Chapitre 7

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— Tu sais dans quelle salle nous sommes ?

La question virevolte dans mon esprit pendant quelques secondes. Je réfléchis, mais rien ne me vient, j'étais trop focalisé sur le physique de Maé pour faire attention à autre chose. Un timide non qui ne me ressemble pas s'élève soudain entre nous. Il ricane à mon manque d'assurance et je me déteste. Je le déteste. Mais sentir son torse et son parfum me donne envie de lui.

L'Envie...

Je m'humidifie les lèvres, la tête me tourne.

L'envie. La convoitise. La jalousie.

— Je prévoyais de t'emmener dans L'Avarice... Comme pour tous les clients...

Son nez commence à frôler mon oreille et son souffle caresse ma nuque. Son ton est sensuel, mais avec une curieuse pointe de froideur.

— Mais celle-ci me paraît plus logique...

Ses lèvres semblent sur le point de m'embrasser la mâchoire, mais au dernier moment, il se recule. Tout en me fixant, il rejoint la mini-scène qui se trouve au fond de la pièce. J'ai l'impression de revenir à la vie, j'ébouriffe mes cheveux pour reprendre contenance. Alors qu'il commence à toucher à un écran encastré dans le mur, je me permets un rapide coup d'œil à la pièce.

L'endroit ne diffère pas beaucoup de celle de la dernière fois. Même taille, même style minimaliste et même fauteuil installé au centre pour le client. Les seules différences résident dans les tons utilisés – ici, le thème est le vert – et dans le fait qu'il n'y ait pas de boîte transparente, mais une chaise blanche sur la scène.

J'hésite à m'approcher pendant que Maé reste concentré sur ce qu'il fait. Je retire ma veste, pour tenter de me mettre à l'aise puis enfonce les mains dans mes poches de pantalon. Mon regard retrouve le dos du danseur et se repaît de cette vision...

— D'habitude...

La voix de Maé résonne à nouveau dans la pièce qui paraît glaciale pour une raison étrange.

— Dans cette salle, nous faisons un spectacle à deux, reprend-il.

Il se tourne vers moi et ses yeux semblent me dévorer. Jamais personne ne m'avait regardé ainsi. Je ne sais plus si c'est son rôle ou lui qui me regarde ainsi et ça me perturbe.

— Deux danseurs entièrement dévoués au client...

Il vient s'agenouiller sur le siège réservé au client, ses mains prenant appui sur le dossier. La position fait ressortir ses pectoraux sous sa chemise cintrée.

— C'est ce que tu voudrais ? m'interroge-t-il en penchant la tête sur le côté tel un chiot.

Je fronce les sourcils, surpris par sa question et pourtant, je ne devrais pas. Avoir deux danseurs doit être plus cher. Il veut seulement me faire dépenser plus comme un bon vendeur.

— Si...

Je me racle la gorge en entendant ma voix si éraillée. Je m'approche de lui et retente :

— Si ça ne dérange pas, je préfèrerais qu'il... n'y ait que toi.

Ma réponse semble lui convenir. Ses yeux pétillent et son sourire illumine son visage. Quand je suis à sa portée, il tend le bras pour empoigner ma chemise et me tirer soudainement vers lui. Nous sommes plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre et mon cœur s'excite... Et je doute qu'il soit le seul.

— Pas de Josselin ?

J'ai dû louper un épisode parce que...

— J'ignore qui est ce Josselin, mais dans tous les cas, c'est seulement pour toi que je viens ici. Personne d'autre.

— Le barman... À qui tu as donné ta carte...

Je ris en baissant les yeux vers sa main qui s'accroche toujours fermement à moi. De ma main libre, je le fais lâcher et amène sa paume jusqu'à mes lèvres. Souriant, je dépose un baiser dessus. Tel un effleurement. Ce geste me donne l'impression que nous venons de nous lier d'une manière ou d'une autre ce qui est absolument stupide.

Pour la première fois, je vois Maé troublé, incertain et je crois que cette version de lui me plaît autant que cet homme sûr de lui qu'il est d'habitude. Il est adorable et attendrissant. J'aimerais presque qu'il reste un peu comme ça pour que je le découvre un peu plus, mais cette facette s'évapore déjà. Le professionnel en lui a repris les rênes. Il se mordille la lèvre pour m'aguicher. Il réussit.

Il s'éloigne et va se placer au centre de la scène juste à côté de la chaise. Dans la seconde, la lumière se tamise et une mélodie résonne. Un sourire en coin, il entreprend de dénouer le foulard qui pend autour de son cou, tout en faisant onduler son corps avec une facilité effarante. Je mets ma veste sur le dossier du fauteuil avant de le contourner pour m'installer dessus.

Je ne sais pas ce qui me donne le courage d'agir normalement alors que cet homme a déjà attisé mon désir en trois mouvements. Mais peu importe. Je décide de mettre mon cerveau sur pause et de profiter de ce que Maé peut m'offrir.

Car le ballet a commencé.

Je me remémore la douceur de sa peau sur mes lèvres et regrette alors de ne pas avoir osé plus. J'aimerais en connaître la texture ainsi que chacune des aspérités de son corps. Goûter à la saveur de ses lèvres, de son torse, de l'intérieur de ses cuisses. Voir si ses yeux se révulsent sous le plaisir. Sentir son odeur quand son corps en réclame plus. Entendre le son de ses gémissements.

Je veux le faire mien.

Il faut que je sois conscient que ça n'arrivera jamais. Je n'ai jamais fait de telles choses à un homme, mais plus important, c'est un danseur. Ce n'est pas un homme croisé dans un rayon de supermarché ou à un speed dating. Il travaille au moment où je me rince les yeux. Mais pour une raison obscure, j'ai l'espoir que ce soit plus. Sa réaction plus tôt me fait croire à l'impossible.

Les pas de danse se succèdent. La musique devient plus lascive. Quand il commence à se servir de la chaise, sa main glisse le long de son abdomen, ralentissant au niveau de son nombril avant d'aller la caler sur son aine. Son bassin bouge de manière plus que subjective et mes doigts s'enfoncent dans les accoudoirs pour m'empêcher de lui sauter dessus.

Il me fait perdre latête...

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