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Elles étaient couchées depuis maintenant une heure, mais Fanny-Eve n'arrivait pas à trouver le sommeil. Fatou était arrivée à 22h15, avec les chawarmas, qui étaient d'ailleurs délicieux. Sa cousine avait trouvé les bons mots pour la rassurer. Elle essayait de la faire rire, lui racontant des anecdotes et des souvenirs d'enfance. Elles avaient appelé la maman de Fatou, Simone qui vivait à Saint-Louis avec son mari. Elle espérait voir sa nièce avant son retour. Sa tante était professeur de physique-chimie à la retraite tout comme son mari. Fatou était leur unique enfant et ils en étaient fiers.

Fanny-Eve n'arrêtait pas de se retourner dans son lit, pensant à sa mère. Elle avait suivi son époux en Europe à la fin des années 80. Elle avait démissionné alors de son poste biologiste au sein d'un laboratoire d'analyses. Arrivée en France, elle s'était consacrée à sa famille. Elle pouvait être vraiment exaspérante, mais c'était une dame au grand cœur, toujours prête à aider son prochain. Elle se rappela, le jour où Fatou lui avait parlé des enveloppes, qu'elle distribuait aux malades à l'hôpital, croyant qu'elle était au courant. En Effet, tous les deux mois, elle envoyait une somme conséquente à Fatou pour essayer d'aider les malades les plus démunis, ainsi que leur famille. Quand elle lui avait demandé, pourquoi elle ne l'avait dit à personne, elle lui avait répondu, « ma chérie, cette « affaire » c'est entre le bon Dieu et moi, je ne t'en dirai pas plus ». Fanny-Eve l'avait alors prise dans ses bras, fière d'elle.

Elle regarda son téléphone, il était 1 heure du matin. Elle se leva, fit ses ablutions et pria, pour que sa maman aille mieux. Elle retourna se coucher en faisant attention de ne pas réveiller sa cousine. A peine sur le lit, les larmes commencèrent à couler.

Le réveil sonna à 08h45, Fanny-Eve se leva en étirant tout son corps, Fatou était sous la douche. Elle prit son téléphone pour appeler son père malgré le décalage horaire, elle savait que son père se levait toujours à 06h00 du matin. Il décrocha à la première sonnerie :
- Allo, dit-il.
- Allo papa, ça va ?
- Oui ma chérie. Et toi, tu as réussi à dormir un peu ?
- J'ai eu du mal à m'endormir, mais après j'ai dormi comme un bébé, j'étais épuisée. Comment va maman, ajouta Fanny-Eve.
- Je vais retourner à l'hôpital tout à l'heure, hier quand je l'ai laissée, ça allait un peu mieux. On a eu les résultats des premières analyses et ça n'a rien montré d'alarmant. On verra pour le reste aujourd'hui.
- Tu crois que je pourrais lui parler aujourd'hui.
- Oui, répondit son père, je t'appellerai pour te la passer quand j'y serai.
- D'accord à plus tard, gros bisous, bye.
Son père lui dit au revoir et raccrocha.

Elle se leva quand elle entendit la porte de la douche s'ouvrir.
- Bonjour Fa dit sa cousine.
- Bonjour ma puce répondit Fanny-Eve.
- Dépêche-toi de prendre ta douche qu'on puisse manger répliqua Fatou. Tu connais la relation que j'entretiens avec le petit-déjeuner.
- Oh que oui dit Fanny-Eve en rigolant. J'y vais.

Effectivement, Fatou fit honneur au petit-déjeuner en engloutissant un pain au chocolat, un croissant, une omelette et un grand bol de chocolat chaud. Fanny-Eve la regardait en se demandant comment une femme aussi menue pouvait avaler tout ça.
- Bon maintenant que j'ai mangé, j'ai les idées plus claires dit cette dernière. C'est quoi le programme aujourd'hui ? Tu ne vas pas rester là te morfondre.
- Je n'en sais rien, je n'ai pas la tête au boulot.
- Si on allait à Gorée proposa-t-elle, ça te dit ?
- Oui pourquoi pas ? Laisse-moi le temps de lire mes mails et on y va.

Cheikh les déposa à l'embarcadère, où elles prirent la chaloupe. La traversée fut assez agréable, la mer était calme. Il y avait beaucoup de monde qui se rendaient sur l'île, notamment des touristes. Fanny-Eve avait mis une longue robe d'été avec des fines bretelles, « tenue très féminine », pensa-t-elle en rigolant, contrairement à Fatou qui était en pantacourt et débardeur.
Comme à leur habitude à chaque fois qu'elles venaient, elles déambulèrent dans les rues sans but, admirant les vieilles bâtisses de style colonial, passant devant la maison des esclaves et la maison d'éducation Mariama Ba. Des jeunes qui jouaient du djembé attirèrent leur attention. Elles se rapprochèrent des quelques personnes qui s'étaient attroupées autour des percussionnistes. Ils étaient comme habités, elles adoraient ça.

Entre deux feux!Where stories live. Discover now