Les Royaumes d'Eredjan 1 - La...

By marinecrivain

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Saillans et Elenith, Nord et Sud de l'Île d'Eredjan, deux royaumes qui s'affontrent depuis cinq siècles, deux... More

Avant tout
Partie 1
Partie 2
Partie 4
Partie 5
Partie 6
Partie 7
Partie 8
Partie 9
Partie 10
Partie 11
Partie 12
Partie 13
Partie 14
Partie 15
Partie 16
Partie 17
Partie 18
Partie 19
Partie 20
Partie 21
Partie 22
Partie 23
Partie 24
Partie 25
Partie 26
Partie 27
Partie 28
Partie 29
Partie 30
Partie 31
Partie 32
Partie 33
Partie 34
Partie 35
Partie 36

Partie 3

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By marinecrivain

La plaine fertile de Catalan s'étendait à perte de vue. La route serpentait sous les yeux d'Eliam au milieu des pâturages et champs de céréales. L'aube se levait à peine, et le soleil piquait déjà. Un temps idéal pour les moissons.

La chaîne des montagnes de Saillans s'élevait face à lui. La capitale du Royaume, Estran, se situait juste derrière. Il voulait passer le col d'Ignam en mi-journée, après il ne leur resterait qu'une douzaine d'heures de route. Il avait de la chance d'être en plein été, sinon il leur aurait fallu une journée de plus. Suite à l'annonce du Chevalier, Eliam avait immédiatement pris la route, Lalikine et Désone sur ses talons. Ils avaient chevauché toute la nuit. Désone était resté à Londemare pour gérer l'équipage et le déchargement du Mandragore.

Le chevalier n'avait pas pu en dire plus à Eliam. En général, on le laissait en dehors des affaires du Royaume, son frère aîné était là pour seconder le roi. Lui avait tout loisir de naviguer, le seul devoir qu'il s'imposait était de protéger ses hommes et de décimer la flotte d'Elenith. C'est pourquoi Eliam galopait à pleine vitesse. Il ne ressentait pas encore la fatigue d'une nuit sans sommeil. Il voulait arriver auprès de son père le plus vite possible, pour pouvoir repartir le plus rapidement. Parce que malgré son apparente indifférence, une angoisse grandissante l'étreignait à mesure qu'il approchait d'Estran.

Il avait embarqué pour la première fois sur un navire à l'âge de treize ans, sous la protection de son oncle, mais la peur au ventre. Et pourtant, en mer, à parcourir le monde, il avait trouvé l'évasion, la liberté à laquelle il avait toujours aspiré. Il avait appris à aimer cette vie d'épreuve, de tempêtes, instable et fraternelle. La vie en mer lui apportait une paix, une discipline qu'il n'avait jamais acceptée auparavant. D'ailleurs aussitôt à terre, il redevenait le chien fou impulsif et impertinent qu'il avait toujours été. Depuis, il n'était jamais revenu au château plus de quelques jours, de peur qu'on l'empêche de repartir.

Eliam et ses lieutenants arrivèrent enfin au pied des montagnes. Ils s'arrêtèrent un instant sur les rives d'un torrent pour se désaltérer. Ils étaient tous trois recouverts d'une poussière qui leur collait à la peau et aux vêtements et leur rougissait les yeux. Ils abreuvèrent leurs chevaux en silence, chacun économisant ses forces, préoccupés par la requête du Roi. Ils remontèrent rapidement en selle.

En fin d'après-midi, ils parvinrent dans un petit village à flanc de montagne. Ils mirent un pied à terre devant la seule auberge. Ils ne tenaient plus debout et leurs montures étaient fourbues. Les trois hommes entrèrent dans la bâtisse sombre et miteuse. Le tenancier se tenait derrière un comptoir.

- Messeigneurs ?

- Bonjour, trois chambres s'il vous plaît, demanda Lalikine.

- Désolé, mais nous avons du passage en ce moment, je n'ai plus qu'une chambre disponible.

- Tant pis, nous la prenons, dit Eliam en posant quelques pièces d'or sur le comptoir, ça devrait suffire pour nous trouver des chevaux frais.

- Oui, répondit l'homme en récupérant l'or.

- Il faudrait nous réveiller dans six heures et nous préparer des repas, dit Eliam.

- Bien, suivez-moi, je vais vous montrer la chambre.

Eliam, Lalikine et Shilar suivirent l'homme jusqu'à l'étage. Il leur ouvrit la dernière chambre, obscure, sans même une fenêtre.

- Voilà, dit l'homme avant de quitter la pièce.

- Et bien au moins il y a grand lit, s'écria Lalikine, allez viens par là mon lapin, dit-il à l'attention de Shilar en s'écroulant sur le lit, dans un rire.

- La ferme, Lalikine, répondit Shilar en se couchant à son tour.

- Allez faites-moi un peu de place, leur dit Eliam en s'allongeant.

Quelques minutes plus tard, ses amis dormaient d'un sommeil de plomb. Les ronflements de Shilar emplissaient la pièce. Eliam était fourbu, chacun de ses membres étaient douloureux, il avait l'impression que sa tête allait exploser. Il aurait tué pour un bain, mais dans ce bouge, ce n'était pas la peine d'y penser. La fatigue eut bientôt raison de lui et le sommeil le gagna enfin.

Le jour se levait quand les trois hommes franchirent les portes d'Estran. La cité, bâtie à flanc de coteaux, était encerclée de douves puis de hautes murailles. Les sabots de leurs montures claquèrent sur le pont-levis, puis sur les pavés de la grand'rue. Ils croisèrent quelques soldats ensommeillés. La ville était encore endormie. Ils gravirent le premier niveau de la cité et parvinrent sur la place principale où quelques commerçants installaient le marché. Il leur fallu atteindre la sixième porte et le cinquième niveau pour entrer dans la cour intérieure du château. La bâtisse fortifiée qui avait abrité l'enfance d'Eliam s'élevait face à lui, surplombant la cité. Elle était l'une des rares habitations à posséder un toit d'ardoise, le reste des bâtiments était recouvert de toits de chaumes. Les nombreuses tours donnaient à la citadelle un aspect massif et sécurisant. Il était étrange pour Eliam de retrouver la maison familiale. A l'ouest de la cour pavée, il pouvait apercevoir la cime des arbres peuplant le parc luxuriant qui descendait jusqu'au lac à la limite des remparts extérieurs de la cité. A l'est, l'écurie et la salle des gardes fermaient l'enceinte intérieure de la cour.

Alerté par leur présence, un groupe de soldats vînt à leur rencontre. Eliam, Shilar et Lalikine mirent pied à terre.

- Bonjour, Messeigneurs, nous voudrions voir le Roi, dit le Prince.

- Et qui le demande ? demanda le plus gradé des cinq soldats dans un sourire.

- Introduisez-nous et vous verrez, répondit le jeune homme, volontairement provocateur.

Le soldat posa la main sur la garde de son épée. Les trois hommes ne lui inspiraient pas confiance, la couche de poussière qui les recouvrait masquait leurs traits. Le soldat avait face à lui trois soudards, crasseux, massifs et armés.

Eliam le dévisagea de la tête au pied, et l'autre put voir une lueur étrange passer dans son regard. Le jeune Prince ne pensait pas que son retour serait aussi amusant, il lança un coup d'oeil à Shilar, puis à Lalikine. Ceux-ci comprirent immédiatement et sourirent à leur tour. Désone n'était pas là pour les raisonner, ils allaient se divertir un instant.

- Liam !

Le cri retentit dans la cour du château. Le prince se retourna.

- Nom de Dieu ! Eliam c'est bien toi, s'écria un grand gaillard blond qui s'approchait d'eux d'un pas rapide.

Eliam reconnut immédiatement son frère aîné, vêtu d'une légère cuirasse de cuir, Galahaad s'apprêtait visiblement à chevaucher. Il n'avait pas changé. Ses pommettes hautes, son port altier, tout en lui respirait la noblesse, le sang royal. Il portait désormais ses cheveux plus longs, jusqu'aux épaules, mais son regard était toujours le même : franc, incisif, agate. C'était le point commun le plus marquant des deux frères, tous deux avaient hérité des yeux de leur père.

- Gal ! s'écria à son tour le prince cadet, en se jetant dans ses bras.

Les deux frères se serrèrent l'un contre l'autre.

- C'est bon de te revoir, dit Eliam.

- Je ne t'aurais pas reconnu, laisses moi te regarder, dit Galahaad en se détachant de son frère.

Le prince Aîné détailla de son regard calme et serein la silhouette énergique d'Eliam. Il n'avait pas l'apparence du prince qu'il était mais même dans ces vêtements crottés il dégageait ce même charisme qui le caractérisait depuis qu'il était enfant. Cependant, le regard de son petit frère avait encore gagné en indolence, comme si la fièvre qui habitait ses prunelles avait encore gagné en intensité. Eliam parcourait les mers, s'abreuvant de combats et d'aventures et sa fureur de vivre, au lieu de s'apaiser, semblait s'en nourrir.

- Ai-je tellement changé que cela ?

- Je ne sais pas Liam, tu sembles différent... En fait, tu as surtout l'air d'un tueur, et mon Dieu, qu'est ce que tu pues.

- Et bien merci, quel accueil ! s'écria Eliam en envoyant son poing dans l'épaule de son frère.

- Allez viens te laver et te changer avant que les parents ne te voient.

- Pourquoi m'a-t-on demandé de rentrer ?

- Père t'en parlera tout à l'heure, bonjour les gars, dit-il en s'adressant à Lalikine et Shilar, on va vous mener à vos appartements, où est Désone ?

- Il est resté à Londemare, je lui ai confié le Mandragore.

- Très bien, viens avec moi, je ne veux pas que Père te voie dans cet état.

- Il n'en mourra pas et je suis venu le plus vite possible.

Après quelques minutes chez lui, Eliam sentait déjà l'étau se resserrer, et ce malgré le bonheur de revoir Galahaad.

- Je sais, petit frère, ne te tracasses pas pour autant, on ne te demandera de te conduire en Prince seulement pour quelques jours

- C'est déjà trop long, grogna Eliam.

Galahaad le conduisit dans le château. Ils traversèrent l'immense hall qui desservait la bâtisse. A droite, la cuisine et la domesticité, en face la grande galerie vitrée qui abritait le trône et la salle de réception, à gauche l'escalier qui permettait d'accéder aux trois étages. Le premier était réservé aux invités. Le second abritait les appartements des Princes et le dernier était réservé aux appartements de la Reine et du Roi, ainsi qu'à sa pièce de travail.

Galahaad croisa l'un des domestiques et lui demanda de préparer un bain. Puis il conduisit Eliam à sa chambre.

- Bienvenue à la maison, dit-il en ouvrant la porte, on va t'apporter des vêtements propres et de l'eau chaude, quand tu seras prêt, descends dans la salle du trône, nous t'attendrons.

Galahaad allait quitter la pièce, quand il se ravisa :

- Je suis vraiment heureux que tu sois là, Liam, un an c'est long, même pour un frère aussi pénible que toi.

Eliam sourit, lui aussi était heureux de le revoir. La porte se referma et le jeune prince s'écroula sur le lit. Sa chambre n'avait pas changé. Trois hautes fenêtres rendaient la pièce spacieuse suffisamment lumineuse. Tous les meubles, du lit à baldaquin à la table de travail étaient en sapin clair. De lourdes teintures émeraude habillaient les murs de pierre et le parquet.

Soudain, on frappa à la porte.

- Entrez, dit Eliam.

Une jeune femme se glissa prudemment dans la pièce, Eliam se redressa sur ses coudes.

- Bonjour mon Prince.

- Bonjour mademoiselle.

- Je vous apporte des vêtements propres. Nous allons vous préparer un bain.

- Merci, puis-je vous aider ? demanda-t-il.

- Non, mon Prince, répondit la jeune femme tandis que sa peau diaphane rosissait légèrement.

Eliam ne put s'empêcher de la dévisager. Elle était menue, vêtue d'une simple robe de coton beige et d'un tablier. Ses longs cheveux blonds étaient maintenus dans une lourde tresse qui battait la mesure le long de son dos. Ses yeux verts, immenses lui donnaient l'air d'une biche apeurée. Elle avait la vingtaine. Mais lorsque sa bouche s'étira sur un sourire mutin, elle n'avait plus rien d'une biche apeurée...

A cet instant, cinq personnes poussèrent la porte. Les bras chargés de seaux d'eau chaude. Eliam se releva. Il les regarda remplir le baquet en bois placé à côté de la cheminée. La jeune femme avait disposé un drap au fond. Après deux allers-retours, un bain fumant trônait dans la chambre d'Eliam. Tous les domestiques quittèrent la pièce sauf la jeune femme.

- Votre bain est prêt, mon Prince.

- J'ai vu, merci je vais me débrouiller maintenant.

La jeune femme ne bougea pas et continua de le dévisager.

- Vous aurez besoin de moi pour vous raser.

- Très bien, répondit Eliam dans un sourire, avant de retirer sa chemise, ses bottes puis son pantalon.

Nu comme un ver, il se glissa dans le bain avec délice. La jeune femme avait pudiquement détourné les yeux, un sourire aux lèvres. Eliam laissa l'eau couler sur son corps et détendre chacun de ses muscles, éprouvés par la chevauchée. Il attrapa le savon que la jeune femme lui donna et commença à se décrasser. Il passa la tête sous l'eau et ne ressortit qu'après de longues minutes. L'eau savonneuse n'avait pas la même saveur que l'eau de mer ! Il glissa ses deux mains dans ses cheveux mi-longs à l'ondulation légère pour les retirer de ses yeux. La jeune femme fit un pas en avant.

- Puis-je vous raser, mon Prince ?

- Faites-vous plaisir, répondit-il en tendant le menton.

La jeune femme fit mousser la barbe hirsute d'Eliam, avant de jouer du rasoir. Le jeune Prince la dévisagea, ses traits lui étaient familiers, mais il n'avait jamais été physionomiste.

- Nous sommes nous déjà rencontrés ? demanda-t-il.

- Oui, mon Prince.

- Je suis confus, j'aurais dû m'en souvenir.

- Je suis la cousine de Désone.

- Amaadène ? s'exclama le jeune homme.

- Oui.

- Mon Dieu...Tu as grandis ! Depuis quand travailles-tu au château ?

- Six mois, mon Prince.

- Veux-tu cesser de m'appeler comme ça, Eliam est suffisant.

- Bien. J'ai terminé. Je vais chercher de quoi vous rincer.

- Merci, répondit-il en se disant qu'il n'y avait pas que des mauvais côtés de rentrer chez lui.

Elle revint après un moment avec deux seaux. Il sortit de l'eau, tournant le dos à Amaadène. Cette fois-ci, elle ne se gêna pas pour détailler le corps parfait du Prince. Sa peau délicatement ambrée était un régal pour les yeux. Sa musculature était extrêmement développée, et pourtant son corps délié restait tout en finesse. Elle le rinça, posa une serviette sur ses épaules, puis quitta la pièce, sans un bruit.

Eliam avait enfilé les vêtements qu'on lui avait apportés. Il avait donc troqué sa vieille vareuse rouge élimée contre une chemise de coton blanc cintrée et son pantalon de cuir pour un velours noir. Seules ses bottes étaient les mêmes. Galahaad avait réussi son coup : dans cette tenue, lavé et rasé de près, Eliam ressemblait tout à fait au Prince qu'il n'avait jamais vraiment été.

Lorsqu'il entra dans la salle du trône, il vit son père et son frère au fond de la pièce dans une discussion animée. Ils cessèrent leur conversation quand ils le virent. Le Roi Acôme de Saillans et son fils cadet se jaugèrent un instant. Eliam retrouva le père et le monarque qu'il avait toujours connu. Aussi grand que ses deux fils, il était cependant plus épais. Sa longue chevelure blonde s'était parsemée de fils blancs, sur lesquels il portait sa couronne, un simple cercle d'argent. Son regard était toujours aussi incisif, mais ses traits accusaient d'une certaine fatigue. Eliam le trouva vieillit, il faisait désormais bien plus que ses cinquante-deux printemps.

- Mon fils, s'écria le Roi en se dirigeant vers Eliam, tu as l'air en pleine forme.

- Je le suis, Père, répondit le jeune Prince en répondant à l'étreinte du Roi, vous aussi

- Oui, fils, malgré les soucis. Sais-tu que nous ne t'attendions plus ?

- J'étais en mer, vous m'avez confié le Mandragore.

- L'essentiel est que tu sois là désormais.

- Pourquoi aviez-vous besoin de me voir, Père ?

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