Le silence des blés d'or

بواسطة PatriceLandry

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À la mort de son père avec qui il a vécu toute sa vie, Serge, autiste, hérite de la terre familiale, une ferm... المزيد

Avertissement
Bruit de fond
Avant de partir
Une voie inconnue
Recueil
Le passé qui revient
Tentations
Des illusions
L'amie Violette
Des voyages
Petit pas de danse
Appel
Crise
Entre deux coeurs, rien ne balance
La récolte de ce que l'on sème
Le mirage du bonheur
Le vide (partie 1)
Le vide (II)
Messe et mésanges
Fantômes au présent
Répit
Héritage (I)
Héritage (II)
Retombées
Égarements (I)
Égarements (II)
Trio d'hier
Jeux d'antans
Trio
Ruines
En quête de vérité
Une couleur du passé
Réconfort
Faux départ
Confrontation
Vue sur mer
Deuxième partie (Nanowrimo 2016)
Fadette
L'invraisemblable histoire de Frédéric Pujol
L'absence prolongée
Le passé de Violette
Deux solitudes
Les chemins d'Avéline
Espoirs étiolés
Le baiser
Les hésitations de l'amour
Le sens de la vie, selon JF
Des aveux
Celui par qui le malheur arrive
Trouver le bonheur
Le cas Chantal
Entre voisins
Fracas
L'écho des cris
Fin de séjour
Menaces
Le hasard fait bien les choses
Retour au calme
Souvenirs retrouvés
Un peu de calme
Pardons
Piège improvisé
L'amour impossible
Avant de s'envoler
Survivant
Partir

Intrus de soirée

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بواسطة PatriceLandry

Patterson n'insista pas. Il savait que cette réponse ne disait rien de précis. À voir le regard des trois autres, il sentait bien qu'ils n'étaient pas certains que Serge puisse demeurer seul dans cette grande maison et que la présence de Violette Savoie n'était que temporaire. Mais, il préféra ne pas poursuivre sur cette piste sachant que la décision se prendrait entre eux, avec ou sans l'accord de Serge.

- C'est normal, Serge. C'est tout à fait normal. Tu es né ici et tu as grandi entre ses murs. Moi non plus, je n'abandonnerais pas ma maison si facilement. Je voulais parler des terres, évidemment.

Avéline jeta un coup d'œil à son frère qui s'était retranché dans sa tête pour mieux se protéger de ce qui risquait de sortir de cette discussion. Elle avait brièvement parlé à Violette et Jean-François de cette clause du testament qui n'avait surpris personne. Et pourtant, chacun appréhendait la réaction du voisin qui, à coup sûr, le prendrait vraiment mal. Pour elle, c'était un autre coup de dé préparé par les bons soins de son père pour semer encore un peu plus de pagaille dans leur vie.

- Vous connaissiez mon père, monsieur Patterson, commença à dire Avéline, l'air de vouloir à cent lieues de là. Mieux que quiconque dans la région. Vous avez eu plus d'une fois maille à partir avec lui concernant les terres, surtout lorsqu'il a commencé à prendre du recul sur les affaires de la ferme.

- Je ne sais pas si je vais vraiment apprécier ce que je vais entendre. Il a mis des clauses dans son maudit testament, je suppose.

Avéline baissa les yeux, ne pouvant pas vraiment continuer. Elle espérait que Jean-François prenne le contrôle de la conversation. Si cette nouvelle venait de lui, elle serait peut-être moins associée à elle ou encore à Serge. Elle avait honte de se replier comme ça, elle qui en avait vu d'autres avec son père. Mais, la colère de Bernie Patterson risquait de briser la quiétude de ce souper entre amis. Et franchement, elle ne s'était pas attendue à en discuter avec lui avant quelques jours, le temps de se préparer des réponses, s'il y en avait dans les circonstances.

Patterson fit signe à Jean-François de lui servir un autre verre de porto en tapant sur le verre.

« Le vieux bâtard m'aurait eu à l'usure, par tous les démons de l'enfer, murmura-t-il. Pardonnez-moi, monsieur le curé, mais ce crisse de vieux borné est passé plus d'une fois à côté d'une bonne affaire. S'il m'avait juste écouté un petit peu, il serait peut-être encore vivant à profiter de son argent dans le confort de sa belle maison. Mais non, il a fallu qu'il s'obstine à s'éreinter dans les champs, à tout vouloir faire par lui-même. Avec trois enfants à élever. Ce n'est pas de la petite bière, ça. Maudite tête de cochon ! »

Avéline posa les mains sur ses tempes. Un léger mal de tête commençait à se faire sentir. La journée avait été longue, beaucoup trop longue à son goût. Et, ce vieil entêté venait rallumer la flamme en frappant sur un fantôme qui, de son vivant, n'avait de cesse à se refuser à céder à ces avances du voisin.

- Écoutez, monsieur Patterson, dit enfin Jean-François en posant une main sur l'avant-bras d'Avéline. Vous savez très bien que Serge et Avéline n'ont rien à voir avec la décision de leur père. Le vieux Georges, Dieu ait son âme, n'a jamais voulu vendre ses terres de son vivant et à qui que ce soit. Vous le savez ça. Il était têtu, mais il voulait respecter la tradition familiale en mémoire à ses parents et ses grands-parents qui tiré de cette terre le fruit de leur labeur. Ils aimaient leur terre comme si elle avait été donnée par Dieu, ce qui n'est pas tout à fait faux. Il savait aussi qu'en mourant, l'héritage de sa famille serait dilapidé. Ni Serge, ni Cédric et encore moins Avéline ne voulaient prendre cette relève sur leurs épaules. Les temps ont changé. Personne n'aurait pu vous garantir que l'un de vos fils ou l'une de vos filles, si vous aviez eu la chance d'en avoir, aurait accepté de suivre vos traces. Que serait-il advenu de vos terres ? Vous êtes chanceux, car malgré ce malheur qui a frappé votre couple puisque votre neveu a fait promesse de s'en occuper. Mais qu'en serait-il si vous n'aviez aucune famille qui voudrait les prendre en charge ? À qui céderiez-vous votre patrimoine ? À votre voisin Georges Éthier ?

Patterson ne desserra pas les poings. Ce discours n'atténuait en rien la frustration qu'il ressentait vis-à-vis de ce dernier échec, même s'il n'en connaissait pas encore la teneur.

Avéline lui expliqua les termes de la vente des terres en essayant de ne pas s'écrouler en larmes. La migraine augmentait et elle aurait préféré aller s'étendre pour oublier tout cela ne serait-ce que dix minutes.

Curieusement, Patterson ne réagit pas comme tous s'y attendaient. Les célèbres colères de vieil homme leur rappelaient à tous combien cet homme s'investissait dans cette passion de la terre. Il croisa les bras, comme s'il réfléchissait à une façon de contourner les règles stipulant la vente de cette portion de pays qu'il chérissait depuis plus de trente ans.

Il ne pouvait évidemment pas passer par Charles, son neveu. Ni son nom ni la compagnie qu'il gérait ne pouvait se permettre d'approcher de l'encan. Il cherchait un moyen de récupérer, par la bande, ce tapis doré convoité. Mais il ne voulait pas montrer non plus que cela ne le touchait pas. Il décida de jouer un peu le rôle de l'homme bafoué, de simuler une colère tout de même contrôlée tout en affichant une certaine forme d'abandon.

- Alors, c'est ça. À vous voir la face, vous êtes quand même d'accord avec les décisions ridicules de votre père. Vous ne semblez pas comprendre à quel point j'aurais aimé poursuivre ce que votre père et ses parents avant lui avaient commencé. Si ça se trouve, ce seront des investisseurs étrangers qui vont acheter ce petit bout de paradis. Et bye bye, le terroir québécois ! Adieu l'histoire de notre beau peuple de Canadiens français qui ont mis de leur sueur et de leur sang dans les sillons de cette vallée.

« Bravo pour la suite des choses. Imaginez-vous juste un petit instant à quoi ressemblera le Québec dans vingt ou trente ans. Des Arabes, des Chinois, des Américains qui vont automatiser tout ça et sucer tout ce qu'il y a à extraire de notre belle terre. J'ai perdu, je l'avoue. Je suis déçu, vous le savez. Mais, je suis triste pour vous tous, toi inclus, mon pauvre Serge. Parce que ce que tu ne sais pas, dans ta tête pleine de mots, c'est que lorsque ces gentils investisseurs vont arriver avec leur machinerie moderne, ils vont raser ta maison. Il ne restera plus rien de ce souvenir-là. Ça va tout disparaître. Comme tes livres ! »

- Non ! cria Serge en bloquant ses oreilles de ses mains.

Il se leva et tapa du pied avant de tourner en rond.

« Je vais rester. Je vais rester ! »

Violette se leva non sans jeter un regard de colère au vieux Patterson qui regretta ses dernières paroles. Elles avaient dépassé sa pensée et, encore une fois, il s'était mis le doigt entre le marteau et l'enclume.

- Je pense qu'on a compris le message, monsieur Patterson, dit Avéline en se levant.

Elle lui tendit la main, signifiant que la conversation était terminée. Il se leva et tenta de s'excuser, mais ce regard de haine qui se portait envers lui l'incita à se taire. Il ramassa sa casquette de laine et sortit sans dire un mot de plus.

Serge continuait à répéter inlassablement : « Je vais rester, je vais rester »

Le vieux fermier emprunta l'accotement pour se rendre plus rapidement chez lui. Il sentait son cœur s'emballer et il avait besoin d'aller se reposer. Il était choqué de s'être laissé emporter ainsi surtout envers ce pauvre Serge qui ne méritait certainement pas ce genre de menace. Pourtant, c'est vraiment ce qui les attendait. Il ne pouvait garantir que son neveu ne ferait pas de même dans vingt ans pour ses terres. Mais, cela ne se ferait pas de son vivant. Dès que les terres de Georges Éthier seraient vendues, on viendrait l'asticoter pour qu'il vende aussi, ajoutant des primes ou encore d'implicites menaces qui ajouteraient à son stress. Il avait effectivement perdu la bataille et il ne servait à rien d'espérer en tirer quelque gain. Georges avait gagné.

Il songeait à se retirer de ses affaires, céder les terres de son vivant à Charles et trouver une place dans une résidence près de sa femme. Il pourrait vivre avec elle un peu de ses derniers moments dans l'ignorance totale du drame qui venait de se jouer. Il l'enviait parfois. Elle avait retrouvé la paix, en quelque sorte, depuis qu'elle ne se souvenait plus de rien.

Avant de tourner dans l'entrée en face de chez lui, il entendit un bruit de vitre cassée. Il arrêta de marcher. Elvis, son vieux Saint-Bernard, se mit à japper depuis l'intérieur de la maison. Une lueur apparue dans la cabane adjacente. Quelqu'un fouillait dans son atelier.

Il regretta ne pas être à la portée de son fusil de chasse qu'il laissait tout près de la porte, malgré les avis répétés de Lefrançois qui jugeait que c'était très dangereux de laisser une arme chargée dans un endroit passant.

- Un jour, tu vas ouvrir la porte trop vite. Le fusil va tomber et tu vas te ramasser avec une volée de plomb dans le ventre, Bernie, avait dit le policier lors de sa visite un peu plus tôt.

Il jura en pensant que malgré cela, l'arme était hors de sa portée. Il lui faudrait soit contourner l'atelier de l'autre côté pour rejoindre la porte de la cour soit carrément passer devant la cabane au risque de tomber nez à nez avec l'intrus.

Il n'eut pas le temps de trouver une solution, car le voleur venait d'éteindre l'ampoule. Ce n'était pas une personne très brillante qui venait de commettre cette intrusion. Peut-être était-ce un de ces adolescents en quête d'un peu de térébenthine à respirer pour un « buzz » hors du commun.

Il vit une ombre sortir. Il se cacha derrière le thuya en espérant qu'il ne l'avait pas vu. Mais, le cambrioleur s'avançait droit vers lui, boitant légèrement. Il perçut le son rauque de sa respiration lorsqu'il passait près de lui. Cette personne ne semblait pas en très grande forme.

Patterson songea que s'il avait été un peu plus jeune, il aurait profité de l'instant pour se montrer et confronter l'intrus. Son cœur battait la chamade et il avait la nausée. Il préféra rester tranquille et observa la personne qui passait à moins de deux mètres de lui.

Ses yeux s'agrandirent de stupeur lorsqu'il reconnut cette personne. Il s'agissait de Chantal Pronovost, la jeune femme qui s'était occupée du vieux George au cours de la dernière année. Il s'apprêtait à sortir de sa cachette pour lui demander ce qu'elle faisait chez lui, au milieu de la soirée lorsqu'il remarqua qu'elle tenait dans sa main droite une hache. Sa hache, bien effilée dans les mains d'une femme aux airs d'une psychopathe. Il se mordit le poing pour retenir son râle.

*-*-*

Bon, me revoilà jetant des intrigues à me tirer de ma rêverie. Ça vous intrigue? Moi si. J'ai hâte à demain.

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