J'étais rentré sans rien dire de plus, il n'y avait rien à dire de toute façon. Il partait, je ne pourrai pas l'empêcher de le faire. Il avait choisi comment serait sa vie et elle ne serait pas en Angleterre, du moins pas pour l'université. Je n'arrivais tout simplement pas à m'imaginer ma vie sans Joe en ce moment présent, c'était impossible. Pour il allait rester, nous irions à l'université ensemble, nous continuerions à parler, à se voir, à rire. Je rentrais chez moi, ramassant mon casque sur le sol alors que la pluie commençait à tomber du ciel en fines gouttelettes. J'entrais sans même faire attention si quelqu'un se trouvait là, en tout cas je ne fus pas repéré. Je descendis au QG pour déposer mon costume, je n'avais plus aucune raison de le porter, d'autant plus que je me sentais ridicule à l'intérieur. Mon père était là, assis sur un canapé. Dès qu'il me vit, il se releva.
-Brian il faut qu'on parle.
-J'en ai pas envie.
J'ouvris la seule vitrine vide et y déposais le casque. Je sentis la main de père m'agrippait le bras et me retournait, presque violemment.
-C'est important ! Et quand c'est important tu m'écoutes, tu le sais très bien.
Mon regarde devint tout à coup beaucoup plus sombre, ses sourcils froncés lui donner un air sévère qui ne me faisait maintenant plus peur. Il lâcha mon bras pour croises les siens contre son torse et me regarder droit dans les yeux.
-Tu ne peux pas faire ça, tu le sais très bien. Et maintenant ton ami est au courant en plus, me sermonna mon père.
Je haussais les épaules, je ne prêtais pas vraiment attention à ce qu'il disait.
-Tu m'écoutes ?!
-Oh la ferme ! hurlais-je tout à coup.
Il fut surpris.
-Sérieux tu vas diriger ma vie encore combien de temps ?! J'en ai rien à foutre qu'il sache, c'est clair ? Ou que tu m'interdises, je fais ce que je veux.
-Brian Falsworth, je t'ordo-...
-Quoi ?! De fermer ma gueule ? Là c'est plutôt à toi de te la fermer papa. Moi je l'ai pas assez ouverte en 18 ans. De toute façon je te laisse le rôle d'Union Jack, t'en fais pas pour ça.
* * *
J'étais dans mon lit, écoutant les gouttes de pluie à l'extérieur. C'était reposant. Positionné au dessus de mes couvertures, presque en position d'étoile de mer, je tenais mon portable dans une main. Je n'arrêtais pas de le déverrouillé pour écrire un message avant de finalement le laisser tombé sur mon lit. Je répétais ce geste depuis au moins une demi heure. Il fallait que j'envois un message, que je m'excuse, que je lui dise que j'étais d'accord avec son choix de partir. Sauf qu'en aucun cas je ne m'imaginais le faire, j'avais raison sur ce coup là. C'était lui le fautif. De toute façon il devait être à sa soirée, entrain de draguer n'importe quelle fille comme il avait l'habitude de le faire, se bourrant la gueule. J'avais déjà essayé et je n'aimais tout simplement pas ça, c'était sa faute si j'avais essayé d'ailleurs. Je me souviens que je m'étais retrouvé dans les toilettes avec une fille, lui dans celle d'à côté. J'étais sorti directement, dégoûté par cette scène digne d'un film de jeune ou de... enfin bref.
Mon père n'était pas revenu me voir, ni personne d'ailleurs. Sa majesté avait sûrement dû interdire à tout le monde de venir m'adresser la parole, insistant sur le fait que j'étais insolent, indigne de la famille, etc. C'était toujours comme ça quand il était en colère. J'aurais juste le droit à un bon savon le lendemain puis tout redeviendrait normal. C'était toujours comme ça et j'en avais marre. J'en avais marre de la banalité.
Au final je m'endormis plutôt facilement avec comme dernière image Joe, me laissant seul.
***
Le bruit des vagues était apaisant. Trop apaisant. J'ouvrais les yeux d'un seul coup, tombant face à un ciel bleu sans aucun nuage. Je bougeais un peu la tête, mes membres étant engourdis, j'étais allongé sur le sable, cette fois-ci en véritable position d'étoile de mer. Mon casque était à ma droite, un peu plus loin. Mon casque d'Union Jack.
Je bougeais lentement mes doigts, les enfonçant dans le sable afin de m'assurer que tout cela était bien réel. Je me relevais d'un seul coup, en position de grenouille, regardant tout autour de moi. Une forêt derrière, la mer devant et rien d'autre. Un endroit presque hors du temps et éloigné d'absolument tout. Je me mis à tirer mes cheveux, la douleur étant apparemment la façon la plus facile de se réveiller, mais rien, j'avais juste l'air d'un imbécile. Soudain, j'entendis un téléphone sonner, loin. Je me relevais totalement et couru vers le son.
Un portable était enfoncé dans le sol, un seul nom était écrit sur l'écran de ce dernier. Je l'attrapais et le porta à mon oreille tout en appuyant sur le bouton représentant un téléphone vert.
-Allô ? dis-je doucement.
-Brian ? C'est toi ?
-Ouais.. oui, c'est moi mais...
-On n'a pas le temps, il faut que tu m'écoutes attentivement et que tu fasses exactement ce que je vais te dire. D'accord ?
Même si je ne comprenais, j'acquiesçais, le regard un peu perdu.
-Ouais, répondis-je en prenant une longue inspiration.
-Parfait. Ils ont atteint notre planque, ils savent exactement où on est, d'accord ?
-Oui, oui...
-Tout le monde se bat pour protéger l'endroit mais on ne va pas tenir longtemps, ils sont trop forts. Je sais que tu vas pas me croire mais c'est la vérité. On est confrontés à quelque chose de plus puissant qu'avant, quelque chose qui dépasse les limites de l'entendement. Tu comprends ?! hurla la personne.
Je répondis un simple "hum", commençant à vraiment m'inquiéter de la situation. Une minute plus tôt j'étais dans mont lit et là sur une plage dans un costume à parler à quelqu'un.
-Il faut que tu préviennes...
Il se coupa, une autre voix venait tout juste de parler, elle venait de loin et je ne compris rien à ce qu'il ou elle disait. Puis mon interlocuteur revint.
-C'est la merde, préviens...
***
Je me réveillais dans une grande inspiration, les yeux écarquillaient. J'étais assis dans mon lit, en sueur. Je me levais en direction de ma salle de bain pour me passer de l'eau sur le visage. De l'eau froide. Depuis le soir où je m'étais fait poignarder je n'avais plus jamais fait un rêve de la sorte, mais il passait souvent en boucle dans ma tête. Je l'avais même mis sur papier pour ne pas oublier. En pensant à tout ça j'en profitais pour soulever mon tee-shirt et regarder ma cicatrice. Elle était maladroite et peu jolie à regarder mais elle me rappelait à quel point Joe était important pour moi.
Sur un coup de tête je retournais dans ma chambre pour saisir mon portable et appeler Joe. Il était deux heures du matin et il était sûrement déjà rentré chez lui, enfin je l'espérais.
-Allô ? envoya la voix de mon ami un peu maladroitement.
-Joe, ça va ?
-Tu veux quoi ?
-Juste parler j'ai...
Soudain je fus coupé en entendant la musique de la boîte de nuit se faire un peu plus forte et des paroles provenant probablement d'une fille.
-Joe ? T'es toujours là ?
Je l'entendis rire.
-Joey ?!
Soudain, des grésillements.
-Allô ? C'est qui ? demanda la voix féminine maintenant au téléphone.
Un peu surpris, je ne répondis pas tout de suite.
-Je suis Brian, un ami à Joe, tu peux me le repasser s'il te plaît ?
-On est un peu occupé là. Et puis ton pote a beaucoup bu.
-Eh merde, soufflais-je automatiquement. Je vais venir le chercher, tu peux le surveiller en attendant ? Quand il est bourré il peut faire n'importe quoi.
-Nan désolé, on a d'autres trucs de prévu ce soir.
Elle se mise à rire telle une harpie avant de raccrocher. Je restais comme un abruti, en plein milieu de ma chambre, le téléphone toujours à l'oreille. Mes nerfs allaient lâcher. Entre l'apparition de ce Baron Blood, l'annonce de Joe, le rêve et maintenant ça. J'avais l'impression que rien ne me souriait aujourd'hui. Je pris donc la décision de partir me coucher pour pouvoir me réveiller le plus vite possible et oublier tout ça. Je balançais au passage mon téléphone sur le sol. Demain serait un autre jour et j'espérai avoir une sérieuse conversation avec Joe, déjà sur son comportement mais aussi sur son annonce.
Voilà que je me prenais pour son père. "Laisse les choses se faire Brian, ne précipite rien". En tout cas je n'étais pas prêt d'oublier ma conversation avec cette fille. J'avais très bien deviné la suite de sa soirée.