Juste une connaissance

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Il fallait rentrer à Londres au plus vite.

Poirot était tiraillé. Cet enthousiasme de mener une enquête, d'avoir enfin trouver un petit bout de piste que ne soupçonnait même pas ce bleu de Jasper... Mais aussi cette désolation de quitter Amelia.

Il déboula dans la salle à manger. Raoding et sa nièce étaient assis à table, sirotant leurs thés.

Dès qu'elle leva les yeux sur lui, elle lui décocha un merveilleux sourire qui le transporta.

- Et bien, mon ami, où étiez-vous donc ? Je vous ai vu traverser le grand hall et déjà vous aviez disparu.

- Je questionnais le personnel ?

- Et avez-vous fait quelque découverte ? demanda le lord.

- Une piste... peut-être...

- Vraiment ?

Les yeux d'Amelia brillaient de curiosité et d'admiration. Poirot en ressentit une vive satisfaction.

- Oui, mais il me faut vérifier tout cela.

- Bien entendu, Poirot. Et je vous amènerai où bon vous plaira dans notre campagne si calme. plaisanta Raoding au souvenir de la discussion de la veille au soir.

- Ce ne sera pas nécessaire. Mes recherches ne peuvent se faire ici... à Helmsley... dans le West Riding... balbutia-t-il baissant les yeux, ne pouvant affronter le regard d'Amelia qui venait de s'assombrir.

- Vous rentrez sur Londres. déclama-t-elle, tentant de masquer son désarroi.

- Il le faut, en effet. Mais Poirot se doit de faire la lumière sur cette mort horrible... Vous en conviendrez. tenta-t-il de convaincre.

- Bien entendu, mon ami. Il serait inimaginable que le grand détective que vous êtes ne se sente pas happé par le désir de pourchasser les criminels dès que l'occasion se présente ! intervint Raoding.

Poirot ne quittait Amelia des yeux. Elle opina du chef, se confondant en un sourire triste.

Poirot déglutit et le lui rendit.

- Et quand repartez-vous pour la capitale ? s'enquit Raoding affairé à couvrir ses toasts de confiture de coing, ne soupçonnant pas le moins du monde le tumulte dans lequel ses deux interlocuteurs se noyaient inexorablement.

Devant le silence de son hôte, Raoding leva enfin les yeux. Poirot, debout au bord de la table, de profil, lui paraissait totalement absent.

- Tout va bien, mon ami ?

- Oui. Oui... se recentra le détective.

- ... Je m'en vais faire mes valises. Il ne faudrait pas que Poirot rate le seul train de la journée. se motiva-t-il.

***

Raoding était déjà installé au volant de sa superbe automobile. Il jouait avec la pédale d'accélération pour faire vrombir le moteur.

Poirot et Amelia étaient en haut du perron. Les adieux étaient compliqués.

- Dépêchons, Poirot. Il y a un petit bout de chemin jusqu'à Leeds. Nous risquons de manquer le train. Et Amelia ne sera pas sans vous rendre visite quand elle sera sur Londres dans quinze jours. cria Raoding, sa voix se détachant à peine de l'assourdissant tintamarre.

- C'est court, quinze jours. sourit la jeune femme.

- Vous trouvez ?

- Non, cela me paraîtra affreusement long en vérité. avoua-t-elle.

- Concernant votre séjour sur Londres. Accepteriez-vous que je vous héberge. Mon appartement est grand et...

- Hercule, les cancans iraient bon train.

Poirot : Une Pause À Helmsley (1ère Partie)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant