Epilogue.

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Entre les arbres sauvages et les grosses racines sur les pierres blanches, la Vie évoluait, la traîne de sa tunique d'un blanc éclatant virevoltant sur ses talons. Elle savourait le calme retrouvé sur l'île sous l'éclat de la lune. Il était rare qu'elle retourne sur Terre, qu'elle y fasse son apparition. Mais les aventures de la dernière Destinée l'avaient suffisamment divertie pour lui rappeler la cuisante morsure de l'éternité et pour lui montrer que bien des choses avaient échappé à son contrôle. Elle n'était pas omnipotente. Soit ! Mais elle était fière des Destinées. Jamais aucune ne l'avait déçue.

Devant elle, les buissons frémirent avant de laisser apparaître une immense bête, frôlant les trois mètres de haut et possédant... trois têtes ! Les crocs du chien des enfers dégoulinants de baves s'approchèrent d'elle tandis que les trois immenses museaux s'empressèrent de la renifler. L'entité resta immobile avant de tendre la main pour flatter l'encolure de l'un d'eux.

« Brave bête » murmura-t-elle.

Soudain, un sifflement déchira le silence et Cerbère se redressa sur le qui-vive. À ses côtés se matérialisait la silhouette de la Mort, ses longs cheveux blancs contrastant avec les ténèbres qui l'entouraient. L'aînée des deux sœurs l'accueillit de sa voix si douce :

« Chère sœur...

La cadette, toute de noire vêtue inclina la tête respectueusement avant de laisser un sourire éclairer son visage glacial :

- Tu as fait de Mère Nature une destinée !

La Vie esquissa une petite moue, presque gênée face au sifflement mi-admiratif mi-moqueur de sa sœur.

- Ne te moque pas, ça n'est vraiment pas poli. Je ne me doutais pas que cette petite entité s'était dissimulée derrière les traits d'une nymphe. La Nature convergeait vers elle, j'ai cru simplement avoir à faire à une de nos nouvelles créations. Je ne savais pas que c'était elle !

La Mort éclata de rire avant de secouer la tête. D'un ton doucereux, elle sussurra :

- Ne prends pas cette mine atterrée. Théoriquement, la Nature est bien une de nos créations. Ça fait simplement des millénaires qu'elle nous berne.

- Nous la pensions disparues...

- Et bien nous avions tort. Nous aurions pu nous en rendre compte, les destinés ne se réincarnent pas. Ce monde nous obéit de moins en moins. Nous ne sommes pas omnipotentes, ma chère.

La Vie haussa des épaules face aux dires de sa sœur. Bien sûr que celle-ci avait raison. Cependant, l'entité de l'au-delà avait tendance à exagérer. C'est pour cela que la Vie soupira :

- Nous pouvons tout de même nous réjouir du fait que cette douce Yerine ait pu vaincre ses démons tout en restant en vie.

- Bien sûr que je m'en réjouis ! Cependant, elle aurait pu se plaire dans mon jardin.

- Elle bâtira le sien avec Orphée... Le pauvre héros méritait lui aussi de pouvoir enfin connaître l'amour et la paix. Après tant de temps de malheur et d'errance...

Elles restèrent un instant dans le silence, observant la nature sauvage qui les entourait. Soudain, Cerbère se mit à gronder, ses poils se hérissant. Surprise, les deux sœurs se tournèrent vers l'origine du son... avant de se figer en apercevant un enfant sortir des fourrés. Ses cheveux bruns et son visage angélique ne les trompèrent point.

- Chronos... Quelle surprise...

L'entité sous son apparence de garçonnet fronça des sourcils, l'air étonné.

- Mince, j'avais oublié quand je me trouvais...

- Un comble pour le Temps ! ironisa la Mort.

L'enfant lui lança un regard réprobateur qui s'attira les grognements de Cerbère. La maîtresse de ce dernier n'y pris cependant pas garde et s'enquit :

- Et quand étais-tu il y a quelques instants ?

Les yeux de l'entité du temps se mirent à scintiller d'une étrange manière et ses lèvres s'étirèrent en un sourire empli de malice :

- Une très lointaine époque. Une vieille amie a fait appel à moi il y a peu et j'ai fait le voyage entre les deux temps.

- Et qui était-ce ?

- Vous ne devinez pas, mes sœurs ? C'est pourtant encore une de vos petites destinées...

L'entité leva les yeux au ciel, ses doigts se resserrant autour du tissu blanc de sa tenue.

- Viens en fait Chronos.

- C'était Circé. L'enchanteresse de l'île d'Eea.

Le silence suivit sa déclaration tandis qu'un grand sourire vint éclairer le visage de la Vie. La Mort quant à elle s'appuya nonchalamment contre le gardien des enfers, attentives à ce que se disaient le Temps et sa sœur.

- Que voulait-elle ?

- Savoir quand son histoire sera contée... »

Fin !

À tout de suite pour le mot de la fin !

Yerine (Mélusine HS.1)Where stories live. Discover now