VII.

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Angèle alla ouvrir la porte à son inconnu visiteur. C'était une femme, grande, mince, à l'allure fière et sensuelle. Elle avait des yeux magnifiques, marrons et imprégnés d'un vert émeraude, enjolivés par un sourire charmeur, ravissant. Elle était parfaitement habillée et portait des talons aiguilles d'une dizaine de centimètres. Sans rien dire, lentement, elle avait sorti de sa poche un couteau. Angèle avait aussitôt compris. Elle s'était précipitée pour se saisir d'un revolver qu'elle avait volé à Georges et caché dans un tiroir.

Les deux femmes étaient face à face. Rose avançait, calmement. Les mains d'Angèle tremblaient, elle vociférait, pleurait, menaçait. Mais Rose n'écoutait pas. Elle avançait, placide. Elle s'arrêta à une cinquantaine de centimètres de sa proie. Angèle était paralysée, incapable d'appuyer sur la gâchette. Elle suppliait, priait, larmoyait. Rose avait fait encore un pas. Elle leva sa main au-dessus de son épaule. La pointe du couteau était tendue vers le corps d'Angèle. Rose fit un mouvement sec, lançant cette pointe vers l'abdomen de sa victime.

Soudain, Rose se retrouva dans les rues de Paris. La même ambiance macabre que les fois précédentes régnait. Mais elle était étonnement seule. Ses mains n'étaient pas couvertes de sang, ni le sol, ni les murs des bâtiments.

Inopinément, elle vit au loin une petite fille. Le teint blafard, blonde, aux yeux d'un bleu profond. Son corps présentait des ecchymoses et des cicatrices. Ses mains et ses pieds étaient enchaînés. Elle avançait péniblement vers une femme. Rose reconnut Angèle, son visage était semblable, mais une plaie béante dans sa poitrine laissait voir son cœur battre derrière ses côtes. La petite fille lui ressemblait en tout point. Lorsqu'elle fut au niveau d'Angèle, celle-ci la serra dans ses bras.

Rose avait marché jusqu'à n'être plus qu'à quelques mètres d'elles, mais aucune ne l'avait remarquée. Angèle sortit un couteau de sa poche, c'était celui de Rose, celui qu'elle avait lorsqu'elle était entrée dans la chambre 107. La petite fille tendit les poignets. D'un coup de cette lame affûtée, Angèle brisa les chaines qui emprisonnaient la jeune enfant, libérant ses mains puis ses pieds. Elle se releva. Elle regarda Rose dans les yeux, et d'un geste abrupt, elle planta le couteau dans son cœur. Une lumière d'une blancheur extrême fit baisser les yeux de la spectatrice.

Rose observait avec effarement ses mains s'inondant de sang. Elle fut submergée par une vague d'émotions. Elle ressentait la peur, le froid, la douleur. L'illusion, la réalité, quelle est bien maigre la distinction dans son esprit pour un tel paradoxe.

Tout s'arrêta. « In lux fiat tenebris ».

Et l'obscurité fut.

L'Horreur est humaineWhere stories live. Discover now