Egarée en Terre du Milieu

Por Iddyline

1K 61 13

Si elle avait rêvé de cette Terre du Milieu, Océane ne s'était pas attendue à s'y retrouver propulsée après a... Más

1 Prisonnière
2 #Balance ta détenue
3 Au rapport, soldat !
4 Pérégrination dans le Naith
5 Les seigneurs de Lorien
6 La princesse
8 Mon portabl'
9 Entraînement
10 Enquêtes
11 Ô ! Mon Prince !
12 En pleine santé !
13 Vie Champêtre
14 Passe d'armes
15 Viens-tu, mignonne ?
16 Péripéties

7 Quelle merveilleuse journée !

68 4 0
Por Iddyline

Océane se réveilla fraîche et... dispose. Ce bien-être fut tout de suite perturbé par une vague de frayeur qui la traversa lorsqu'elle reconnut ne pas être chez elle, dans son lit, ou tout autre endroit qu'elle aurait qualifié de familier, non parce qu'elle s'y serait déjà rendue, mais parce que le lieu aurait appartenu à son monde originel. Elle n'était pas chez elle, encore une fois. Elle s'assit sur son lit comme mu par un ressort. Son regard balaya la pièce. Elle devait s'y résoudre : elle n'était plus dans le monde réel, enfin..., le sien, qu'elle estimait être la réalité tandis qu'ici... Elle ressentait toujours l'effet couleurs et formes vibrantes de la veille mais largement atténuée comme si elle s'y habituait.

Tout était beau et serein. Au dehors, les feuilles étaient parfois agitées par le vent. Leur bruissement qui lui parvenait de la fenêtre légèrement entr'ouverte l'apaisait. Tiens ! Elle avait oublié de la fermer hier soir. La lumière du soleil filtrait au travers du panneau à lames, faisant office de volet, qu'elle n'avait pas tout à fait fermé. Elle examina ses émotions mais la frayeur s'était enfuie. Elle était pacifiée bien qu'elle était dans un monde qui lui était étranger. Restait de l'appréhension ; celle que vous éprouvez lorsque vous attendez des nouvelles que vous savez déjà mauvaises. La vie quoi !

Elle se rappela les évènements passés qui l'avaient amenée ici. Sa chute en Lorien, sa rencontre avec les elfes et sa capture, l'interrogatoire d'Haldir, son enfermement puis le voyage en cariole jusqu'à la capitale. Son émerveillement en la découvrant et sa rencontre avec les seigneurs Celeborn et Galadriel. Elle eut soudain envie de fumer ! Un peu. Son envie de nicotine était légère, pas comme d'habitude où le besoin d'en griller une était devenu impérieux le matin. Tout était adouci ici ! L'air était frais mais agréable comme s'il contenait la promesse d'une journée douce et ensoleillée. Elle était toujours sous le charme des lieux visiblement.

Elle fut interrompue dans ses réflexions par quelqu'un qui frappait à sa porte. « C'est mon prince », se réjouit-elle. Orophin entra lorsqu'elle répondit d'une voix enthousiaste. Ils se souhaitèrent le « bonjour » accompagné de sourires, chacun dans sa langue. Elle fut surprise de l'habillement d'Orophin et de constater qu'il portait les cheveux libres. Il portait une tunique longue bleu clair sans manches qui arrivait jusqu'aux mollets et fendue légèrement sur les côtés. Elle était brodée de motifs en forme d'entrelacs bleu sombre sur la poitrine et les épaules. Sous la tunique, il portait une chemise aux longues manches bleu-gris. Ses jambes étaient enserrées dans un pantalon de la même couleur que la chemise. Aux pieds, il avait des bottes montant jusqu'aux mollets et qu'elle pressentait destinées à un usage intérieur vu leur finesse. Une fois qu'il la quitta, Océane sortit de sa chambre pour faire sa toilette. Elle devait laver ses cheveux aujourd'hui. Son envie de tabac s'était envolée.

Plus tard, ils déjeunèrent sur la table de la terrasse au même endroit que la veille au soir. Il y avait des petits pains briochés tièdes, une sorte de lait au beurre, un breuvage aux arômes fruités inconnus mais exquis, des fruits comme des pommes et des poires, des baies qu'elle ne reconnut pas, du beurre, du fromage, des œufs pochés et même de fines tranches de viande froide. Océane goûta un peu à presque tout. Il l'aida plusieurs fois en lui tendant les mets hors de sa portée. La table et la chaise étaient bien trop grandes pour elle. Elle se sentit presque redevenir enfant devant les dimensions des meubles et leur hauteur, comme tout à l'heure dans la salle de bain. Ses pieds ne touchant pas le sol, elle les faisait se balancer de temps en temps. Elle qui s'était moquée plusieurs fois de celle qui étaient de petite taille, surtout lorsque celles-ci se voyaient à peine dans les miroirs des toilettes du lycée...

Elle avait enfilé le même tee-shirt que la veille, bien qu'elle aurait voulu en changer, et son pantalon. En revanche, elle portait les sous-vêtements qu'on lui avait apportés. Elle pouvait enfin en changer ! Certains étaient trop petits, d'autres trop grands. Au début, elle avait essayé une espèce de slip et s'était vexée d'à peine rentrer dedans. Etait-elle si grosse ? Lorsqu'elle en prit un autre, dans laquelle elle nageait presque, elle comprit qu'il y avait différentes tailles pour qu'elle puisse choisir. Elle supposa que les elfes n'avaient peut-être pas de taille standard, ou que celles-ci n'étaient pas adaptées à sa morphologie humaine. Quatre étaient à sa taille ou presque. Les soutiens-gorge étaient d'un genre nouveau mais ils étaient jolis et agréables à porter. Elle les essaya tous pour voir l'effet qu'ils rendaient sur elle. Seul l'un d'eux ne lui allait pas. Elle trouva plusieurs sortes de chaussettes de différentes longueur et épaisseur. Elle en choisit une qui lui allait bien, mais laissa les autres. Elle les essaierait plus tard. Ses sous-vêtements et ses chaussettes à elle, elle les avait fourrés dans un panier qu'Orophin lui avait indiqué la veille comme étant le sien désormais : le panier de linge sale, quoi !

Comme il l'avait déjà fait, patiemment, son hôte lui nomma en sindarin les différents aliments et autres objets, comme la table et les chaises. Océane réussit à en répéter et retenir quelques-uns. C'était un début. Océane lui souriait, heureuse de ces leçons impromptues. Assise à cette terrasse de bois enveloppée de végétation dorée, en compagnie de son prince, caressée légèrement par le soleil à la lumière douce et profitant d'une vue des plus enchanteresses, elle se sentait particulièrement bien et reposée. Ses cheveux étaient presque secs, maintenant. L'effet enchantement continuait d'exalter ses sens. Elle se sentait comme dans un conte.

oooOOOooo

Haldir était attablé à son bureau. Il avait reçu les copies des rapports faits sur Océane. Il était momentanément chargé de mission par ses seigneurs. Il se remémora son entretien avec eux, juste après l'entrevue avec l'humaine, où ceux-ci lui avaient demandé de devenir le mentor de la mortelle suivant son désir de se former aux armes.

Au premier mouvement d'opposition d'Haldir, Galadriel l'avait entrepris sur le terrain de l'expérience quasi exclusive qu'il avait cumulé à l'extérieur.

— Vous connaissez bien le monde des hommes, lui avait-elle rappelé. Leurs façons sont parfois très éloignées des nôtres. Cette atan (1) paraît bien fragile mais vous saurez y faire. Je doute, avait elle fait dans un sourire, qu'elle incarne un jour la guerrière de ses rêves. Cependant, il est certainement possible de l'aider à s'aguerrir. C'est là que vous intervenez.

— Quand et dans quelles conditions aura-t-elle l'occasion d'exercer ces nouveaux talents ? avait demandé Haldir ne pouvant s'empêcher de laisser paraître son scepticisme.

— Je pressens qu'elle ne peut pas rester ici, avait répondu Galadriel. Il faudra qu'elle parte à Imladris, si cela est accepté et suivant leurs dispositions. Dans tous les cas, elle sera envoyée ailleurs qu'ici et devra voyager dans des conditions qui seront difficiles pour elle. Elle devra retarder le moins possible l'allure de ses guides et protecteurs. Comptez quelques mois. Elle ne demeurera pas plus longtemps.

« Voilà qui est mieux », s'était dit Haldir.

— Qu'est-ce que l'humaine est censée savoir exactement de ce que nous envisageons pour elle ? s'était-il enquis.

— Il vous est difficile de communiquer avec elle ? Sa langue nous est totalement inconnue et il semblerait qu'elle ne sait rien de celles que nous pratiquons ? avait énuméré Galadriel, faisant hocher Haldir de la tête.

— Qu'elle garde pour l'instant ce qu'elle croit avoir compris de nous : l'acceptation totale de sa requête, avait-elle précisé. Il sera toujours temps qu'elle se détrompe en faisant ses propres constatations, ou il faudra la détromper lorsque la communication sera plus aisée.

— En attendant, avait repris Celeborn, votre frère Orophin, que nous plaçons sous votre responsabilité, veillera sur elle et vous rapportera tout fait digne d'être signalé que vous nous transmettrez. Il sera soumis à votre autorité pour cette mission. Vous-même, vous êtes directement placé sous notre commandement.

Haldir échappait ainsi à Ohtarion et à ses manœuvres ; momentanément. Après tout, celui-ci serait déjà ravi de le faire remplacer pour les mois à venir. Quelque part ce n'était pas plus mal.

— Pour que vous sachiez tout ce que vous avez à savoir, l'humaine porte sur elle une influence venant de l'Ennemi, avait confié Galadriel. Nous le sentons tous deux et certains d'entre vous aussi, avait-elle avancé. Haldir avait confirmé ces dires. Cela expliquait l'air mordoresque qu'on lui prêtait lorsqu'on la regardait, sans en trouver la raison. Etait-ce la véritable raison de son agacement à son sujet ?

— Cependant, elle porte sur elle un signe... avait hésité Celeborn. Mon épouse le voit plus nettement que moi. Il s'agit d'un sceau. Le sceau d'Illuvatar.

Ceci avait été une véritable révélation pour Haldir. Cela confirmait-il son abracadabrante histoire de venir du ciel ?

— L'Ennemi la fait rechercher. Il veut s'emparer de ce sceau, avait assuré Celeborn. Nous ne savons pas encore ce que cela signifie, ni pour elle, ni pour nous. En attendant d'en savoir plus, nous lui devons notre protection et, à terme, l'envoyer en sûreté le plus loin possible d'ici.

— Elle repose tout spécialement dans ma lumière, avait poursuivi Galadriel, pour la cacher aux yeux de l'Ennemi. Cela a pour effet d'occulter en partie sa mémoire, ce qui fait notre affaire : elle connait certaines affaires qui devraient rester secrètes et peut-être d'autres encore que nous vous demandons de recueillir et nous transmettre. La tenir ainsi calmera la plupart de ses angoisses. Nous savons qu'elle a été arrachée brutalement de son milieu d'origine.

« Encore une bonne chose » s'était dit Haldir, satisfait que l'Ennemi reste aveugle. Le bonus était l'assurance d'échapper à d'éventuelles crises de nerfs ou de larmes de l'humaine, simulées ou non, découlant de sa situation de captive expatriée. Si elle était en mission sous couverture, car l'Ennemi agissait en fourbe et ses pièges gagnaient en subtilité, sans que ses seigneurs ne l'aient discerné –hypothèse plus que douteuse– Haldir avait pensé qu'elle serait en grande difficulté pour la mener à bien. Parfait ! Il savait que ses a priori sur l'humaine venaient plus de son irritation du désordre et des réactions en chaîne, provoqués par l'arrivée inopinée de celle-ci, que de sa propre personne. S'il voulait être honnête, il ne pouvait décemment pas lui tenir rigueur de ce dont elle n'était pas responsable. Sa frustration, dont il avait déversé le trop-plein hier auprès de Voronwë, s'était grandement atténuée. Aujourd'hui, il était plus enclin à la bienveillance.

Ses seigneurs lui avaient aussi recommandé de favoriser autant que possible l'apprentissage du sindarin en plus des leçons qu'elle en recevrait. Il s'agissait de parvenir rapidement à communiquer et d'obtenir d'elle des réponses aux interrogations qui étaient restées sans réponse. La fin de leur conversation, en tête-à-tête avec la Dame, après que Celeborn se soit retiré, avait été plus inattendue. Elle lui avait fait entrevoir ce qui le guettait, lui, dans les temps à venir. Cela lui avait semblé tellement improbable mais il s'en remettait à la sagesse de la Dame. Celle-ci l'avait averti qu'il ne s'agissait que d'une possibilité d'avenir qui peut-être ne se réaliserait jamais.

Haldir regarda de nouveau les rapports et réfléchit à la façon dont il allait s'organiser pour mener à bien cette mission qu'il avait accepté. Le fait que son frère Orophin était impliqué, ainsi que le projet qu'Océane les quitte dans les mois à venir, l'avaient décidé à s'engager. A son départ, les choses avaient plus de chances de rentrer dans l'ordre. Orophin était enrôlé de fait, recruté par Océane elle-même sans qu'elle se doute être à l'origine de la situation. Haldir avait transmis à son frère, tôt ce matin avant le réveil de leur protégée, son ordre de mission officiel. Il lui avait dit exactement ce qu'il attendait de lui et comment s'y prendre, ajoutant les recommandations et les conseils de prudence de leurs seigneurs. Voronwë, lui, était en train de réfléchir à sa proposition de faire partie de l'équipe. Il pensa fugacement à Indis mais il l'avait embauchée pour autre chose.

Le sceau d'Illuvatar. Qu'est-ce que cela voulait dire exactement ? Qu'est-ce que cela recouvrait ? Ses seigneurs ne lui avaient rien dit de plus. Il se pouvait qu'ils n'en sachent pas plus. Il aurait été inconvenant de réclamer des réponses qu'ils n'étaient pas prêts à donner. Il était reparti, avec plus de questions sans réponse, qu'en arrivant.

Atan : humain(e) (en Quenya), littéralement : le deuxième peuple

oooOOOooo

Océane se dirigeait vers le Grand Mallorne, conduite par Orophin. Celui-ci voulait l'amener au talain de la famille Egnorionath, qui en était tout proche, pour y consulter une elfe à son sujet. Ils y accédèrent après avoir franchi un pont suspendu entre deux grands flets. En chemin, Orophin avaient été arrêté ou apostrophé par des elfes. Parfois la conversation tournait court après une parole de ce dernier. Océane essuyait quelques regards étonnés ou méfiants, voire amusés. Parfois, certains ne la considéraient même pas, ou si peu.

Ils entrèrentdans le grand hall à l'étage inférieur du talain familial qui servait d'accueilpour ceux qui venait quérir leurs services. Orophin demanda à voir Serindë à unemployé qui leur demanda de patienter ; il alla voir, non sans avoir jetéun œil curieux à Océane. Celle-ci était envoutée par les lieux. Le devant duhall d'accueil était une grande verrière. Au centre, le verre était simplementtransparent laissant passer à flot la lumière dorée du matin. Sur les côtés,des vitraux aux couleurs splendides coloraient la lumière suivant leur teinte,projetant leurs fins motifs lumineux sur le sol de bois blanc, les murs ou les branchesservant de colonnes.

Des elfes, principalement des dames, discutaient entre-elle, choisissaient des tissus, se faisaient montrer divers articles ou prenaient livraison de ce qu'elles avaient commandé. Certains elfes s'étaient retournés et avaient dévisagé Océane lorsqu'elle avait manifesté son enthousiasme en entrant. Elle ne sut pas quel type de commentaire elle avait suscité ni n'en devina la teneur. Elle vit une des employées avec des ciseaux à sa taille, ainsi qu'un ruban avec des marques régulières tout le long. Peut-être était-ce une couturière, se disait-elle. Orophin l'appela. L'employé qui les avait reçus les invitait à le suivre. Ils empruntèrent un long couloir après avoir pris un escalier. L'intérieur était plus intimiste, moins spectaculaire mais plus riche. Des lampes vitrail éclairaient le couloir sans fenêtre. L'employé les fit entrer dans une grande pièce lumineuse où les attendait Serindë.

La famille de Serindë était apparentée à un ancêtre noldo qui leur avait donné son nom et sous lequel ils commerçaient : Egnorionath. Celui-ci avait servi Gil-Galad dans les métiers de l'armurerie. La famille avait élargi ses compétences et proposaient de nombreux autres biens en rapport avec le travail du métal. Leurs membres étaient également doués pour les travaux d'aiguille et Serindë n'était pas la moins habile. Dame d'honneur de Galadriel depuis quelques centaines d'années, elle ne dirigeait plus la maison de couture et de broderie de la maison familiale. Elle accueillit les visiteurs d'un sourire qui faisait pétiller ses yeux. Orophin et elle se saluèrent mutuellement avec un certain décorum pensa Océane. Puis Orophin présenta Océane que Serindë enveloppait d'un œil bienveillant. Serindë était le pinson de cette maison. Sa joie de vivre s'incarnait jusque dans ses créations. Son visage respirait une félicité qui vous attirait irrésistiblement.

Bientôt, à l'étonnement d'Océane, une employée prit ses mesures dans une pièce à côté. Allait-on lui faire une robe ? Elle admirait l'une d'elle en cours d'élaboration sur un mannequin de bois. Si elle devait en porter une de ce genre elle était plus que partante, surtout offerte par son prince. Quelle merveille ! Le tissu évoquait les frêles pétales d'une fleur. Cela lui évoquait, dans un tout autre genre, la robe de Galadriel et dans une moindre mesure la tenue de Celeborn. La beauté de leurs vêtements, bien qu'éclipsée par l'aura de puissance de leurs porteurs, lui avaient fait l'effet de délicats tissus de nacre et de cristal. Elle sourit à son reflet dans un des miroirs en pied.


Debout devant la table où était posé le coffre qui avait transporté les affaires de l'humaine, deux sages entouraient le seigneur Celeborn. L'un d'eux s'agitait, cherchant à contenir sa nervosité. La chose qu'ils avaient devant eux malgré ses petites dimensions –elle tenait presque dans la main– ne lui inspirait pas confiance. D'assez près, la chose avait éveillé en lui la tentation des noldor que ceux-ci ressentaient en présence de tout ce qui matérialisait l'ingénierie et le génie technologique. Mais ce qu'il sentait était différent cette fois. Si son seigneur était étranger à cette sensation, éprouvait-il au moins cette répulsion qu'inspirait ce rectangle plat, contrairement aux créations sortant des mains des elfes qui les imprégnaient de la pensée de ce qu'ils aimaient ?

Celeborn avait consulté tous les rapports des guetteurs qui évoquaient le petit appareil à l'écran lisse de l'humaine. Certains avaient signalé avoir ressenti des ondes agressives ou déformées, d'autant plus fortes qu'ils s'étaient tenus tout près de lui. En examinant la position des soldats qui avaient raconté ce qu'ils avaient perçu, on arrivait à la conclusion que l'objet avait émis tout autour de lui, avec une puissance d'émission faiblissant rapidement à une certaine distance. D'autres, bien plus loin, n'avaient rien constaté.

A la lecture de ces comptes-rendus, Celeborn avait convoqué deux de ses meilleurs sages versés dans l'étude des produits nains. Ceux-ci avaient préconisé de préparer une pièce affrétée spécialement pour examiner l'objet sans que les ondes produites par celui-ci n'en sortent. L'expérience vécue par les soldats prouvait que l'artefact pouvait émettre tout autour de lui mais rien n'indiquait qu'il n'était pas capable d'émettre beaucoup plus loin si on lui en laissait le loisir. Celeborn consentit à leurs mesures de précautions mais s'opposa à leur volonté de l'étudier hors de sa présence. Cela rendit plus circonspects encore les deux sages. Dans un premier temps, ils ouvrirent le coffre où reposait le mystère à observer et qui avait servi au transport des possessions de l'humaine. Il ne restait plus que l'objet le plus hermétique à l'examen qui reposait au fond. Il avait été jugé plus prudent de se servir du coffre comme protection supplémentaire contre ses ondes. En cas de besoin, il suffirait de le fermer.

Celeborn saisit l'appareil et l'examina doucement sous tous les angles, prenant soin de garder le rabat toujours plaqué contre la partie lisse. L'arrière comportait plusieurs ouvertures rondes, obturées pour deux d'entre-elles par des pastilles transparentes de même forme et de même dimension. Les autres ouvertures en bas découvraient de minuscules parties métalliques. Il y avait également des boutons rectilignes sur les arêtes.

Ingûldo avaient étudié maintes inventions et réalisations faites par les nains. Certaines étaient des plus habiles et pouvaient vous faire croire à la magie comme le disait naïvement les hommes, mais tout s'expliquait lorsqu'on prenait la peine de les étudier. Les nains avaient beaucoup recours à la technique mais pas seulement. Eux aussi, comme le faisait les elfes, déposaient leurs intentions dans certains artefacts..., quand ils ne trichaient pas en recourant à l'art des elfes d'utiliser un sort, pour ouvrir une porte par exemple. Mais cette chose si étrangère à tout ce qu'ils avaient vus jusqu'ici ne sortait pas des forges naines ou de leurs ateliers. Ou c'était une sacrée nouveauté, qu'aucun de leur produit n'avait laissé deviner le prochain avènement ! Celeborn ouvrit le rabat, divulguant la partie lisse et noire qui tout à coup s'illumina. Les deux conseillers réagirent :

Hir nîn ! fit Ingûldo, prêt à intervenir. Mais Celeborn continua doucement son geste d'écarter le rabat de l'écran qui maintenant affichait une image aux couleurs lumineuses. Il demanda s'ils ressentaient quelque chose, comme ces ondes dénaturées déjà signalées, mais ils lui répondirent négativement. Bien ! On pouvait donc continuer.

Hir nîn : mon seigneur (en sindarin)

oooOOOooo

Hador faisait rouler entre ses doigts une petite pierre ronde, lisse et gravée d'un chiffre en sindarin. Une autre pierre de même facture, enroulée dans une peau encrée, lui avait été amenée également. C'était le produit des fouilles qu'il avait fait poursuivre au-delà du premier périmètre de recherche où était apparue l'humaine. Le soldat qui les avait rapportées avait d'abord ramassé, dans la rigole d'un ruisseau asséché, une peau qui emballait une pierre gravée également d'un chiffre. Des instructions d'une direction à prendre pour dénicher la pierre suivante avaient été encrées sur la face intérieure de la peau. Après avoir écumé l'endroit pour s'assurer que rien d'autre d'intéressant n'y était, il avait suivi les directives de la peau et s'était dirigé au sud de sa découverte, cherchant la cachette de la pierre suivante. Il avait fini par repérer ce qu'il cherchait dans le trou d'un tronc d'arbre. Une petite pierre ronde gravée. Aucune instruction cette fois-ci ! Il avait prospecté autour de l'arbre sans résultat. La piste s'arrêtait là.

Selon le soldat, auteur de cette pêche fructueuse, les pierres faisaient partie d'un jeu de piste comme ceux auxquels se livraient certains elfes. Mais de ce qu'il savait, habituellement la partie se déroulait dans la capitale ou dans les environs, jamais aussi loin, ni en bordure de forêt. Aucune partie n'était en cours également et si cela était, il n'en avait pas entendu parler. Hador fit fouiller de nouveau, et plus particulièrement, ce secteur mais rien de plus ne fut signalé. Peut-être que la deuxième peau avait été retirée ou bien le jeu n'en était qu'à sa phase de mise en place. Il fallait qu'il apprenne qui étaient les inconscients qui jouaient aussi près des frontières. Ce ne pouvait donc être que des soldats, seuls habilités à rester dans le secteur, suivant leurs affectations. Ceux missionnés pour des missions ponctuelles ne comptaient pas ; ils ne restaient pas suffisamment longtemps pour participer à une partie. Il espérait que ce ne fut que ça, de l'inconscience et non une machination pour renseigner les ennemis, dissimulée sous la forme anodine d'un jeu. Que l'ensemble ait été déposé pas loin de l'endroit où avait été appréhendée l'humaine n'augurait rien de bon et lui interdisait une enquête de routine. Ses seigneurs, et lui-même également, ne se satisferont que de toute la vérité. Il lui fallait investiguer jusqu'à déceler la moindre intention de trahison.

Hir nin ! avait crié Ingûldo à Celeborn dont la clameur et le geste brusque lui avait fait lâcher l'appareil ! Nārolor, l'autre sage, avait rabattu brusquement le couvercle du coffre. Celeborn l'arrêta dans sa manœuvre de le fermer à clé.

— Eh bien ! Avez-vous ressenti quelque chose de particulier ? Un danger quelconque ? demanda-t-il aux deux sages d'une voix calme. Ils lui répondirent par la négative. Si Ingûldo avait réussi à saisir la main de son seigneur pour qu'il se dessaisisse de l'objet, c'est parce que ce dernier s'était laissé faire, voulant éviter de casser l'artefact.

Celeborn rouvrit le coffre. L'étrange invention reposait sur le velours, rabat ouvert, son écran devenu noir, encore une fois ; ce qui arrivait souvent lorsqu'il cessait d'être sollicité du doigt. Il fallait promener ce dernier sur la partie lisse ou pousser les boutons pour obtenir une réaction se traduisant par l'affichage d'images et d'écritures diverses indéchiffrables mais dont le tracé était identique aux écrits trouvés avec l'étrangère. Ils avaient repéré une image, toujours la même, lorsque l'objet sortait de sa léthargie. Leur dernière manipulation fût la plus spectaculaire. Entre les mains de Celeborn, l'appareil avait été en mesure d'afficher en partie ce qui se tenait derrière lui, donc devant eux tous. Ils avaient compris que l'un des cercles lisses, à l'arrière, se conduisait comme un œil mais sans aucune mobilité autre que celle apportée par l'utilisateur. La manipulation devint plus étrange lorsqu'ayant appuyé sur un des petits symboles en bas, c'est leur visage à eux trois qui tout à coup apparu sur l'écran :

— La chose nous regarde ! s'était exclamé Nārolor tandis qu'Ingûldo dans un cri avait pris l'appareil des mains de Celeborn pour le jeter dans le coffre. La réaction vive passée, Celeborn avait repris la petite machine et refait la même manipulation. Il activa de nouveau la lentille de vue arrière. Son attention se porta sur une minuscule image tout en bas de l'écran. Il était certain qu'elle n'était pas là auparavant. Il appuya le doigt dessus. Celle-ci grandit d'un seul coup jusqu'à occuper tout l'écran. C'était eux ! portraiturés en pleine action quelques secondes auparavant. Ou plutôt, c'était lui, au visage étonné et tronqué sur la droite et celui de Nārolor, assez flou, en pleine panique pour la partie du visage qu'on voyait. L'image les montrait tous deux pris sur le vif, en surplomb. Ingûldo n'y était pas, car hors champ. Celeborn s'adressa à ce dernier, qui était intervenu.

— Vous nous avez-fait figurer là-dedans ? ! demanda-t-il sèchement en parlant de l'appareil.

Hir nîn, je n'aurai jamais osé... Qui aurai cru que ce fut possible ?

— Une manipulation au hasard... fit Nārolor qui avait pâli en voyant son image affichée par la chose. On n'avancera pas beaucoup sans les explications de sa propriétaire avança-t-il, préférant, de loin, que son possesseur prenne à leur place les risques qu'il y avait à courir en activant cet engin.

— Je pense qu'on gagnerait du temps à faire appel à elle, ajouta Ingûldo sollicité du regard par Celeborn, surtout que nous n'en avons peut-être plus beaucoup pour en faire l'examen.

— Précisez, fit Celeborn en reposant le téléphone dans le coffre.

— Les artefacts réalisés par notre peuple et qui produisent un effet quelconque pourvoient eux-mêmes à leurs besoins en énergie, notamment en absorbant celle du soleil ou de la lune, expliqua Ingûldo. Ce qui n'a pas l'air d'être le cas de cet objet dont la matière semble ennemie de ces deux astres et des éléments naturels qui pourraient l'abîmer.

— Cet artefact émet un champ énergétique qui indique une forte déperdition d'énergie, contrairement à ce que nous fabriquons, compléta Nārolor. Nous le sentons d'ici. Il finira par ne plus en avoir, mais quand ?

— J'ai ressenti cette énergie et la chaleur que générait la machine, en effet, confirma Celeborn.

— Contrairement à nos créations... ceci a certainement besoin d'une intervention extérieure pour l'alimenter. D'où certaines de ses ouvertures... finit Nārolor.

Ingûldo rejoignit son confrère dans son analyse. Celeborn les remercia puis les congédia. Soit ! Puisqu'il le fallait, il recourrait aux services de l'humaine, et rapidement.

oooOOOooo

Quelle merveilleuse journée ! fit Océane en s'étirant dans son lit, prête à se coucher. Elle avait débuté avec un petit déjeuner avec son prince à cette terrasse agréablement ombragée, protégée d'un soleil qui avait commencé à réchauffer l'air du matin. Elle avait pu encore admirer à souhait l'elfe aux traits et aux manières si aimables. Il lui avait appris quelques mots de sa jolie langue, si agréable à entendre mais à la prononciation difficile. Elle était chanceuse que son professeur soit si patient. Ils avaient continué leur dialogue à l'intérieur du talain ou Orophin lui avait montré quelques objets du quotidien tout en les nommant. Océane avait eu à cœur de les mémoriser mais estimait difficile de ne pas les noter pour être sûre de les retenir.

Elle avait essayé de le faire comprendre à Orophin mais elle n'avait pas obtenu de lui de quoi écrire comme elle l'avait demandé. A la place, il lui avait mis sous le nez des livres couverts d'une écriture tout à fait étrangère. Elle avait fait comprendre son inaptitude à les déchiffrer. Il eut plus de succès lorsqu'il lui demanda de lire ce qu'il y avait d'écrit sur les rares étiquettes de ses vêtements à elle ; habituellement elle les coupait. Elle ne voyait pas l'intérêt de lire ça. Encore moins de les écrire lorsqu'Orophin lui demanda de reproduire le texte des étiquettes sur une sorte d'ardoise. Une ardoise ! Comme à l'école primaire ! C'est bien parce que c'était son prince, qui le lui demandait, qu'elle s'était exécutée. Elle lui avait aussi réclamé son portable plusieurs fois et de plusieurs façons, notamment en le dessinant. Du moins, elle avait essayé, mais il ne semblait pas savoir de quoi elle parlait, ce qu'elle pouvait accepter. Comme son téléphone lui avait été confisqué avant qu'elle rencontre Orophin, ce dernier n'avait pas dû le voir ni en entendre parler. Elle aurait plus de succès auprès de l'elfe qui l'avait arrêté ou d'Haldir, mais il fallait pour ça qu'elle les revoit. Et croiser de nouveau Haldir ne l'enchantait pas plus que ça.

Elle se rappela avec tendresse ses sourires ou son enseignement patient. Elle avait bien ri lorsqu'elle n'avait cessé de perdre au jeu d'habileté auquel Orophin l'avait initiée. Il fallait tenir un caillou dans son poing serré, les doigts dirigés vers le sol. Ensuite, on devait déplier les doigts d'un coup, libérant la pierre qui tombait. Le but était de rattraper la pierre avec cette même main avant qu'elle ne touche le sol. Orophin lui avait montré : il rattrapait la pierre à chaque fois. Lorsque ce fut son tour, Océane sut combien Orophin était d'une rapidité époustouflante et d'une habileté confondante : c'est à peine si le bras de l'elfe bougeait. Océane, elle, n'était pas douée : la pierre tombait toujours et lorsqu'elle la touchait c'était pour l'envoyer plus vite en bas et de travers dans la pièce. Même en se baissant pour accompagner la chute de la pierre comme Orophin l'avait autorisé, elle échouait. Bah ! Elle s'entraînerait. Elle avait gardé la jolie pierre ronde.

Elle avait été mise à contribution pour quelques tâches ménagères mais elle voulait bien aider ; c'était la moindre des choses. Cependant, elle avait eu besoin de quelques explications pour les réaliser. Le moins drôle était l'exigence presque militaire d'Orophin qu'elle nettoie la salle de bain qu'elle avait à peine utilisée, et qu'elle fasse son lit dès le matin. Elle avait toujours eu l'habitude de le laisser en désordre et ouvert toute la journée. Comme ça il était parfaitement aéré ! Elle ne mettait les draps en place qu'au moment de se coucher. Elle avait essayé de le lui expliquer mais l'elfe s'était montré inflexible. Cet épisode mis à part, sa journée avait été splendide. Cela avait continué en rendant visite à un elfe qui lui enseignerait le sindarin. Son professeur avait un visage doux presque triste mais qui s'éclairait lorsqu'il affichait un sourire discret. D'une corpulence fine, il avait l'air très calme. Ses cheveux couleur miel tirant sur le roux encadraient son visage fin et retombaient en ondulations sur ses épaules. Ouaouh ! Si tous ses profs avaient été comme ça au lycée elle aurait volontiers suivi le double des cours ! Enfin, elle aurait moins séché, quoi !

Orophin était venu la chercher à la fin du cours pour l'aider à rentrer. Elle avait bien essayé de mémoriser les endroits par où passer mais elle ne se repérait pas encore. Il fallait penser en trois dimensions ici ! Prendre un escalier plutôt qu'un autre importait pour se rendre où vous vouliez, sous peine d'allonger votre chemin. Vu la beauté des lieux traversés elle ne se plaindrait pas. En revanche, elle reconnaissait que ces déplacements avec des descentes et des ascensions inévitables commençaient à la fatiguer. Et puis, si les paysages lui plaisaient, elle préférait, de loin, admirer son elfe. Elle ne s'en lassait pas. Il lui avait demandé de le renseigner sur sa famille à l'aide de l'ardoise mais elle n'avait pas pu lui apprendre grand-chose, sauf qu'elle était fille unique et qu'elle vivait avec ses deux parents. Lui, en revanche, lui avait révélé qu'outre Haldir, son frère aîné, il avait Rúmil comme frère cadet ; ce qui se disait « honeg ».

— Rumil ? avait-elle dit, enthousiaste.

Orophin avait eu un temps d'hésitation puis avait corrigé, en donnant la prononciation exacte du nom de son cadet.

— Rou... mil ? s'était-elle étonnée. Elle avait répété plusieurs fois ce nom, tandis qu'Orophin avait retourné l'ardoise pour écrire le nom de son frère cadet. La soirée s'était ensuite terminée en douceur. Elle avait même essayé les quatre tuniques écrues que l'elfe couturière au joli sourire lui avait données, ainsi que deux pantalons, un près du corps, l'autre taillé large. Cette elfe avait le coup d'œil ! Tout était à sa taille. Bien qu'il fût encore très tôt lui semblait-il, elle se mit volontiers au lit, sentant déjà des courbatures à ses jambes. Elle était vraiment vannée. Elle s'endormit bientôt, souriante et soupirant de contentement.

oooOOOooo

« Quelle déconvenue ! Elle ne sait rien faire ou presque », se disait Orophin au sujet d'Océane. Elle n'était pas forcément de mauvaise volonté, mais visiblement elle ne savait pas tenir une maison ! L'après-midi, il lui avait montré ce qu'il attendait d'elle. Il avait vite constaté que le ménage n'était pas son meilleur ami. Sa façon de tenir le balai témoignait qu'elle le maniait peu souvent. Si elle avait l'habitude de se faire servir là d'où elle venait, elle devrait changer ses façons ! Il lui avait entre-autre fait faire son lit après s'être aperçu, le soir, qu'il n'était toujours pas fait. Les draps étaient restés froissés toute la journée ! Il lui avait expliqué comment tenir propre la salle de bain après l'avoir utilisée, car ce n'avait pas l'air évident pour elle. Au moins, elle l'utilisait et plusieurs fois par jour. Il n'avait pas à se plaindre d'un manque d'hygiène de sa part, ce dont il était particulièrement soulagé.

A contrario, il avait dû freiner ses envies de se baigner à grande eau tous les jours. S'il avait bien compris, elle voulait se baigner ou faire couler de l'eau sur elle plutôt que de se laver au gant, au lavabo, aux endroits du corps qui le réclamaient le plus. Et avec de l'eau chaude, bien sûr ! Pas froide, comme elle le lui avait mimé. Orophin secouait la tête. Serait-ce comme ça tous les jours ? Elle ne cessait également de réclamer quelque chose qu'elle nommait « monportabl ». Mais il ignorait ce que c'était malgré ses mimiques ou ses croquis pour le lui faire deviner. Il lui avait également répété qu'elle devait se déchausser dans l'entrée et porter ce qu'elle voulait aux pieds, du moment que cela n'avait pas été utilisé dehors. Elle avait été jusqu'à lui désigner les bagues et anneaux qu'il portait, lui faisant comprendre qu'elle voulait les avoir ou en obtenir de semblables. Avait-elle conscience de leur prix ?

Il soufflait tout en écrivant, souhaitant terminer son travail aussi vite que possible. Il était loin d'avoir fini sa journée. Il valait mieux qu'il ne pense pas à ce qui l'attendait le lendemain.

oooOOOooo

Après avoir quitté le grand talain de leurs seigneurs, Ingûldo et Nārolor devisaient :

— Cette chose vous a mémorisée ainsi que notre seigneur. Est-elle capable de nous reconnaître grâce à un portrait figé de nous ? demanda Ingûldo tandis que l'autre sage haussait les épaules.

— Elle vous a vu aussi, fit ce dernier.

— N'y ai-je pas échappé ?

— N'en soyez pas si sûr ! Elle n'a peut-être montré que ce qu'elle a voulu.

Ingûldo ne répondit pas. Il avait déjà eu des discussions parfois houleuses avec Nārolor, leur différend atteignant parfois les bas-fonds de leur appartenance à telle branche de la généalogie des elfes. Ingûldo était un noldo, donc il était étiqueté marchand (ben voyons !), ami de la technique, versé dans la connaissance de la culture des nains et donc coupable d'indulgence envers eux... Il oubliait le reste des reproches, volontiers accolés à son nom plutôt que sa qualité de savant qui renseignait sur sa fonction auprès de ses seigneurs.

Pour lui, ce qu'ils venaient d'examiner tous les trois ressemblait plus à une machine qui appliquait ses routines qu'à un artefact doué d'une volonté quelconque. La chose était morte, malgré l'énergie qui circulait en elle et ses réactions aux différentes manipulations qu'on exerçait sur elle. Les différentes tentatives pour la faire fonctionner avec des sorts déclamés n'avaient eu aucun effet. Mais peut-être qu'il fallait un magicien pour cela, comme Curunir ou Mithrandir. Dieu seul savait où ce dernier était en ce moment puisqu'il n'avait pas d'adresse fixe connue ! Malgré cela, Nārolor penchait plus vers un article presque vivant comme le sont certaines épées d'exception et le lui avait exposé. Ҫa, et le fait que ces armes buvaient le sang qui transportait la vie se communiquant quelque peu à la lame, contribuait à manifester leur propre caractère.

« Qu'il croit ce qu'il veut ! L'humaine nous départagera. » pensa Ingûldo en voyant Nārolor s'éloigner après qu'ils se furent mutuellement souhaité le bonsoir.

Seguir leyendo

También te gustarán

50.9K 5K 60
Tous les personnages (ou presque) vivent dans le même immeuble. Entre les voisins qui font du bruit toute la nuit, ceux qui ne sortent jamais de leur...
144K 10.9K 83
Seuls les lieux déserts chassent ce goût amer, seul un cœur brisé peut être recollé.
10.4K 469 42
Violette, une jeune stratège déterminée, aspire à tracer son propre chemin au cœur de l'écurie McLaren. Pendant ce temps, Lando, un pilote talentueu...
41.2K 2.6K 82
Dans l'éclat des projecteurs, deux cœurs s'entrelacent, L'une comme une sœur, l'autre avec amour, La première en tournée, la seconde à ses côtés, Mai...