Part 1 - Jimin

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From: Jimin
To: Jungkook
— Printemps, 2020

Jungkook-ah,

Si tu lis cette lettre, cela signifie que je ne suis déjà plus là. Les mots me manquent encore, pourtant je m'y suis préparé, et ce papier symbolise les dernières phrases que je t'adresserai. J'ignore si je devrais fondre en larmes, avec ce stylo coincé entre mes doigts et ces tuyaux insérés dans mes narines. Mais ce qui est certain, c'est que mes mains ne tremblent pas.

Je suis enfin prêt à partir et à te dire tout ce que je n'ai pas eu le courage de t'avouer droit dans les yeux quand il était encore temps.

Ces six derniers mois, tu as été à mes côtés. Tu ne m'as jamais lâché. Tu souriais, surtout au début, quand nous pensions qu'il y avait encore un espoir. Tu souriais, et c'était la seule chose qui me faisait croire que je m'en sortirai, que je continuerai de vivre pendant des dizaines et des dizaines d'années. Tu souriais, même le jour où les résultats des diagnostiques sont tombés et que je tremblais d'effroi face à ce médecin mal rasé et dont la mine grave ne me rassurait pas.

Six mois, c'était ce qu'il me restait. C'était les paroles du docteur. C'était le temps qu'il nous restait, à passer ensemble tous les deux. Jungkook, je me souviens de ton sourire, si différent des autres et si sincère pourtant. Tu m'as fait la promesse ce jour-là, alors que je pleurais dans tes bras, que nous profiterons de chaque seconde, de chaque minute, de chaque souffle qui passeront. De chaque instant, de chaque souvenir, de chaque fou rire. Tu t'es montré si fort lorsque tu venais me voir à l'hôpital, mais plus les jours passaient, plus je sentais les coins de ta bouche s'affaisser ou bien tes muscles se crisper. Tu ne me l'as jamais dit, Jungkook, mais secrètement, je savais de quelle manière tu passais tes nuits, juste après m'avoir rendu visite et après avoir quitté le bâtiment. Contrairement à ce que tu aies pu croire, les traces de tes larmes n'étaient pas invisibles pour moi, cependant je m'efforçais de sourire malgré tout, malgré la douleur que nous partagions.

Je ne sais pas combien de temps cela m'a pris exactement, mais je suis tombé amoureux de toi de la plus belle des façons. Comme si les étoiles étaient de notre côté. Comme si, finalement, mon combat n'était pas fini et mon sort n'était pas scellé. J'avais, de par la naissance de cet amour que je te porte, à nouveau l'espoir de guérir. Je voulais vivre. Je désirais passer le reste de ma vie avec toi. Mais mon espoir fut de courte durée. Quand je sentais mon cœur ralentir dans ma poitrine, la peur me paralysait entièrement. J'étais terrifié à cette idée. À l'idée de mourir.

C'est pour cet raison que je refusais ton amour. J'ai tout fait pour que tes sentiments ne soient jamais réciproques aux miens. Il ne fallait pas que tu m'aimes.

Je t'ai repoussé. Je t'ai menacé. Je t'ai dit des choses que je ne pensais pas. J'étais méchant, désagréable, aigri. Je voulais que tu partes pour ne jamais revenir dans cette chambre aux tons sombres et tristes. Je me mentais à moi-même en essayant de me persuader que je n'avais pas besoin de toi, en vain. Parfois, je n'aspirais plus de te voir faire ta réapparition aux bords du lit dans lequel je passais mes nuits et mes jours. Mais plus les paroles que je prononçais étaient cruelles, plus tu t'approchais sans cesse de mon corps qui lui devenait davantage fragile et frêle. C'est comme cela que j'ai su que tu ne me quitterais jamais.

Un jour, tu m'as dit que tu avais lu par hasard un article dans le magazine de ta petite sœur. Cette article affirmait que deux êtres parfaitement compatibles étaient destinés à être définis comme de véritables âmes sœurs. Moi, je réfute cette thèse. Laisse-moi t'en expliquer la raison. En apprenant à te connaître et également à t'aimer, j'ai compris que tu étais la mienne. Pourtant, toi et moi ne sommes pas entièrement conciliables. Nous avons nos failles, nous avons nos qualités, ce qui fait de notre amour quelque chose d'à la fois parfait et imparfait. Voilà ma définition de l'âme sœur, aussi simple et futile soit-elle : une âme sœur désigne l'être que vous aimez et que vous aimerez jusqu'à la fin de votre vie, en acceptant les qualités qu'elle possède, et tout en tombant également amoureux des défauts qui font d'elle ce qu'elle est. Je pense que le sentiment d'amour et les âmes sœurs forment une sorte de synonyme. J'ai faux, je le sais. Pas vrai ?

His Last Letter | jikookWhere stories live. Discover now