Instants fugaces

XLIX

- Mon chéri, tu es rentré !

J'acquiesce en réceptionnant ma mère dans mes bras. Derrière, mon père me sourit et mon coeur commence enfin à s'apaiser. Un tout petit peu, mais c'est déjà ça. Démarrer les vacances en retrouvant mes parents me soulage d'un poids.

- Pourquoi tu ne nous as pas prévenu ?

- Je voulais vous faire la surprise.

- Avoue, tu es passé voir Kris avant !

Ma mère me fait un clin d'oeil avant de perdre sa jovialité. La tête d'enterrement que je tire doit lui mettre la puce à l'oreille. Elle serre mes doigts mais je fuis dans ma chambre, je ne veux pas répondre à ses questions.

Deux semaine que Kris s'est tiré de mon appart, deux semaines que je suis seul à tourner en rond. Mais surtout, deux semaines sans se parler ne serait-ce qu'une fois. Ma vie a pris un virage à cent quatre vingt quand il a claqué la porte dans son dos, en me laissant au milieu de mon salon. Comment on a pu en arriver à ce stade ?

- Fiston.

Je tourne la tête vers mon père, affalé dans mon lit. La désapprobation tire les traits de son visage et je me renfrogne. Qu'il ne m'emmerde pas, j'ai clairement pas envie de me le mettre à dos aussi.

- S'il s'est passé quelque chose avec Kris, il faut l'arranger.

- Ca ne fonctionne pas comme ça !

- Je te laisse le week-end pour souffler. Et dès lundi, tu auras intérêt à te bouger les fesses. Il ne s'agit pas que de ton ami, on parle de Kris.

Je m'apprête à lui signifier que je m'en contrefous de son avis sauf qu'il est déjà sorti de ma chambre, me laissant un goût amer dans la gorge. Ce n'est pas qu'un pote. Je me laisse retomber sur mon lit avant de capter une pile épaisse, posée sur mon bureau. En deux pas, je suis devant le meuble et en une fraction de seconde, toute ma frustration explose en moi. Mes genoux flanchent, je me retrouve assis au sol, les larmes aux yeux.