10. La déposition

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Les forces de l'ordre ne tardèrent point à se mobiliser sur place. Adhara se félicita d'avoir bouclé l'affaire avant même que les renforts soient arrivés. Les malfrats en joue et menottés, ses collègues n'avaient eu qu'à les embarquer. Voilà une bonne chose de faite, songea l'Anahera.

Quelques minutes plus tard, l'ambulance se frayait un chemin entre les nombreuses voitures de police. L'homme blessé par balle fut emmené, son pronostic vital était engagé. Adhara ne s'en formalisa pas, il avait prévenu... Un coup à pas de bol.

Le jeune homme en profita pour se rapprocher de Taïna dans la cohue, affairée dans les derniers détails. Lorsqu'elle le vit arriver près de son véhicule, elle l'accueillit d'un regard noir.

« Comme de bien entendu, il a fallu que tu fonces tête baissée », lui reprocha-t-elle, caustique.

Taïna se remit alors à écrire dans son rapport. L'ange déchu s'accouda à la portière de la voiture, un sourire niais sur les lèvres.

« L'affaire est faite, j'ai bouclé votre histoire de kidnapping en seulement une heure... dis simplement que tu es jalouse de ne pas avoir autant de talent que moi. »

Le stylo de la policière arrêta sa course et resta en suspens au-dessus des feuilles. L'inspectrice fixa son collègue d'un air mauvais, les sourcils froncés.

« Tu as surtout manqué de tout foutre en l'air ! Si tu avais attendu les renforts, on aurait pu éviter un bain de sang ! Par ta faute, j'ai de la paperasse supplémentaire à faire et on risque d'avoir un mort sur les bras ! Je ne serais pas fière à ta place. »

Elle accentua ses paroles avec le geste, pointant son stylo vers lui. Adhara leva les mains innocemment.

« Crois-moi, je nous ai fait gagner du temps, affirma-t-il.
— À l'heure actuelle, c'est mon poing dans ta figure qui me fera gagner du temps. Ouste maintenant ! Dégage de ma vue. »

Taïna lâcha un soupir énervé et se reconcentra sur son rapport.

« Vive l'ambiance, souffla Adhara. Bon, si tu n'as plus besoin de moi, je m'en vais. »

L'Anahera fit demi-tour pour partir. L'inspectrice leva les yeux de son dossier.

« Tu vas où ? questionna-t-elle sur un ton de reproche.
— Je vais me prendre un billet pour le prochain avion en partance pour Manchester
— Adhara ! le retint-elle. C'est moi ou tu n'as même pas lu ton ordre de mission jusqu'au bout ? »

Adhara s'immobilisa. Dos à sa collègue, il effectua une grimace de d'exaspération avant de lui refaire face.

« J'ai... encore oublié quelque chose ? demanda-t-il sans oser la regarder dans les yeux.
— Connor m'a dit que tu la ramèneras avec toi en Angleterre.
— La fille ? » s'étonna-t-il.

Taïna hocha la tête.

« Putain... Ça n'en finira jamais, se plaignit l'Anahera en passant une main sur son visage. J'en ai marre. Marre de c'patron, marre de c'boulot, marre de ces voyages, marre de ce pays congelé... J'veux rentrer chez moi et comater pendant dix jours.
— Courage... On prendra la déposition de la fille et une fois que toute la paperasse aura été faite, que tu as bien sûr augmenté avec tes conneries, eh bien, tu pourras partir. »

Elle lui renvoya un sourire sardonique.

« Génial... » se contenta-t-il de répondre, levant les yeux au ciel.

***

Autour d'elle, Hedony ne voyait qu'un nuancé de gris. Les murs étaient peints d'un gris ardoise, tandis qu'une baie vitrée opaque devant elle sombrait dans l'anthracite. Même la table sur laquelle elle avait posé ses coudes lui renvoyait un gris métallique et froid, semblable aux réflexions mornes de la jeune femme. Celle-ci se perdait dans ses pensées lorsque la porte s'ouvrit sur l'inspectrice. Cette dernière se présenta d'emblée avec une expression chaleureuse auquel Hedony resta de marbre.

Hedony : Le Pacte oubliéWhere stories live. Discover now