Chapitre 3

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Octobre 2013

           Depuis que j'avais consenti à satisfaire la libido du père de mes enfants, l'esprit était devenu distant. Bien que je sentais qu'il restait tapi au fond de ma chambre à m'observer, il ne semblait plus vouloir établir un contact physique avec moi. Enfin si le terme de « physique » était le plus approprié pour définir l'expérience que j'avais vécue avec lui depuis qu'il avait osé se glisser dans mon lit. De nouveau, je me sentais très mal à l'idée d'aller me coucher. Car même si au fond de moi, j'étais convaincue que les intentions de cet esprit n'étaient pas mauvaises, le fait qu'il soit profondément contrarié ne me rassurait pas. Il me fallait par conséquent, énormément de volonté pour me convaincre de ne pas déserter ma chambre et pour faire abstraction de sa présence pour pouvoir m'endormir.

          Tout juste une semaine après qu'il ait montré qu'il pouvait être agressif, il se décida à m'approcher de nouveau. Alors que je venais d'éteindre la télévision pour essayer de trouver le sommeil, j'entendis le sommier grincer. C'est alors que mon corps se mit à pencher vers le côté inoccupé du lit m'indiquant qu'il venait de prendre place derrière mon dos. Fébrile, je tâchais d'ignorer ce phénomène de peur de faire quelque chose qui puisse le contrarier. Cependant j'avais beau essayer de faire comme si je ne m'étais aperçue de rien, ma respiration me trahissait. Courte et saccadée, je me doutais qu'elle témoignait de ma grande nervosité, mais malgré tous mes efforts, j'étais incapable de la contrôler. Du moins jusqu'à ce que je sente une main glisser délicatement dans mes cheveux. En sentant la douceur avec laquelle il se mit à caresser ma tête, je compris aussitôt qu'il cherchait à m'apaiser. Ce qui s'avéra très efficace puisqu'en à peine quelques secondes, je retrouvai mon calme. A vrai dire, j'étais subitement si détendue que je commençais à appréhender qu'il s'éloigne de moi, alors même que mon instinct de survie me dictait de le fuir. En effet, comment pouvais-je faire confiance en cette chose dont j'ignorais tout? Même si j'étais certaine qu'il s'agissait d'un esprit, rien ne me garantissait qu'il soit inoffensif. Il pouvait très bien s'agir d'un esprit malin qui essayait de m'amadouer pour mieux me posséder. Dans les nombreux films que j'avais vus, relatant des phénomènes de possession, l'esprit démoniaque tentait toujours de devenir l'ami de ses victimes avant de les transformer en êtres hideux et maléfiques. J'étais peut-être la proie de l'un de ses démons, qui par quelques gestes tendres comptait bien me séduire jusqu'à ce que je le laisse s'approprier mon corps. Bien que je croyais en cette possibilité, et que ma raison m'ordonnait de bondir hors de mon lit, j'étais incapable du moindre mouvement. Le bien-être que me procurait le contact avec cet esprit était tellement profond, que j'avais envie de croire qu'il était bon. Après tout, il pouvait tout aussi bien s'agir d'un ange. Si je croyais aux forces du mal, il était logique que j'envisage l'existence de son antonyme. Ce qui était sûr, c'est que je me sentais tellement bien, tellement sereine que je finis par m'assoupir.

         La journée qui suivit me parut terriblement longue tant j'avais envie de revivre cette expérience. Jamais encore, je n'avais connu un sentiment aussi profond de plénitude. Bien que c'était la première fois que mon corps était animé par de telles sensations, je sentais qu'il développait une dépendance à leur égard. C'est pourquoi, au moment de rejoindre ma chambre, je m'arrangeai pour ne pas réveiller mon compagnon, qui apparemment comblé par nos brèves retrouvailles, avait repris l'habitude de s'assoupir sur le canapé du salon. Je compris alors très vite que je n'étais pas la seule à avoir hâte de revivre une entrevue câline, car à peine avais-je éteint la lumière que je sentis l'esprit prendre place derrière moi. Presque aussitôt, il se mit à caresser ma tête. Je remarquai alors que le sentiment de bien-être que j'avais ressenti la veille se transformait progressivement en une sorte d'extase, qui me mit soudain mal à l'aise. Plus que de l'affection, j'avais le sentiment que cet esprit voulait me transmettre du plaisir. De nature très pudique, j'étais gênée de ressentir un tel émoi. Car même si mes relations avec mon compagnon s'étaient grandement détériorées et que ça faisait bien longtemps qu'il n'avait plus provoqué un tel effet sur moi, je n'avais ressenti aucun manque jusqu'à présent. Bien que comblée par les sensations que cet esprit déclenchait en moi, j'essayais de lutter contre, trouvant ça terriblement malsain que l'âme d'une personne décédée soit parvenue à réveiller ma libido. L'avantage que je retirai néanmoins de cette nouvelle expérience, c'est que j'étais désormais certaine qu'il ne pouvait s'agir de l'esprit de mon père ou de celui de ma grand-mère. Se pouvait-il alors que j'ai attiré l'esprit d'un défunt avec lequel je n'avais aucun lien?

Mon Incube - TOME 1 - Rendez-vous nocturnesWhere stories live. Discover now