Chapitre 21

Depuis le début
                                    

Il se retourne en entendant des cris. Il m'attrape par le bras et me pousse à me lever. Je le suis sans broncher et tous deux marchons vite en nous engageant dans un tunnel. Ma jambe me tiraillait mais je ne dis rien, de peur que les monstres se jettent sur nous. Voyant que je boitillait, Al fait une pose et s'assoit en s'appuyant contre le bord. Je fait de même, ma jambe pleine de sang tendue en avant. Je l'entends arracher un bout de sa chemise et l'entourer autour de ma taille en serrant bien fort. Je pousse un gémissement.

- Pardon, dit-il inquiet.

- Non... C'est... Rien.

Je me redresse, une grimace collée au visage.

- Comment ça va ? me lance-t-il après un long silence. J'ai l'impression qu'il y a une éternité qu'on ne s'est pas vu...

- Une éternité ? Tu rigole ? Je t'ai vu la dernière fois, en rêve !

Il cligne plusieurs fois des yeux sans comprendre.

- Qu'est ce que tu racontes ? Je ne t'ai jamais vu en rêve.

Je fronce les sourcils.

- Cébren... chuchote-t-il en se plaçant devant moi, son regard planté dans le miens. On ne peut pas voir les morts en rêves...

- Alors qu'est ce que tu fiches ici ?

- Je ne sais pas ! Je me suis réveillé ici. D'après quelques gens que je connais, j'y est été expédié après ma « mort » dans ta simulation. On dit qu'ici, on est entre la vie et la mort et qu'il n'y a que très peut de chances qu'on se retrouve à la vie...

Je le regarde droit dans les yeux, le cœur brisé. Qu'est ce que tout cela signifiait ? Il ne m'avait jamais vu en rêve et le voilà dans le monde à l'envers à me dire qu'il a très peut de chance de mourir.

- Je suis au courant pour ton don, déclare-t-il en se remettant à sa place. Tu peux voir les morts et j'ai appris une chose...

- Ah oui ? fais-je, tremblante d'inquiétude.

- Tu ne peux voir les morts en rêve. Ta conscience te l'en interdit. Ton cerveau est plus adapté à les voir pour de vrai, sous forme « d'illusion », m'explique-t-il en faisant des guillemets sur le dernier mot. Mais pour toi, ce ne sont pas des illusions, mais une sorte de réalité pour ta conscience.

- Tu veux dire que... Ma conscience n'est pas la même que la vôtre ?

Il fait non de la tête.

- Nous sommes dans un monde bizarre, soupire-t-il.

- Ça, je l'avais remarqué, grommelé-je.

Nous nous décidons enfin à nous en aller d'ici quand je me rappelle soudain que Blanche est quelque part, dehors sans doute morte... Je lui explique brièvement la situation tout en marchant à ses côtés.

- Nous allons devoir fouillé la ville, déclare-t-il après un long moment d'hésitation. J'espère qu'elle est toujours en vie...

##

Je n'arrive pas à y croire. Nous sommes enfin sorti de ces fichus égouts et on se retrouve nez à nez avec Blanche, à demi consciente au sol. Al se précipite vers elle et la regarde un long moment.

- Elle est belle...

- Hein ?

Je fais les yeux ronds. Al, tomber amoureux de Blanche ? Houlàlà !

- Heu... Rien. Il faut la porter. Comment on rentre chez vous ?

- Quoi ? Attends, tu peux venir avec nous ?

Il baisse la tête, le bras de ma sœur autour de ses épaules. Attendant une réponse, j'attrape son autre bras et nous la traînons ensemble.

- Non, je veux que vous rentriez.

- Et toi ? Que vas-tu devenir ?

- Seul le destin sait ce qu'il m'arrivera, dit-il tristement. Mais au moins, j'aurai été heureux de vous rencontrer.

Il sourit tristement et se remet à marcher. Nous marchons longtemps, nous arrêtons à des moments pour réveiller ma sœur, en vain. Alors qu'on commençait à désespéré, elle ouvre lentement les yeux et pose son regard dans celui d'Al.

- J'ai essayé, dit-elle d'une voix rauque en se redressant, une main sur sa tête.

- De quoi est-ce que tu parles ? m'étonnai-je.

Mais avant qu'elle ne puisse répondre, trois Démongorgogne apparaissent de chaque coins pour nous bloquer le passage. Je me remets à trembler mais me ressaisie en prenant un bout de bois et frapper un monstre en pleine tête.

- Non ! hurle ma sœur dans mon dos au moment où je le frappe.

Trop tard. Il ouvre grand sa bouche – qui ressemble à une fleur -, près à me dévorer. Rapide comme l'éclair, je me baisse mais il comprend vite ma tactique et me prend la jambe pour me brandir en l'air. Tête vers le sol, je peux sentir une allène répugnante.

Étonnée, il me lâche tout à coup, les mains en l'air comme si quelque chose l'avait empêché de me manger. Je retombe lourdement et regarde autour de moi : les autres monstres sont dans le même état. Je pose mon regard vers ma sœur. Celle-ci à ses mains de chaque côté, comme si elle arrivait à contrôler les monstres.

- Regarde ! se réjouit Al.

J'obéis et voit à présent des ondes autour de ma sœur. Elle arrive à contrôlé ses bestioles !

- Je ne vais pas tenir ! dit-elle d'une voix rauque. On va bientôt rentrer, Cébren viens !

Je commence à m'approcher d'elle quand je me tourne vers mon ami. Il me serre dans ses bras et reconnaît tout à coup que cette étreinte n'est pas la même que celle que j'avais faite avec « l'autre ». Celle-ci et plus douce, plus câlineuse.

- À bientôt, me murmure-t-il en se détachant de moi.

- Promets-moi une chose.

Il me regarde intensément. J'inspire un bon coup et me lance :

- Promets-moi de ne pas aller me voir.

Il comprend et hoche la tête.

- Je ne mourrais pas, je te le promets, annonce-t-il en s'en allant.

Il zigzag entre les monstres et grimpe sur un toit de maison. Il saute entre les espaces qu'il y a et disparaît dans le noir de la ville. Je m'agrippe à ma sœur et tout tourne autour de nous jusqu'à ce qu'on se retrouve à la maison.  

Les HooperOù les histoires vivent. Découvrez maintenant