Chapitre 94:

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Je regarde le fond de mon verre vide et j'hésite à m'en servir un autre.

Oui? Non? Oui? Non?

Est-ce raisonnable?

Bien sûr que non. Je sais que je vais le regretter mais j'aime la sensation de vide que ça me procure. Certains auront au contraire des émotions décuplées avec l'envie d'embrasser tout le monde, de câliner, de rire de tout, de pleurer pour rien, de faire des folies et des bêtises en tout genre. Pourtant pour moi, cette phase est passée très vite lorsque nous avons eu notre euphorie musicale avec Acacia et que nous nous sommes déchaînées sur le dancefloor.

Mais dans la phase descendante qui prédomine ce soir, j'ai l'impression que ça m'enlève tout ce que je peux ressentir, en l'occurrence la douleur et la tristesse en ce moment. Ça me vide de toute émotion positive comme négative, ça me purifie et me permet de prendre du recul sur les événements.

Je parle de mes ressentis face à l'alcool comme si j'en faisais une thèse et que j'avais tous les arguments, les exemples et les preuves dans le temps de ce que je raconte alors que c'est seulement la première fois que je vis cet effet secondaire. Peut-être que la prochaine fois que je serais tentée par l'alcool, ça ne me fera pas les mêmes sensations.

Il n'y aura pas de prochaine fois.

Je veux juste boire ce soir et oublier que j'ai probablement passé un des pires anniversaires. Après c'est fini.

J'attrape une nouvelle fois la vodka et je commence à ressentir la lourdeur de mon corps dans mes mouvements. Je n'ai plus aucune légèreté ni délicatesse. Je subis mon organisme.

Je me sers une dose qui sur le moment semble identique à celles versées par James mais avec du recul, c'est sûrement celle qui va me faire regretter d'avoir autant bu.

Il n'y a plus de jus d'ananas alors je le remplace par le premier jus qui me vient sous la main et de toute manière, je pourrais mettre n'importe quoi à la place, je ne sais même pas si je m'en rendrais compte.

J'emporte mon verre et je commence à aller danser avec la petite foule créée au milieu de mon salon. Je ne suis pas aussi énergique qu'eux, je dirais même que je suis d'une lenteur remarquable mais je me laisse balancer au rythme des basses.

Si sur le moment j'étais consciente de ce que je faisais, j'aurai probablement eu honte de danser seule au milieu de tous et surtout autant alcoolisée. Heureusement que BlahChat est inactif, je n'aurai pas d'inquiétude à lire des articles ahurissants au réveil.

Je danse pendant je ne sais combien de chansons, pour moi ce sont toutes les mêmes ou du moins je ne fais aucun effort à varier mes rythmiques.

Un moment, je m'arrête quelques secondes et j'observe ce qu'il se passe dehors. J'essaye de chercher des regards familiers mais je n'arrive pas à distinguer si de loin il s'agit de Donavan et Dustin. De toute manière, ça m'est égal. Par contre, je vois James assis sur la terrasse, sinon tous les autres que je peux connaître semblent partis.

D'ailleurs ce n'est pas le regard de James que je croise puisqu'il a les yeux fermés, c'est sa silhouette que je reconnais et qui est en train d'embrasser sa prétendante rouquine.

Je plisse les yeux et je me rappelle que c'est la même fille qui m'a demandé de partir pour « discuter » avec James. J'ai un pincement au cœur quand je les vois se rouler une pelle sous mes yeux car c'est la dernière personne que j'apprécie encore à cette soirée mais qui m'a elle aussi abandonnée pour quelqu'un d'autre. C'est sûr que maintenant James ne voudra pas passer la fin de la soirée avec moi pour tenter de me remonter le moral et écouter mes problèmes, il préférera conclure par des galipettes avec sa proie dans sa chambre d'hôtel.

BlahChat, Don't Read It - Tome 1 Where stories live. Discover now