chapitre 16

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- On va faire un tour ?

Était-il surpris par ma requête ? Ou peut-être hésitait-il? Une fois de plus, il restait impassible. Noam ne me lâchait pas du regard ; il me semblait qu'il réfléchissait encore à la réponse qu'il allait me donner. De mon côté, attendant impatiemment sa décision, je ne savais pas si je préférais qu'il dise oui ou non.

Sans un mot, il se leva et fit quelques pas en direction de la sortie. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, je me mis à le détester à nouveau. Pas de réponse ; il ne daignait même pas me faire un signe de tête pour me dire non. Un de ses regards hautain m'aurait suffit mais rien. J'essayais de me laisser aller, de prendre les choses comme elles viennent et de cesser de me comporter en enfant comme Joanne me l'avait conseillé plus tôt, et voilà qu'il me faisait passer pour la dernière des idiotes.

Je restais les fesses contre ma chaise, m'apprêtant à rouvrir mon livre si peu intéressant et fulminant de commentaires peu élogieux à son sujet. Noam, le croyant déjà partit, me fit sursauter par son raclement de gorge bruyant. Je tournai la tête dans sa direction, il me regardait en haussant les sourcils.

- Tu attends que je te porte jusqu'à la voiture ? me dit-il d'un ton moqueur.

D'accord, peut-être m'étais-je un peu emballée mais je suis sûre qu'il l'avait fait exprès. Il prenait certainement un plaisir pervers à jouer avec mes nerfs.

Je me levai, pris mes affaires et me dirigeai dans sa direction.

- Non merci, hier soir m'aura suffit.

- Tant mieux, je ne l'aurais pas fait deux fois.

La parking étant juste en face de la bibliothèque, nous mîmes à peine deux minutes pour arriver devant sa voiture. Il s'agissait d'une vieille voiture noire style ancienne Alfa Roméo ; c'était peut-être idiot mais la voiture lui correspondait parfaitement, selon moi. Voiture noir, blouson noir, regard noir ; j'avais presque l'impression de faire tâche dans ce décor. Noam déjà installé, je pris place côté passager.

- Alors, où est-ce que tu veux aller ? me demanda Noam en allumant le contact.

Je n'y avais pas du tout réfléchie. À vrai dire, bien que cela faisait maintenant quelques semaines que j'habitais ici, je ne connaissais toujours pas de lieux particuliers où me rendre. Noam du se rendre compte du vide qui traversait mon esprit et laissa échapper un rire.

- J'ai une idée, finit-il par dire.

- Où est-ce que tu nous emmènes ?

Il me regarda avec un petit sourire au coin de ses lèvres qui laissait apparaître une fossette.

- Tu verra.

Bizarrement, je lui faisais confiance et ne posai pas plus de question.

Cela faisait maintenant un petit quart d'heure que nous longions les côtes californiennes sans prononcer un mot. Ce silence n'était pas gênant ; au contraire, il était reposant. Je regardais défiler sous mes yeux l'étendue bleue et les vagues qui s'écrasaient bruyamment sur le sable. Étant dans mon champs de vision, mes yeux ne purent s'empêcher de s'attarder sur Noam. Encore une fois, je ne pouvais détourner le regard, hypnotisée par toutes les composantes de cet homme qui me faisait plus d'effet que je ne voulais l'admettre. La tête posée contre mon fauteuil, je m'abandonnais à une inspection détaillée de tout ce que je m'empêchais d'observer habituellement. Une fois de plus, il scrutait l'horizon sans le voir, plongé dans des pensées profondes, ou peut-être était-ce des souvenirs ? Je n'étais pas sûre d'avoir un jour la réponse.

Les traits de son visage étaient fins, sa mâchoire marquée sans être imposante. Quelques tatouages éparpillés prenaient naissance dans sa nuque et descendaient le long de ses bras jusqu'à ses phalanges, ce qui contrastait avec sa peau naturellement claire. À ce moment précis, il semblait serein, presque doux. L'ensemble de son visage s'était apaisé mais il ne perdait pas pour autant ce regard sombre et sévère. J'étais fascinée malgré moi par cette façon qu'il avait de me glacer le sang et de me brûler la peau en un seul coup d'oeil. Avait-il au moins conscience de l'effet qu'il me faisait ? Je ne l'espérais pas.

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