Flashback :
C'était en septembre, le jour de la rentrée plus précisément. Il ne faisait pas beau mais le temps n'était pas mauvais non plus. Seul le vent frais et les couleurs du tapis de feuilles jonchant le sol nous rappelait que l'été était déjà terminé. Quelques écharpes avaient déjà fait leur apparition, les gants et les bonnets étaient encore loin et pourtant deux garçons faisaient grise mine.
Les deux garçons redoutaient, en effet, ce changement d'environnement. Ils allaient entrer au collège et ils connaissaient les lieux autant qu'ils se connaissaient à l'époque, c'est-à-dire pas du tout. Tous deux se contentaient d'observer calmement leur environnement jusqu'à ce que leurs regards tombent l'un dans l'autre. L'un aux yeux gris métallique, comme le mercure et l'autre bicolore, rappelant la mousse des forêts et la mer. Ils n'arrivaient pas à décrocher leurs regards et finirent par aller l'un vers l'autre spontanément. Le garçon à la chevelure brune et à la peau dorée se présenta le premier :
« Je... hum... Je m'appelle Callum. »
Il tendait sa main, hésitant, à l'autre jeune garçon qui, lui, possédait des cheveux comparables à l'ébène et un teint légèrement halé. Le deuxième saisi timidement la main tendue de Callum et lui répondit avec un sourire :
« Moi, c'est Kris. »
Le cœur du jeune Callum s'était emballé à ces mots. Il avait pris la main de son nouvel ami et l'avait alors entraîné à la découverte de leur collège. Ils entrèrent en trombe dans le bâtiment principal bousculant quelques-uns de leurs camarades au passage. Ils courraient dans les couloirs en riant aux éclats.
POV Kris :
C'était le début d'une amitié ponctuée de bêtises et de fous rires en tout genre. Ce fut sur ces souvenirs que Kris se réveilla, quelques larmes perlant aux coins de ses yeux. Comment en étaient-ils arrivés là, Callum et lui, tout ça pour une pauvre histoire de cœur, pour une fille. Eux qui s'étaient jurés que ça ne leur arriverait pas. Pas à eux. Il observait le visage de Callum encore ravagé par les larmes dues à la perte de sa sœur, Arizona.
Il se souvenait parfaitement du jour où leur amitié avait volé en éclats, et tout ça c'était de sa faute. Maintenant qu'il voyait à quoi avait ressemblé la vie de Callum, il s'en voulait de l'avoir perdu ce jour-là.
Ses manières d'enfant gâté et son arrogance l'avaient mené là, dans le lit de Callum mais en aucun cas dans son cœur et pourtant... Ce baiser échangé la veille lui brûlait encore les lèvres, ils avaient rompu la première de leurs règles mais il ne le regrettait certainement pas. Lui, en tout cas, il ne regrettait pas ce geste, mais que pensait le second concerné, regrettait-il ce qu'il s'était passé ?
POV Callum :
Il sentait du mouvement à côté de lui mais il ne voulait pas ouvrir les yeux. Ilse sentait sale et fatigué. Il s demandait qui se trouvait à côté de lui. Il avait envie de savoir qui était là mais en même temps, il était tellement bien à côté de cette personne qu'il ne voulait pas bouger.
« Ne fait pas semblant Callum, je sais que tu es réveillé. »
« Repéré, pensa-t-il, mais je connais cette voix !? »
Il ouvrit brusquement les yeux et rencontra ceux de Kris a quelques centimètres des siens.
« Qu'est-ce que tu fais là ?! »
« Oh, moi, rien de spécial, j'ai juste passé la soirée et la nuit à veiller sur toi, mais sinon je ne fais pas grand-chose là. »
Callum ouvrit grand la bouche, interloqué. Il l'ouvrit encore plus grande lorsqu'il se souvint de la soirée d'hier, il avait beaucoup bu pour oublier le fait que sa mère avait battu sa sœur jusqu'à ce qu'elle meurt. Kris l'avait trouvé au beau milieu de ses bouteilles. Callum lui avait demandé de partir, mais Kris était resté. Il l'avait lavé et n'avait fait aucun commentaire au sujet de ses coupures. Quand il lui avait demandé comment il se sentait, Callum avait rendu les armes. Il avait éclaté en sanglots et laissé Kris prendre les choses en main. Celui-ci l'avait pris par la taille et ils avaient alors échangé un tendre baiser qui enflamma les joues de Callum lorsqu'il s'en souvint.
Il vit un sourire moqueur s'étendre sur le visage de Kris. Callum réalisa alors qu'il avait sûrement viré au rouge pivoine. Il cacha sa tête dans l'oreiller, en vain puisque Kris se mit à califourchon sur lui.
« Arrête de te cacher Callum. Tu sais que tu es mignon quand tu rougis ? »
Il sentit les mains de Kris sur ses côtes et se mit à hurler de rire en priant Kris d'arrêter de le chatouiller, mais celui-ci ne s'arrêta pas, il continua de le torturer sans prêter attention à ses supplications.
« Dis que je suis le plus beau et le plus fort et je te lâche. »
« Jamais, plutôt mourir sous tes assauts ! » s'exclama Callum entre deux crise de rire.
Il entoura ses jambes autour des hanches de Kris et le renversa sur son lit se mettant à son tour à chatouiller Kris qui éclata de rire à son tour. Ils se chamaillèrent ainsi pendant plusieurs minutes. Ils se retrouvèrent alors très proches l'un de l'autre, trop proches peut-être...
Leurs yeux étaient les uns dans les autres, verrouillés, l'argent contre le bicolore. Ils s'étaient figés faisant face pour la première fois à une situation nouvelle, pas de sauvagerie, de rapidité ou de violence, ça semblait doux, tendre et lent. Se rapprochant l'un de l'autre doucement, ils s'attiraient, une attirance contre laquelle ils ne pouvaient rien, tel des aimants. Ils ne cherchaient de toute manière pas à lutter, ils savaient que ce qu'ils faisaient changerait tout autour d'eux, leurs vies entières en seraient bouleversées. Ils avaient établi des règles, des règles auxquelles ils s'étaient tenus, avant de les rompre avant ce baiser. Même si cela ne faisait que quelques heures qu'ils avaient échangé ce baiser, ils sentaient déjà que des changements s'opéraient au fond d'eux, ils le sentaient. Leur regard changeait, leurs mouvements étaient moins saccadés, plus tendre. De légères marques apparaissaient çà et là sur certaines parcelles du corps de Callum, juste une ou deux au début, puis elles se mirent à fleurir de plus en plus nombreuses. Au fur et à mesure que la bouche de Kris se déplaçait Callum ouvrait plus grand la bouche. Pour la première fois, il se sentait vraiment bien en compagnie de Kris, aucune colère n'émanait de lui, pas une seule once, il se sentait juste aimé à sa juste valeur. Ce n'était pas juste une envie de sexe, c'était une envie de partage, de communion et de douceur. Et tout cela il sentait qu'il pouvait l'obtenir en ce moment avec Kris, il sentait que ce qu'il partageait ces envies avec le jeune homme qui partageait sa chambre à ce même instant. Ils se déshabillèrent mutuellement avant de se laisser aller l'un autant que l'autre. Kris prenait, tout de même, souvent, la position dominante, son caractère profond ne lui autorisant aucunement d'occuper la position de faiblesse. Callum acceptait sans mal sa prise de position. Tant que la personne qui était avec lui à cet instant était Kris, il était prêt à toutes les concessions.
Il était étendu, les bras dans le dos de Kris, ses petits ongles entamant légèrement le dos que celui qui lui faisait tant de bien, ses orteils se crispant chaque fois qu'il passait sur une zone sensible. Il se laissa emporter par les caresses douces et attentionnées de Kris, seul lui comptait, mais un doute planait encore dans son esprit. Il tournait encore et toujours, Callum voyait les mots passer, se succéder derrière ses paupière closes.
« Tu fais ça pour quoi ? Parce que ma sœur est morte ? Pour prendre ton pied encore une fois ? Hein Kris, pourquoi est-ce que ça devrait être différent maintenant ? » demanda-t-il.
« Callum, regarde-moi, je sais que j'ai été un vrai connard ces dernières années, mais je ne profite pas de la situation je te le jure ! »
« C'est ça, tu penses vraiment que je vais te croire sur parole ?! »
« Après tout ce qu'on a vécu ensemble tu m'en pense vraiment capable ? »
Callum se retourna brusquement vers Kris et lâcha d'une voix froide :
« TU m'as lâché pour une histoire de fille, TU as craché sur moi pendant des années et tu penses que je vais te croire parce qu'un jour on a été amis ! »
Callum vit alors Kris se crisper à ces paroles, il avait été touché par la phrase débitée par Callum. Il l'attrapa vivement par le poignet et porta sa main à son cœur.
« Dis-moi que ce que tu sens-là c'est faux. Que je mens quand je te dis que mon cœur s'accélère rien qu'en sentant ton odeur ! Dis-moi tout ça Cal' ! Aller ! DIS-LE-MOI ! »
Les mains sur son cœur, il ne cessait d'écouter le battement du cœur de Kris, la tête penchée le souffle court. Callum ne savais plus réellement quoi penser, lui qui avait peur que Kris ne se moque de lui, mais maintenant qu'il sentait ce cœur battre à tout rompre sous ses doigts il doutait... Oui, il doutait de son jugement. Avait-il jugé Kris trop rapidement ? Leur amitié était-elle encore possible ? quelque chose de plus était-il envisageable ? Beaucoup d'interrogations tournaient encore dans son esprit. Kris, quant à lui, fixait Callum, attendant un signe, une réponse de la part de l'autre jeune homme qui se tenait face à lui. Celui-ci déplaça sa main jusqu'à son épaule et l'attira à lui pour un baiser d'une extrême intensité. Kris ne résista pas le moins du monde. Il était soulagé de la réaction du jeune aux yeux vairon.Ils ne voulaient plus se lâcher, leurs lèvres scellées ne se décollaient que par nécessité. Ils étaient comme deux naufragé, l'un étant la bouée de l'autre et réciproquement. Leur présence l'un pour l'autre était presque vitale pour les deux jeunes hommes. Ils se complétaient.
Ce moment de pur bonheur que vivait Callum en compagnie de Kris fût bientôt broyé, écrasé par la réalité, il se rappela que plus rien ne serait comme avant, sa sœur avait quitté ce monde. Plus jamais il ne verrait Arizona colorier sur la table du salon, il ne serrerait plus jamais sa jeune sœur dans ses bras. Elle était partie à jamais et elle avait emporté avec elle un morceau du cœur de son frère.
Kris prit alors conscience de l'état de Callum, il savait que ce dernier devait être partagé : être heureux grâce aux confessions qu'ils s'étaient faites quelques instants plus tôt et la peine due à la perte d'Arizona. Il savait combien il était difficile de faire face à la mort d'un proche, mais il savait aussi que Callum avait perdu sa seule véritable famille. Kris ne savait pas pourquoi, mais il se sentait coupable. Peut-être se sentait-il comme ça parce qu'il avait littéralement pourrit la vie de Callum ces derniers temps ?
Il voulait tout faire pour consoler le jeune aux yeux bicolores. C'était devenu l'une de ses priorités absolues, c'est pour cela qu'il avait décidé qu'il l'accompagnerait à l'enterrement de la malheureuse Arizona.