'écoula, sans que l'un et l'autre ne firent aucun geste, ils étaient comme deux ennemis se jaugeant, se découvrant vraiment pour la première fois.

Quelques minutes furent nécessaires à Garance pour qu'elle parvienne à voir clairement les traits d'Eliam de Saillans. Le sang battait contre ses tempes. Sa peau semblait s'être embrasée de l'intérieur. La voix grave, douce comme une caresse, apaisa l'angoisse qui ne demandait qu'à s'étreindre, même si elle ne comprit pas les mots. Ses yeux se figèrent dans ceux du jeune homme, il s'en dégageait une telle chaleur, une telle douceur qu'elle voulut se perdre dans cet océan indigo.

Eliam prit la gourde dans un geste lent, pour ne pas l'effrayer. Son regard ne quittant pas le sien, il releva doucement la tête de la jeune femme. Au contact de ses doigts dans sa chevelure, il retint un soupir de soulagement. Comme si le moindre frôlement apaisait la brûlure qui le consumait. Il porta délicatement le goulot aux lèvres de Garance, celle-ci eut un léger sursaut au contact de l'eau fraîche puis avala de longues gorgées.

Elle ferma les yeux, savourant le liquide apaiser sa gorge asséchée. Elle ne voulait plus que cela s'arrête, prise d'une soif insatiable. Elle ne se contrôlait plus, devant cet homme, un ennemi, elle devait pour la première fois de sa vie répondre à un besoin primitif, instinctif. Un besoin tel qu'elle en saisit la gourde. Ses mains se posèrent sur celle d'Eliam. Tandis que l'eau fraîche emplissait sa gorge, ruisselait sur ses lèvres, son menton, son cou, jusqu'à son corsage, elle savoura le toucher de cette main d'homme, rugueuse, virile, différente. Elle savoura ce premier contact volontaire avec un homme, ce premier contact qui ne fut pas imposé.

- Doucement, dit Eliam en retirant délicatement la gourde des mains de la jeune femme, il vous faut vous abreuver plus lentement.

Les grands yeux gris le toisèrent. Eliam en vint à regretter l'arrogance habituelle de son regard. A cet instant, ces prunelles de cendres dégageaient une sensibilité, une pureté qui associé à sa sensualité innée, à ce corsage imbibé d'eau moulant ses seins parfaits lui remuait les tripes. Face à elle, il ne ressentait plus le besoin de la mer, elle était le seul manque qu'il crevait d'assouvir. Il ne se reconnaissait plus, l'aura de cette petite princesse le métamorphosait en une bête. Elle exacerbait son impulsivité, sa violence. Il avait un tempérament addictif, addiction aux nuits blanches, addiction à l'alcool, addiction à la mer, addiction à la liberté. Il savait ce qu'il était et pourquoi il voulait la vie qu'il avait, mais il n'avait jamais développé une dépendance envers une personne, envers une gamine perdue, envers son otage, envers son ennemie. Il se releva, brusquement et s'approcha du torrent. Accroupi, il se rinça longuement le visage, la nuque et le bras. En bras de chemise, il retourna aux chevaux. Tandis qu'il dessellait son étalon, dos à la jeune femme, il dit :

- Nous nous arrêterons ici cette nuit, vous avez besoin de récupérer, nous reprendrons la route demain à l'aube.

Il se raidit quand il entendit que la jeune femme s'éclaircir la voix :

- Il semble clair que vous n'avez pas l'intention de me tuer. Eliam se détendit alors que le ton de la jeune femme se tintait d'arrogance. Alors, qu'allez-vous faire de moi?

Eliam se retourna et s'approcha de la jeune femme. Il s'accroupit pour être à sa hauteur.

- Comme prévu, je vous ramène à Estran, lui dit-il dans un sourire dénué de moqueries.

- Que ferez-vous de moi ?

- Vous attendrez les ordres du Roi. Vous serez bien traitée, la reine est une excellente hôtesse. Mais ne vous souciez pas de cela. Il va déjà nous falloir survivre à la traversée. L'hiver est déjà sur les hauteurs. Si aujourd'hui nous brûlons, demain nous grelotterons.

- Quel intérêt avez-vous à trimballer un fardeau tel que moi ?

- Je suis un soldat, j'obéis aux ordres.

- Vous n'avez pas l'air coutumier de ses choses-là, répondit-elle d'une petite voix comme si elle avait honte d'avoir observé tant et plus cet homme au point de commencer à le connaître.

- Quelles choses ?

- L'obéissance, la discipline.

- Vous ne me connaissez pas... dit Eliam, puis il eut le sentiment étrange de lui devoir la vérité. "En vous ramenant à Estran, je rachète un billet pour le Mandragore".

- Ne serais-je donc une monnaie d'échange pour les uns et les autres éternellement ?

- Nous le sommes tous à différents niveau, répondit le jeune homme avec mélancolie, puis retrouvant un sourire éclatant, voulez-vous que je vous mène jusqu'au torrent pour vous rafraîchir, Mademoiselle mon fardeau ?

- Je peux m'occuper de moi, dit la jeune femme en le toisant.

Il s'éloigna vers le cheval en gardant un oeil sur elle. Quand il la vit se hisser avec difficulté sur ses jambes, Eliam bondit à ses côtés. Il la rattrapa juste avant qu'elle ne s'effondre. La jeune femme tenta de la repousser. Il la hissa dans ses bras, la plaqua contre lui et lui souffla à l'oreille.

- Allez, je ne dirai à personne que vous avez eu besoin de mon aide.

Garance fulmina, mais se rendit, elle n'en avait pas la force physique et rêvait d'eau fraîche sur son corps épuisé. Eliam savoura le parfum des cheveux qui frôlait son visage, puis il avança jusqu'au torrent et fit quelques pas dans le lit.

- Vous pouvez me lâcher maintenant, s'écria la jeune femme assourdie par le bruit de l'eau, en tentant une nouvelle fois d'échapper à ses bras d'acier. Mais elle ne parvint même pas à lui faire desserrer son étreinte d'un pouce.

- Pas question, vous seriez capable de vous faire emporter par le courant, répondit-il.

Brusquement, Eliam s'agenouilla dans l'eau, Garance fut totalement immergée, seule sa tête ne fut pas noyée. Malgré la promiscuité du Prince, elle se laissa aller dans l'eau glaciale avec un soupir, puis lança sa chevelure en arrière, pour se baigner totalement. Eliam bénit l'eau glaciale en sentant le corps de la jeune femme se tendre contre lui, exposant sa gorge. Se rendait-elle compte qu'elle allait le rendre fou ? Il tenta de canaliser son esprit sur le torrent tumultueux et frigorifiant, mais la température de l'eau parvenait à peine à éteindre la flambée de désir qui avait de nouveau enflammé ses reins. Quand il sut qu'il ne supporterait pas une minute de plus de ce supplice.

Il se releva d'un coup, sans effort, malgré leurs poids à tous les deux et leurs vêtements gorgés d'eau En trois enjambées, il eut rejoint la rive, et laissa la jeune femme sur la rive, maîtresse de ses membres et de son équilibre. Il se précipita vers les chevaux pour ne pas avoir à détailler les courbes incendiaires de Garance, révélées par ses vêtements trempés. Cependant, il ne put éviter un coup d'oeil. Il fut soufflé : elle était encore plus époustouflante dans des vêtements informes d'homme que dans sa longue robe, le soir de leur rencontre. Le pantalon de cuir ne laissait rien à l'imaginaire. Dieu, il n'avait pas encore remarqué que ses jambes étaient interminables, elle était vraiment grande pour une femme, à la mesure de son propre mètre quatre-vingt-quinze. Il se mit à panser son cheval avant que d'autres idées ne lui viennent en tête.

Il avait l'habitude que les femmes se jettent à son cou, des femmes expérimentées, sûres de leurs charmes. Et il avait trouvé le moyen d'être émoustillé par une gamine, une pucelle, arrogante, princesse d'un peuple de traître, héritière d'une dynastie qu'on lui avait appris à détester depuis toujours.

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