I. La Descente

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Le son vint en premier.

Assourdissant.

Percutant.

Puis vint l'odeur.

Poussière.

Chair brûlée.

Le son de la mélodie fut recouvert par les bruits de déflagrations. En un instant, l'ambiance feutrée de l'alcôve se brisa. Line se tenait sur place, incapable de bouger. La scène se déroulant devant elle lui semblait surréaliste. Un corps tomba à ses pieds, fauché dans sa fuite. Elle était assez près du cadavre pour avoir senti la chaleur du tir et ses yeux se baissèrent sur les restes carbonisés d'un visage méconnaissable. Son estomac se révulsa à cette vision.

Un autre tir, bien trop prêt d'elle, la fit sursauter et reprendre ses esprits. La peur déclencha une montée d'adrénaline. Les mains autour du visage, autant pour se protéger des éclats de béton et de bois qui volaient autour d'elle que pour se préserver de ce spectacle de mort qui l'environnait, elle courut vers la porte la plus proche.

Le couloir n'était pas épargné par la cohue ambiante. Elle se fit violemment percuter par une personne qui courait en sens inverse et sa épaule heurta le mur lui faisant perdre son élan.

Son cerveau lui criait de s'enfuir. Chaque seconde était précieuse, mais son corps de répondait pas.

Elle était incapable de trouver une issue. La peur la paralysait.

À l'angle du couloir, le canon d'une arme entra dans son champ de vision, suivis d'une jambe. Chacune des secondes qui s'écoulaient la rapprochait d'une fin inexorable. Il fallait qu'elle réagisse, maintenant. Elle poussa machinalement la seule porte qu'elle connaissait, comme dirigée par sa mémoire musculaire. La refermant derrière elle, elle se savait piégée, sans issue.

Le vestiaire où elle se changeait chaque soir était un cul-de-sac. Des larmes de frustration coulèrent sur ses joues, emportant le reste de son maquillage et laissant deux trainées au milieu de la poussière sur son visage. Les bruits se rapprochaient de sa position. Elle tourna machinalement la tête, rien ici ne pouvait l'aider à se barricader, ou à se protéger.

Comment se défendre contre des armes à plasma ?

Comment se défendre contre ces hommes au casque aux yeux bleu scintillant ?

Comment se défendre contre la Milice ?

Une explosion retentit, faisant sauter les dalles du plafond et rependant une fine poussière.

Le plafond...

Elle prit le banc qui trônait au milieu de la salle pour le caler contre les casiers métalliques. Elle monta dessus et, au moment de s'aider de ses mains pour monter sur les armoires, elle s'aperçut qu'elle la tenait encore. Un choix devait être fait, perdre de précieuses secondes ou la laisser là.

À genoux sur le métal, elle souleva une plaque du faux plafond, son intuition était la bonne. Il y avait bien un espace au-dessus, assez petit, mais elle pouvait s'y faufiler. Après de rapides contorsions, elle cala son dos sur l'un des rails de jointure.

Line regardait la chose qu'elle tenait contre elle, ses mains crispées et tremblantes autour. Elle n'avait pu se résigner à se séparer de son bien le plus précieux. Elle écoutait chaque bruit autour d'elle, ceux de l'assaut. Elle sentait les murs vibrer, comme si tout se passait juste à côté. L'odeur de poussière s'accumulait dans ses narines, lui donnant envie d'éternuer. Son cœur battait la chamade comme s'il voulait sortir de sa poitrine. Elle ferma instinctivement les yeux, priant que personne ne puisse l'entendre, serrant les lèvres pour qu'aucun son ne sorte de sa bouche.

The silver nightingale - A Fowloon city's storyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant