Mayzel se glissa dans le fauteuil : les cours reprenaient demain. Ils n'avaient pas quelques jours pour profiter de l'école cette année. Heureusement, les cours commençaient un jeudi. Le groupe avait déjà prévu leur samedi : matin devoir et révision, et après-midi lac, balade en forêt... De quoi prolonger leur été. Bientôt, dans les cheminées, les flammes remplaceraient les fleurs séchées déposées durant la saison chaude...
Dans le salon des hydres, l'ambiance était légère. Quelques troisièmes années familiers trainaient avec un fantôme, un centaure et une sylphe. Frigga leur avait proposé des gâteaux. Sa mère en avait fait pour un régiment. Mayzel, elle, observait les premières années dans leurs coins. Ses peurs et ses doutes lorsqu'elle était à leur place étaient peut-être désormais des spectres, mais elle ne les oubliait pas pour. Autant. Elle leur fit signe de se servir. Deux Licornes, une Vouivre et une Hehlest discutaient avec des premières années Hydres.
Le groupe avait pris possession de leur endroit habituel : un canapé et deux fauteuils, devant un tapis moelleux sur lequel leurs animaux dormaient le ventre a l'air, du moins ceux qui ne tentait pas de subtiliser des biscuits. Les couleurs des Hydres seyaient mieux à l'hiver, le vert foncé des rideaux et le bois des bibliothèques avaient un petit air de Noël, en début septembre. Mayzel adorait la maison des Licornes, de bleu et de blanc, tout en délicatesse. Néanmoins, son salon avait été déclaré leur QG il y a bien longtemps. Tout le monde savait que cet endroit était le leur. Les échos de l'année dernière avaient fait du groupe des petites célébrités locales.
Corwynn faisait l'idiot sur le tapis, Cassie était enroulé sur les jambes de Sorën, alors qu'Henuie discutait avec lui. Hélène et Frigga partageaient un fauteuil en riant. Et Camille, elle, écoutait Corwynn. Mayzel était aux anges. Elle prit le temps de les observer. Après la trahison d'Helnielle, elle avait appris à savourer ses instants. De s'imprégner de chaque détail. Un thé à la main, l'odeur du bois et des livres, et les rires dans l'air, se mélangeant parfaitement. Elle ne les échangerait pour rien au monde. Malgré leur propension à fait se mettre dans des situations impossibles.
Des rires attirèrent son attention. Pas des rires joyeux. Les mêmes rires qui avaient plu sur elle l'année dernière. Tranchant, vif. Elle tourna la tête. Corwynn et Sorën en firent de même vit, imité par les autres. Un groupe de premières années discutaient. Des humains. Mayzel n'avait aucun doute. Elle se rappelait bien de premières années qui avaient insulté Henuie. Ils avaient le même regard. Pourtant, elle avait recroisé ses filles, désormais, elles trainaient avec une squelette et un centaure, et ne semblaient plus ne faire cas. Visiblement, cette année la directrice avait oublié son petit rappel sur l'acceptation des Êtres Magiques... Henuie, Corwynn et elle s'en chargeraient avec plaisir.
« Ils embêtent qui ? » soupira Henuie qui se levait déjà.
Mayzel déposa son thé.
« Je sais pas, attends...
Oh chers petits,
Soyez gentils.
Et avec nous, partagez.
Ce dont vous parlez. »
Elle agita sa baguette. Ce n'était pas son meilleur sort, mais la magie coopéra. Elle savait ce qu'elle voulait. Un instant plus tard, les voix des premières années en question flottaient dans la pièce, haut et fort. C Tout le monde pouvait suivre leur conversation. Ils ne s'en rendirent pas compte tout de suite. Penchés les uns sur les autres, ils continuèrent un moment.
« Mais t'es trop bizarre...
— Sérieux, je pensais pas qu'ils acceptaient les... gens comme toi ici...
— Ouais, non, mais c'est mort. Je dors pas avec ça.
— Ouais, t'sais jamais. »
Mayzel haussa un sourcil. Dormir avec ? Elle se leva. Le groupe sursauta. Un garçon des Vouivres se retourna. Il regarda autour de lui.
« Ben quoi ? »
Sa voix amplifiée percuta les murs et ces yeux s'agrandir de surprise.
« C'est quoi cette merde ?
— Vous n'avez pas le droit ! » Renchérit une autre.
Mayzel s'en fichait un peu. Elle n'était plus à ça près. Et elle était presque sûre que la directrice serait du même avis. Elle s'avança vers le groupe avec une assurant qu'elle n'aurait pas eu une année auparavant.
« Ça vous dit de partager votre conversation ?
— Ouais, on est de grands curieux ici, ajouta Corwynn avec un grand sourire.
— Ça ne vous regarde pas.
— Bah, on veut rire nous aussi.
— C'est l'autre là. »
Un garçon prit la parole, une hydre, aux cheveux bruns.
« C'pas un vrai mec. Je veux pas de ça dans ma chambre. »
Mayzel mit un instant à comprendre. Des problèmes entre Être Magiques et humain elle avait l'habitude, or ici c'était différent. Ces garçons, elle ne les aimait pas. Un petit garçon aux cheveux blonds et aux yeux bleus attira son regard. Recroquevillées, les larmes aux yeux. Elle se pencha vers lui.
« Il t'embête ? Tu peux m'expliquer. Apparemment tes copains ont des soucis d'élocution. »
Elle n'aurait jamais osé faire ceci un an en arrière. En même temps, une tentative de kidnapping, ça aidait à vaincre sa timidité. Et des amis géniaux aussi. Le groupe s'était leva et entourait les doubles fêtes. La salle les observait. Ça devenait une habitude d'année en année.
« On n'est pas potes. »
Mayzel ignora le garçon et se pencha vers l'élève en souriant.
« Non. C'est rien.
— Ça na pas l'être d'être rien. Et on ne tolère pas le harcèlement ni ici ni ailleurs. Je sais de quoi je parle, tu sais...
— Elle est têtue, gars, sourit Corwynn. Je te jure elle ne bougera pas avant d'avoir réglé le problème. Tu sais pas dans quoi elle nous a embarqués pour moins que ça. »
Mayzel retient un sourire. Corwynn parut le convaincre.
« Je... Ils veulent pas qu'on partage la même chambre.
— Et pourquoi ?
— C'est un monstre. »
Henuie sursauta dévoilant ces crocs. Le garçon en question se ravisa. Le petit blond lui osait à peine parler.
« Ce n'est pas un garçon.
— Pardon ?
— Je... Euh, je s...
— Oh. Et ?
— On veut pas de lui. »
Mayzel sentait son sang bouillir. Elle observa le groupe et évalua ces chances de se faire renvoyer le premier jour. Bon, elle pourrait mettre ça sur son passif, après tout. Une petite frousse devrait les aider... Henuie et Corwynn avaient lu dans son regard. Et n'approuvaient pas. Néanmoins, ils s'approchèrent. Mayzel, elle avait rangé sa baguette. Elle tendit le bras d'un geste vif et une batte de baseball apparut. Elle avait passé le peu de temps libre cet été à s'assurer que si on tentait de lui nuire, elle serait prête. Elle avait du mal à ne pas être fière. Visiblement, les harceler eux avait peur, et ils n'étaient pas les seules, le petit blond avait l'air tétanisé. Elle ne faisait pas dans la dentelle cette fois-ci, mais ce n'était pas comme si ça lui avait si bien réussi par le passé.
« Vous savez, j'ai pas trop de respect pour les petits imbéciles qui traitent les autres de monstres. Surtout sous mon toit... »
La peur changea de camp. Mayzel sourit. Sa méthode était contestable, mais sa patience pour ce genre de chose était inexistante depuis les derniers incidents. Corwynn et Henuie ajoutèrent que ce genre de comportement ne resterait pas impuni. Mayzel ouvrit et ferma sa main et la batte disparues. Elle leva la tête en l'air.
« Shelys. On a des petits... posant problème ici.
— Et je vois que tu avais la... situation bien en main. Notes, Mayzel, que je préfère utilise des méthodes plus modernes. »
La jeune fille sourit. La directrice était devant elle. Son égard était autoritaire, mais doux. Pour défendre les autres, elle était prête à fermer les yeux. En parti. Elle glissa tout bas à la sorcière :
« Ne te fais pas trop remarquer. La prochaine fois, appelle-moi immédiatement. Je m'assurais qu'ils s'en souviennent. »
La directrice se tourna vers le groupe d'ado. Elle tendit sa main au petit blond.
« Luc, c'est bien ça ? Apparemment, tu as des petits problèmes avec ces garçons. Si tu veux, l'école possède un dortoir neutre. Trois autres élèves l'utilisent actuellement. Tu pourras réintégrer ton dortoir quand bon te semble, si tu le souhaites. Ou y resté
— Et si on t'embête, ajouta Sorën, viens nous voir. On est tes ainés. On est là pour ça.
— L'école ne tolère pas ces comportements. Madame Coutaz va te prendre en charge, d'accord ? »
Luc hocha la tête. Mayzel se pencha vers lui.
« Si tu as besoin d'aide, n'hésite pas. Même si tu dors ailleurs, on est de la même maison.
— Merci... »
Elle lui tapota les cheveux. Il lui rappelait Corwynn quand il avait dû affronter son père.
« Quant à vous. Dans mon bureau. Je n'ai apparemment pas été assez claire cette année... Je rattraperais mon erreur dès demain. Attendez-vous à ce que je contacte vos parents. Vous venez ici pour étudier et apprendre à vivre ensemble, pas pour jouer aux brutes. »
Elle agita sa baguette. Mayzel ne l'avait pas souvent vue si en colère. Madame Coutaz arriva avec son sourire. Le salon était encore figé. La colère de la directrice palpable. Pourtant la directrice adjointe parut faire s'évanouir ceci, en même temps que le groupe disparu. Elle tendit un regard à Shelys et posa sa main sur son bras. Mayzel se demandait vraiment comment ils avaient pu passer à côté de leur relation si longtemps. Madame Coutaz se tourna ensuite vers Luc. Elle s'excusa au nom de l'école. Elle l'emmena ensuite avec elle pour lui montrer un dortoir pour lui, en attendant qu'il puisse venir dormir chez les hydres en toute sécurité. Avant qu'elle n'ait passé la porte, un garçon s'approcha. Il était reste seul, près des bibliothèques. Ces cheveux roux bouclés tombaient sur son visage. Il les avait observés de loin, sans intervenir. Mayzel reconnaissait ce regard. Elle avait eu le même, quand la peur paralysait tout est mouvement.
« Si tu veux, tu peux dormir dans ma chambre, Luc. J... J'ai pas de coloc. Moi ça me gêne pas. »
Ces yeux brillaient. Le petit blond se retourna, soucieux avant de regarder la sous-directrice. Shelys, elle hésitait. Corwynn près d'elle lui souffla qu'il pourrait faire un tour dans les dortoirs tous les soirs pour vérifier que tout se passerait bien avec les autres élèves. Si ça pouvait aider tout le monde a bien commencé l'année. Mayzel le suspectait aussi de vouloir avoir l'occasion de traîner tard dans les couloirs. Luc hocha la tête.
« Bien, commença la directrice. D'accord, mais pas ce soir. Dès demain. Laissons le temps à tes camarades de réfléchir un peu à leur action. Euh, tu es... Paul, c'est ça ? Paul, toi et Luc partagerez la même chambre, ceci te convient.
— Ça me va ! »
Madame Coutaz félicita Paul avant d'emmener Luc. La directrice disparue en un mouvement aussi. La salle resta vide un instant. Tous les élèves étaient figés. Une fille et un garçon de quatrièmes années, les nouveaux délégués de dortoir parurent sortir de leur transe et commencèrent un long monologue sur le fait que ce genre de comportement n'était pas toléré, avant de faire un rapport sur celui de Mayzel.
« C'est un peu tard pour les grands discours. C'est trop simple de jouer les héros quand tout est fini. Et si mon comportement n'est pas 'adéquat', la prochaine vous je vous invite à réagir. Drax et Quill n'auraient jamais laissé cela arrivé. »
Elle ajouta plus bas pour ces amis.
« Parfois, je comprends les Aliénistes...
— May !
— Je plaisante, je plaisante... »
Elle allait s'affaler sur son fauteuil quand une voix l'interpela.
« Elle se prend pour qui cette donneuse de leçon ? La chouchoute de la directrice. »
Elle allait répondre quand on le fit à sa place.
« C''est la meilleure élève de l'école.
— Ouais elle a presque gagné une compétition internationale.
— Et elle a combattu le prof fou. »
Sorën s'avança vers l'élève qui s'était plaint : une Vouivre. Elle cracha :
« Une hydre ? La meilleure ?
— Mayzel a eu la meilleure moyenne des premières années, oui. Elle a aussi battu le précédent record des Licornes. De plus, elle ne donne pas des 'leçons'. Personne ne le droit d'harceler quelqu'un. Point.
— Ouais, ouais, j'ai compris. »
Mayzel soupira. Heureusement, le reste des élèves présent la soutenait. Un professeur passa et annonça l'heure du coucher. Camille et Mayzel embrassèrent leurs amis avant de file dans leur dortoir. Les autres filles les regardèrent sans un mot. Une fois dans leur chambre, Mayzel soupira. La pièce n'était pas encore décorée. Elles devaient s'en occuper durant le weekend. Les tapis étaient ternes, les murs vident. Dehors, la lune brillait et dansait avec les étoiles. L'école lui avait tellement manqué qu'elle avait oublié que tout n'y était pas parfait.
« Ça va ?
— Oui, oui, je suis juste fatigue... Ils m'ont énervé.
— J'ai cru comprendre. Tu es prête pour demain ?
— Ouais, j'ai aidé les garçons à réviser pour le test de rentrée.
— Heureusement qu'il ne compte pas. Je ne sais plus si je suis capable de lancer un sort.
— N'exagère pas, rit la jeune fille. »
Le lendemain, la matinée serait pour les deuxièmes, troisièmes et quatrièmes années une marine d'évaluation. Chaque professeur de chaque matière les évaluerait, pour vérifier leur niveau et le cas échéant créer des groupes de niveaux. Mayzel s'inquiétait plus de ne pas se lever. Elle ouvrit son sac et en sortie son matériel de botanique. En un instant un pot de terre était prêt. Elle aimait planter sa fleur la veille de la rentrée. Anis l'avait assuré qu'elle pousserait dans la nuit. Elle déposa alors la graine laisse par ces roses de Noël l'année dernière. Elle se demandait quelle fleur l'accompagnerait cette année... Camille, elle partit prendre sa douche. Mayzel sortit alors le carnet offert par sa tutrice. Elle aimait bien écrire seule. Et quel meilleur jour que le premier de l'année à Soralen pour le baptiser ! Elle caressa la couverture avant de l'ouvrir d'un coup de baguette. Le manuel d'Albacorvus et ce carnet étaient ceux qu'elle protégeait le plus. Elle s'attendait à découvrir les pages ivoire vides, prête à accueillir sa plume, pourtant, glissé entre les pages, un petit mot se cachait. Délicatement, elle le dépliait :
Mayzel.
Je suis désolée de ne pas avoir pu t'accompagner cette année. Je suis sûre que peu importe les choix que tu feras, tu donneras le meilleur de toi-même. Qui sait, tu me battras peut-être encore cette année ? Attention, la compétition peut être rude.
J'espère que cette seconde année à Soralen t'apportera son lot de joies et de douceurs, que tes amis illumineront tes journées et que tu apprendras mille choses intéressantes. Travaille le cœur léger et la main sure. N'hésite pas. Échoue, apprends, recommence, réussis. Tu feras une magnifique sorcière. Essaie juste de ne pas t'attirer trop de problèmes, je sais qu'ils aiment s'inviter dans ta vie.
Et si la douleur s'invite dans ton cœur, n'oublie jamais que tu n'es pas seule. Si tes nuits sont longues et sans sommeil, n'oublie jamais que tes amis - et j'ose m'offrir ce titre - sont là pour toi. Si la perte entre dans ta vie, n'oublie pas que, la tempête, même la plus longue et la plus forte, laisse toujours place au ciel bleu et aux arcs-en-ciel.
Que cette année tu apportes bonheur et joie. Je ne suis pas là pour la partager avec toi, mais sache que tu auras en moi, toujours, une oreille attentive et en se carnet, un allié précieux pour dépose tes pensé et tes soucis.
À bientôt,
Ambroisine.