46. CELUI QUI PASSAIT LE BAC

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– Tu as l'air... en colère Louis. Ça va ?, me demanda Eden.
– Mmh.
– C'est parce que c'est notre dernier jour de cours officiel, c'est ça ?

Je laissais échapper un rire jaune. Oui, c'était notre dernier jour de cours. Le dernier jour de lycée de toute ma vie, si tout se passait bien. D'ailleurs, rien que d'y penser, j'avais envie de pleurer. De joie, pas de tristesse. Adieu lycée tout pourri. Adieu cantine dégueulasse. Je disais adieu à cette prison qui m'avait retenue prisonnier pendant trois longues années, et dont je n'avais espéré qu'une chose : sortir au plus vite. Clairement, les années de lycée n'étaient pas les plus belles de ma vie, je le savais déjà. 

– Alors quoi ?
– Je suis juste fatigué...
– Oh, bon.

Eden me tapota le dos et reporta son attention sur le message qu'il venait de recevoir. ? Je tordis légèrement le cou, pour voir le prénom de « Isaac » sur son écran et fronçais les sourcils. Ils se tournaient encore autour. Eden tapotait sur son clavier, sourire aux lèvres. Et dans ces moments-là, j'étais partagé. Je me réjouissais de le voir aussi... pimpant ? Moi aussi, j'avais envie qu'il se réjouisse pour moi. Mais le bac était le dix-sept juin, dans une poignée de jours seulement, et j'allais devoir attendre encore avant de lui dire quoi que ce soit.

La vérité, c'était que j'étais agacé à cause de ma soirée de la veille. Je l'avais passée chez Adel (quelle surprise) et ce dernier m'avait repoussé. Repoussé ! Ça avait carrément blessé ma fierté voyez-vous. Adel qui ne voulait que nous allions plus loin. Alors que bon sang, je ne réclamais que ça ! Mais non. Monsieur disait que c'était trop tôt. Qu'il refusait de griller les étapes. Et moi, j'étais frustré. Parce que je savais très bien de quoi j'avais envie. J'avais passé le reste de ma soirée à le bouder – pour de faux parce que j'étais incapable de contraire – et ça l'avait fait rire. Fierté doublement blessé. Pfft.

« Tu m'en veux toujours pour hier soir ? »

Et Adel revenait à la charge. Par principe, j'avais changé son pseudo par « mec lambda », juste pour éviter que Eden nous grille en pleine conversation. Et aussi parce que c'était une vengeance puérile. Puisqu'il ne verrait jamais son surnom sur mon téléphone.

« T'es chiant quand tu boudes. »

« Tu peux parler. »

« Je ne boude jamais. »

« Certes, toi, tu es chiant tout court. »

Et toc. Je n'en pensais pas un mot. Et Adel le savait. Il devait se marrer derrière son téléphone. Monsieur avait fini ses partiels en début de semaine, il se la coulait douce chez lui en attendant ses résultats.

« Tu veux venir après tes cours ? »

« Tu tentes de te rattraper ? »

« On pourrait aller manger une glace. »

Mon point faible, la bouffe. Encore et toujours. Il n'était pas croyable. Je levai les yeux vers la grande baie vitrée de notre salle de cours. Ciel dégagé, par un nuage à l'horizon... Le beau temps était présent.

« Vendu. »

« Cœur sur toi mon chérinou, je t'attendrais tu sais où ! »

Ce fut plus fort que moi, j'explosais de rire. À côté de moi Eden fit un bond et me regarda avec des yeux ronds. 

– Louis ?
– Ça va, ça va... juste un message très drôle.

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