Chapitre 6

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Vers environ quatre heures du matin, la majorité des invités s'étaient assoupis dans divers recoins du logis, notamment ceux ayant anticipé en amenant avec eux leur propre duvet. Naeul était quant à elle en effet dans un sale état : elle n'était plus capable de tenir debout, et se faisait lentement mais sûrement aspirer par le puits sans fond du sommeil. Lucas et Lia n'allaient pas tarder à se coucher, eux tout autant exténués par cette soirée arrosée. Le Hongkongais se leva péniblement du canapé, puis alla porter sa meilleure amie, qui, docile, se laissa faire. Il dit, quelque peu sévère et directif :

« Toi, c'est bon. Tu as suffisamment bu. Allez hop ! Au lit. »

L'aîné l'emmena dans une des chambres disponibles, l'installa délicatement sur un lit d'ores et déjà occupés par deux autres individus, et sortit en fermant silencieusement la porte derrière lui. Le jeune homme revint sur ses pas, s'adressant cette fois-ci à son amante :

« Tu viens ? On dort, bâilla-t-il.

- Où ça ?

- Ben, sur le canapé ? Il est libre, donc on peut en profiter.

- Euh, on risque d'être un peu trop serrés je pense... Non ?

- Mais non. »

Jusqu'aux petites heures du matin, les deux amoureux - du moins, était-ce réellement ce qu'ils étaient l'un pour l'autre ? - avaient échangé sur divers sujets, à la fois tout et rien, en chuchotant, confortablement blottis dans leurs bras respectifs. Néanmoins, ce fameux sujet sensible avait encore une fois été abordé, et entre eux, les choses n'avaient guère avancé :

« Ecoute : tu sais que je suis prêt à être patient autant de temps qu'il le faudra, mais je t'avoue, par moment je n'arrive pas à te comprendre... avoua le plus âgé avec appréhension et peine.

- Pour être tout à fait franche avec toi, même moi je ne me comprends pas. Et puis... je pense sincèrement que ça ne sert pas à grand-chose : c'est horrible, parce que tu ne peux pas te rendre compte à quel point je tiens énormément à toi... Mais j'ai l'impression que je me bloque toute seule, je ne sais pas... Je n'y arrive juste pas... Je n'arrive pas à te le montrer, ça. Je n'arrive pas à accepter les choses, et au final, à me laisser porter par l'instant présent. »

Profondément déstabilisée du fait de se confier si abruptement et intimement, la petite brune cacha son visage dans le cou de son vis-à-vis. Stupéfait, le concerné ne put que la laisser agir comme bon lui semblait. Il osa même glisser sa main dans sa longue chevelure lisse. Avec le temps, Lia n'était plus trop démonstrative envers autrui ; mais pour Lucas, elle acceptait de faire ce petit effort, qui après tout n'en était pas vraiment un, puisque c'était une manière comme une autre pour elle de prouver son attachement. Elle continua son monologue :

« Je n'arrive pas à te montrer que je t'aime beaucoup. Je suis la seule idiote à m'en empêcher. En soi, rien ne m'en empêche. Rien, sauf ma mémoire, en fait... »

Le plus vieux fronça inconsciemment les sourcils, avide d'en savoir plus.

« Et ça clairement, tu n'imagines pas à quel point ça me frustre et ça me fait chier. Ça me fait chier pour moi, mais ça me fait surtout chier pour toi. Moi-même je m'empêche d'être heureuse, je n'arrive pas à oublier ce que mes ex m'ont fait. J'ai beau essayer du mieux que je peux, ça ne veut pas partir, on dirait que c'est comme une marque indélébile, tu vois ? Ça me saoule parce que je te fais vraiment confiance. Concrètement, tu es sûrement la personne la plus attentionnée que je n'aie jamais rencontrée, et pourtant, je crois juste que je n'arrive pas à t'accepter en tant que petit ami. En plus, ce n'est même pas le terme en lui-même qui me dérange... C'est juste... nous ? Enfin, du moins notre relation... Je sais que je me prends beaucoup trop la tête, et j'ai franchement l'impression d'abuser de toi par moment. Je me dis que ça sera au-dessus de tes forces de rassurer quelqu'un qui n'est même pas foutue d'affronter ses peurs et d'oublier le passé, parce que j'aurai peur que ça recommence. En fait voilà, je vais abréger ça sera plus simple : j'ai peur de revivre la même chose. Je me dis que tu mérites quelqu'un de beaucoup plus simple, on va dire. Et puis aussi je me dis qu'à force tu en auras marre justement de faire preuve de patience envers moi. Tu voudras partir, et le pire, c'est que je ne pourrai même pas te le reprocher, puisque je l'aurai cherché... Tu comprends tout ce que j'essaye de te dire ?

Le « bizarre »Waar verhalen tot leven komen. Ontdek het nu